La majorité des territoires français utilisent aujourd’hui les connectivités IoT, à petite ou grande échelle. Que ce soit sur les routes, dans les rues, ou dans les bâtiments et lieux publics, la connectivité permet de gérer la consommation d’énergie, mais aussi la sécurité et le confort des citoyens. Où en sommes-nous dans le développement des territoires connectés, quels sont les usages et les enjeux de ce marché, et comment l’IoT participe-t-il à ce changement ?
Une contribution de Bernardo Cabrera, Directeur de la BU d’Objenious
La numérisation des territoires en évolution constante
Les territoires connectés regroupent aussi bien les grandes métropoles que les villages, ayant développé un ou plusieurs projets intégrant des innovations numériques connectées via des réseaux cellulaires ou la fibre. La numérisation des territoires a pris une belle ampleur ces dernières années, selon le premier « Observatoire des Territoires connectés et durables 2024 », portée notamment par la volonté de transition environnementale. En effet, selon le rapport, la thématique des chantiers en cours et à venir porte principalement sur l’énergie des bâtiments (50% des répondants), l’éclairage (50%), l’eau (45%) et les déchets (33%). De nouveaux chantiers émergent également avec la gestion des risques environnementaux (15% des projets). L’enjeu des villes est avant tout de faire des économies et d’avoir une meilleure gestion des consommations, une ambition portée par l’État via son plan de sobriété énergétique qui a fixé aux collectivités l’objectif d’atteindre -60 % d’énergie consommée d’ici 2050. Mais les chantiers des territoires numériques s’étendent également au-delà de la dimension environnementale puisque la sécurisation des systèmes d’information est également une priorité pour 60% des répondants du rapport.
Les connectivités IoT sont aujourd’hui totalement intégrées dans les lieux publics : exemples concrets
L’usage de l’IoT au sein des territoires peut être appliqué via des cas d’usage variés visant à améliorer le quotidien des usagers, tout en apportant aux villes des données précises pour une meilleure maitrise du paysage urbain. À titre d’exemple, les feux tricolores, les lampadaires ou encore les passages piétons connectés, qui s’adaptent au comportement des automobilistes et des piétons, sont en plein essor en France. Des capteurs peuvent être ajoutés sur les voies pour connaître la température de l’air et de la surface de la route. Ces données sont notamment transmises à l’équipement de viabilité hivernale couramment utilisé sur les camions de salaison et les dessableurs. Les collectivités mettent également à disposition des bornes de recharge pour les véhicules électriques et des vélos disponibles en libre-service. Dans le cadre de la gestion des poubelles, il existe des capteurs qui suivent le taux de remplissage et les points d’apports volontaires, afin d’optimiser le passage des éboueurs.
Pour la vidéoprotection, les caméras de surveillance mobiles fonctionnaient jusqu’à présent principalement via la fibre. Aujourd’hui grâce à l’intégration d’une carte SIM, ces dernières sont plus autonomes et communiquent via la 4G/5G. Cela permet notamment de les déplacer en fonction des besoins de la collectivité (évènement local, carrefour accidentogène, dépôt sauvage…). Des alarmes peuvent être intégrées au sein des bâtiments publics (mairie, écoles) en cas d’effraction, avec des alertes envoyées directement à la police municipale. En plus de la dimension sécuritaire, l’IoT contribue également à l’optimisation de la consommation d’énergie et la maintenance des infrastructures, grâce à des compteurs connectés ou encore à la télérelève, qui permettent de mesurer une multitude de données (taux de CO2, température, signalement d’une panne, de pertes d’énergie ou encore de fuites d’eau). Une fois l’objet connecté implémenté, toutes les informations utiles à la maintenance sont ainsi surveillées quotidiennement pour un entretien plus efficace et plus durable. En fonction des besoins, la plupart des parcs IoT vont prioriser soit les réseaux LTE-M pour une meilleure longévité de batterie, soit la 4G/5G, voire la 5G privée pour s’assurer du meilleur débit possible.
Comment poursuivre l’optimisation des territoires connectés ?
Selon l’étude d’InfraNum, 80% des collectivités françaises déploieront dans les 10 prochaines années des projets de territoires connectés et durables, notamment grâce à des subventions provenant de sources variables (État, Union Européenne, région…). D’après l’Observatoire des territoires connectés et durables, les petites et moyennes collectivités ont gagné en maturité ces deux dernières années. Les plus avancées ont su adapter l’IoT pour répondre à leurs besoins spécifiques grâce à l’expérimentation et la méthode pas à pas. À titre d’exemple, la ville de Drancy a ainsi pu sortir son épingle du jeu, en mettant en place de nombreuses solutions connectées innovantes comme l’optimisation du stationnement grâce à une visualisation en temps réel des places de parking, le contrôle de la pollution grâce à l’installation de capteurs de CO2 ou encore des solutions de lutte contre le dépôt d’ordures sauvage grâce à des caméras 5G nomades.
Les petites et moyennes villes ont souvent le plus à gagner avec la supervision automatisée de leurs infrastructures. Si l’optimisation des territoires repose principalement sur de nouvelles réglementations de l’État et du budget alloué, l’adoption du projet dépend d’un portage politique, lequel permet de sensibiliser et mobiliser les agents. D’autant plus que chaque ville a ses enjeux, et qu’elles ne sont toutes de la même taille. Les projets d’intégration de connectivité dans les grandes villes se font moins rapidement que dans une plus petite, nécessitant plus de matériel, d’organisation et de budget. L’agilité des équipes impliquées et des opérateurs télécom partenaires devient alors un atout pour le développement de projets IoT innovants, d’autant que tous les projets ne se valent pas. Certains domaines se révèlent en effet plus complexes que d’autres à mettre en place. C’est par exemple le cas de l’optimisation de la collecte des déchets, un projet qui exige un accompagnement humain tant il modifie les habitudes des équipes d’éboueurs ou encore l’instrumentation des bâtiments (installation d’appareils sur mesure) qui doit se faire au cas par cas pour tenir compte des usages de l’infrastructure.
Pour permettre le développement des territoires connectés, la qualité du réseau compte. En 2018 le gouvernement et l’Arcep ont annoncé un ensemble de mesures et d’engagements des opérateurs pour démocratiser la 4G dans l’Hexagone et surtout accélérer la couverture mobile des territoires. Concernant les zones blanches, selon l’Arcep un effort conséquent a été réalisé. Pour preuve, la part du territoire située en zone blanche de la 4G est passée de 11 % à seulement 1,9 % fin 2022.
La numérisation des collectivités est un enjeu national, ne serait-ce que pour des questions d’optimisation des dépenses énergétiques. Beaucoup de territoires ont ainsi adopté l’intelligence des technologies IoT et entamé leur transition vers le numérique. Mais les réglementations à la fois évolutives et longues à l’adoption, les budgets dédiés plus ou moins conséquents, l’organisation administrative changeante, et la superficie des territoires influent sur cette progression. Il s’agit d’un chemin long et fastidieux mais possible et rentable pour les régions françaises. Si certaines iront plus vite que d’autres dans leur numérisation, toutes ont grand intérêt à déployer ce type de projet pour assurer la sécurité et le confort tout en ayant une meilleure gestion énergétique sur leur territoire.
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