La course à la commercialisation des voitures autonomes a attiré des milliards de dollars d’investissements, pourtant peu en sont devenus milliardaires. Austin Russell, fondateur et PDG de Luminar, fait partie des rares exceptions. Avec l’inscription au Nasdaq de sa société de capteurs laser, fondée quand il avait à peine 17 ans, le prodige de l’optique est l’un des premiers milliardaires à émerger du secteur des voitures autonomes, et le plus jeune milliardaire autodidacte du monde.
Du haut de ses 25 ans, Austin Russell déclare : « Ça a été incroyablement intense, épuisant… tout ce que nous avons dû traverser chaque jour, en augmentant la taille de l’entreprise. Et bien sûr, c’est incroyablement gratifiant d’avoir l’opportunité de pouvoir se lancer maintenant sur les marchés publics, et de se développer grâce à cette introduction en bourse. Je suis encore relativement jeune, mais nous avons sué sang et eau. Au final, j’ai eu la chance de pouvoir conserver une assez bonne participation dans l’entreprise ».
Assez bonne, c’est le cas de le dire. Austin Russell possède 104,7 millions d’actions de Luminar, soit environ un tiers du total en circulation, pour environ 2,4 milliards de dollars (valorisation à la clôture du Nasdaq ce jeudi). L’introduction en bourse de l’entreprise, annoncée en août, est le résultat d’une fusion avec la société d’acquisition spécialisée Gores Metropoulos, qui a porté la valeur marchande estimée de Luminar à 3,4 milliards de dollars avant le début des négociations. Parmi les investisseurs de la nouvelle société publique, citons le milliardaire Peter Thiel (fortune nette : 4,6 milliards de dollars), qui a aidé Austin Russell à démarrer, mais aussi le Volvo Cars Tech Fund, Alec Gores, un autre milliardaire (fortune nette : 2,2 milliards de dollars) également membre du conseil d’administration de Luminar ; et le milliardaire Dean Metropoulos, le président de la société.
Peter Thiel, le cofondateur de PayPal qui a créé une bourse offrant à des jeunes 100 000 $ pour abandonner leurs études afin de poursuivre leurs rêves, est conseiller d’Austin Russell depuis que ce dernier a quitté Stanford en 2012 pour fonder Luminar. En tant que mentor, Peter Thiel se dit impressionné par l’intellect du nouveau milliardaire de la tech, mais aussi par sa capacité à conserver une part importante de son entreprise lors de son arrivée au Nasdaq.
Le mentor du jeune milliardaire précise : « Vous pouvez créer une entreprise valorisée à un milliard de dollars, mais cela ne signifie pas que serez milliardaire pour autant. Du point de vue du financement, il est remarquable de conserver une telle participation financière ».
Austin Russell, qui avait figuré sur le classement Forbes 30 Under 30 en 2018, ne cherche pas à s’attaquer à des géants de la conduite autonome comme Waymo ou Cruise, mais plutôt à perfectionner des capteurs qui aideront les voitures autonomes à voir leur environnement en faisant rebondir un rayon laser sur les objets se trouvant sur leur chemin. La technologie, connue sous le nom de lidar (une contraction de « light detection » et « ranging »), est fondamentale pour les véhicules autonomes. Luminar est en concurrence dans ce domaine avec Velodyne, le leader du lidar pour les voitures autonomes, et la nouvelle entreprise Aeva, toutes deux introduites en bourse par le biais de fusions SPAC (« Special Purpose Acquisition Company »). Austin Russell a vendu des prototypes de capteurs à de grands constructeurs automobiles ces dernières années, mais il a récemment obtenu des commandes de production de Volvo Cars, Daimler et Mobileye d’Intel qui pourraient assurer une croissance de son chiffre d’affaires pendant plusieurs années.
Luminar affichera probablement des ventes de 15 millions de dollars cette année, mais pourrait générer au moins 1,3 milliard de dollars d’ici 2026, selon les estimations d’un dossier déposé auprès de la U.S. Securities and Exchange Commission.
Selon Alec Gores, qui a aidé à organiser l’entrée en bourse de Luminar, les capacités d’Austin Russell s’étendent au-delà du laboratoire : « Quand nous faisions les négociations, il était tellement au courant de tout, des petits détails. Les gars de soixante ans qui sont dans le métier depuis 40 ans ne comprennent pas ce genre de choses, mais il a pris le temps d’étudier la SPAC. Il a posé plus de questions que tous ceux que j’ai vus et qui font ce métier depuis longtemps ».
En effet Austin Russell accumulait les succès bien avant son nouveau statut de milliardaire. Il aurait mémorisé le tableau périodique des éléments à l’âge de 2 ans et connecté sa console Nintendo DS sur un téléphone portable rudimentaire alors qu’il était en sixième. À 13 ans, il déposait son premier brevet : un système de recyclage des eaux souterraines qui capte l’eau des arroseurs et la conserve pour les futurs jardins, afin de réduire la quantité d’eaux usées. Plutôt que d’aller au lycée, il a passé son adolescence à l’université de Californie, au Beckman Laser Institute.
Il est ensuite admis à Stanford pour y étudier la physique, mais ne reste pas longtemps. Il abandonne ses études au milieu de sa première année après avoir obtenu une bourse Thiel de 100 000 $ pour son concept de lidar, et fonde Luminar peu de temps après avoir obtenu son permis de conduire.
À l’exclusion des fortunes héritées, Austin Russell fait partie de la dizaine de personnes sur la planète à avoir gagné un milliard de dollars avant ses 30 ans.
Le lidar a été une obsession pour Austin Russell dès son premier âge, car il pense que cette technologie a le potentiel de sauver des vies, à la fois dans le cadre de la conduite autonome et en tant que composant des systèmes avancés d’aide à la conduite, que Volvo et d’autres constructeurs vont mettre sur le marché dans les deux ou trois prochaines années. Adolescent, il s’était penché sur ce que Velodyne et d’autres sociétés faisaient avec les capteurs laser, mais il avait conclu qu’une approche différente était nécessaire pour les rendre suffisamment bon marché et les démocratiser.
Le fait qu’Austin Russell ne soit pas du tout distrait par les réseaux sociaux ou par les exigences d’éducation générale des universités et des lycées, qui sont très chronophages, est un avantage. Contrairement à la plupart des jeunes de 25 ans, il n’a ni compte Twitter ni Instagram, mais avoue avoir appris la plupart de ce qu’il sait sur les voitures autonomes et le monde grâce à des heures passées sur Wikipédia et sur YouTube.
En tant que membre de la génération Y, Russell pense également à son impact. Bien qu’il n’ait pas de projets philanthropiques prévus dans l’immédiat, il s’implique grandement dans l’éradication des accidents de la route : « Quand le lidar deviendra une nouvelle technologie de sécurité moderne sur les véhicules, qui sera intégrée sur chaque voiture produite dans le monde, alors je pourrai dire que nous aurons atteint les objectifs que nous nous étions fixés ».
Article traduit de Forbes US – Auteurs : Alan Ohnsman & Alexandra Sternlicht
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