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Quand l’Abonnement Réinvente l’Industrie Du Transport

Il y a 15 ans, une voiture sans conducteur relevait de la science-fiction. Aujourd’hui, l’alliance Transdev et Renault-Nissan prouve que le véhicule autonome fait partie du champ des possibles. Le transport connaît une révolution semblable à celle qu’il a connue pendant la Révolution Industrielle, mais il s’agit autant d’un bouleversement technique que d’un changement radical de comportement. L’abonnement dans les transports, qui change de visage lui aussi, nous éclaire sur ces nouveaux usages et sur les attentes des consommateurs.

 

Le potentiel d’illimité plus que la possession

Au nom de « l’expérience client », les entreprises de toutes industries doivent se réorganiser pour aller véritablement à la rencontre de leurs consommateurs. C’est ce qu’expliquent G.G Parker, M.W Van Alstyne et S.P Choudary dans leur ouvrage Platform Revolution, étayant leur propos avec (entre autres) l’exemple d’Amazon Kindle : alors que les éditeurs traditionnels sélectionnent leurs ouvrages phare de manière hasardeuse, Amazon Kindle s’appuie sur la data et les retours en temps réel pour mettre en avant les bons titres, et faire à chaque client des propositions de lecture personnalisées. La plateforme renforce ses avantages compétitifs en proposant des abonnements illimités à ses utilisateurs, ce qui signifie pour eux encore plus de choix et de recommandations.

Ce potentiel d’illimité – plus que le fait de posséder réellement – est amené à devenir la norme. De fait, il débarque déjà dans les transports. Outre les abonnements qui existent déjà (Pass Navigo, Autolib), de nouvelles offres révolutionnent la manière de voyager. On pense notamment à l’abonnement SNCF illimité proposé pour les 15-27 ans, ou encore à Surf Air, qui vient de se lancer en Europe, et va révolutionner l’industrie du transport aérien en se reposant entièrement sur l’abonnement.

Booster la mobilité

L’abonnement vient en fait réaliser une promesse de mobilité que les Trente Glorieuses n’ont pas tenue : celle d’une liberté réelle. Dans le geste et la parole, Leroi Gourhan explique en quoi la mobilité fait intimement partie de l’ADN humain, et en quoi elle est faite de libérations successives (conquête de l’air libre, accès à la bipédie). Pour lui, « la locomotion a été le fait déterminant de l’évolution biologique, comme elle apparaît comme le fait déterminant de l’évolution actuelle. ». En effet, « le cerveau a profité de l’adaptation locomotrice. » et non l’inverse.

Plus que jamais aujourd’hui, la mobilité apparaît comme cette « libération » à laquelle chacun a droit. Or, ce droit est encore entravé par des contraintes de moins en moins acceptées socialement. Qui n’a jamais dû réserver ses vacances trois mois en avance, ou attendre trois heures à l’aéroport ? Surf Air s’attaque au problème et permet d’embarquer 15 minutes avant le vol. Une autre attente forte est d’en avoir pour son argent. A cet égard, SNCF fait valoir que sa formule d’abonnement pour les jeunes est moins chère qu’un covoiturage Paris-Marseille. Autre exemple significatif : les assurances Pay as/how you drive intéressent de plus en plus de monde, principalement une cible qui entend bien rester maître de sa consommation. Ainsi, l’abonnement est un formidable levier de fidélisation amené à monter en puissance, mais c’est surtout un excellent système pour enfin passer de l’économie du transport à l’économie de la mobilité.

L’automobile se numérise et se « servicialise »

In fine, cette appétence pour l’abonnement et le paiement à l’usage nous en dit long sur la mobilité en devenir. Tout d’abord, l’automobile n’est plus un objet statutaire, mais un service numérique investi par les objets connectés (GPS, tableaux de bord…), dont l’utilisation se fait au forfait.

Bientôt, c’est jusqu’à l’utilisation de l’automobile qui se fera par abonnement. On voit déjà l’engouement pour l’Autolib, qui sert d’inspiration pour les constructeurs. Hyundai, par exemple, s’apprête à commercialiser une voiture électrique (The Ionic) qu’on n’achète pas : pour la conduire, l’usager devra s’abonner pour 24 à 36 mois. A partir de là, si on prend en compte la relative désaffection des jeunes urbains par rapport au permis de conduire, on peut d’ores et déjà dresser le portrait d’une mobilité en mode « pay per use », avec une attention particulière portée au 0 émission, et la généralisation des véhicules sans conducteurs.

 

C’est donc une mobilité à la carte et sans contrainte qui se profile. Avec elle, de nouveaux modèles économiques verront le jour. L’abonnement sera en toute logique le vecteur privilégié de « l’économie de l’usage. »

 

Tribune par Philippe Van Hove, VP Europe de l’Ouest, Zuora

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