Alors que la pandémie liée au Covid-19 perd de son intensité, un premier constat s’impose : les pays les plus efficaces sont ceux qui ont su allier la technologie aux mesures sociales contraignantes. Avec une prise de conscience à la clé : la nécessité de se doter de politiques de santé basées sur la prévention, en s’appuyant sur les outils numériques.
Vendredi dernier, le président du conseil scientifique, le professeur Delfraissy, indiquait que le Covid-19 continuait à « circuler à une petite vitesse » en France, sous-entendant que l’épidémie était, pour l’instant, sous contrôle. Sans présager de l’avenir donc, un premier bilan sur l’efficacité des réponses des pays concernés peut déjà être esquissé, dans le but d’identifier les meilleures pratiques.
En l’absence de traitements curatifs ayant réellement prouvé leur efficacité, et sans disposer non plus de traitements préventifs – même si des centaines de projets de vaccins sont menés dans le monde – les efforts des gouvernements ont largement porté sur la volonté de limiter la propagation du Covid-19. Et pour cela, les technologies numériques ont été particulièrement sollicitées.
Alors que l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) place les applications de suivi des contacts parmi les mesures les plus efficaces dans ce domaine – avec les tests ainsi que les mesures barrière et d’isolement – celles-ci font florès. Dès le mois de mars, Singapour produisait la sienne. En France, l’application StopCovid a été téléchargée plus d’un million de fois lors de la première semaine de sa mise en service, début juin. Chaque pays a positionné le curseur, comme il l’a souhaité, entre respect de la confidentialité et efficacité médicale. L’avenir dira de quelle façon ces applications permettent de contenir d’éventuelles « nouvelles vagues » de contamination et il y a fort à parier que si elles prouvent leur efficacité, elles se banaliseront sur les smartphones de la planète.
L’apport technologique, visible pour la population, ne s’est bien sûr pas limité à ces dernières. Dans plusieurs pays, dont l’Italie, les Pays-Bas ou la Chine, des policiers et des personnels de santé à l’allure futuriste ont essaimé, principalement dans les aéroports. Dotés de casques équipés de caméras thermiques, ils ont pu, grâce à leur équipement, prendre instantanément la température des passagers. Une efficacité prouvée jusqu’à deux mètres de distance. Fabriqués par la société chinoise KC Wearable, ces casques sont dotés d’une visière sur laquelle peuvent s’afficher, en réalité augmentée, diverses informations : la température de la personne mais aussi, éventuellement, son identité, via un système de reconnaissance faciale biométrique couplé à la caméra thermique… Cette fonctionnalité, selon la société qui l’a développée, Telpo, serait déjà utilisée dans plusieurs pays, en Chine bien sûr, mais également aux États-Unis et même dans plusieurs pays européens.
Après les casques, les drones
En Inde, en Chine ou aux Philippines, mais également en Espagne, les drones ont aussi été mis à contribution pour désinfecter d’importantes surfaces rurales ou urbaines. Aux États-Unis et en Australie ces derniers ont plutôt été utilisés pour livrer du matériel médical ou des médicaments.
Mais c’est bien sûr dans la fonction de contrôle de la population vis-à-vis de l’épidémie que cet usage est le plus contesté. Une utilisation interdite en France par le Conseil d’État, ce qui n’est pas le cas en Chine ou aux Emirats Arabes Unis (EAU). Ainsi à Dubaï, la police locale a utilisé drones et caméras haute définition dans le cadre d’un programme baptisé Oyoon, lancé l’année dernière pour lutter contre la criminalité. Repositionné pour combattre la pandémie, le système, couplé à des algorithmes d’intelligence artificielle a permis d’analyser les données recueillies en temps réel pour déterminer si un passant ou un automobiliste était bien en possession d’un permis l’autorisant à circuler, pour aller travailler notamment.
Une politique de santé prédictive et préventive
Adeptes de tests massifs, les EAU ont probablement été la région du monde où les outils technologiques ont été utilisés de la façon la plus complémentaire et innovante. Comme par exemple ce rayon laser développé par l’entreprise locale QuantLase Imaging Lab, qui permettra à terme de tester simultanément une population très nombreuse. La technologie laser est couplée à une caméra, elle-même reliée à des programmes d’intelligence artificielle qui analysent les bases de données vidéo. Selon le Dr Pramod Kumar, qui pilote l’équipe scientifique, cette “ solution permet de fournir une signature infectieuse en quelques secondes ”.
Le succès de cette politique est déjà au rendez-vous : le nombre de cas constatés aux EAU a été très faible, le confinement plus bref qu’ailleurs et la compagnie Emirates a été l’une des premières au monde à reprendre une bonne partie de ses vols internationaux, avec tests de dépistage obligatoires avant l’embarquement.
A en juger par les résultats obtenus par certains pays dans leur lutte contre la pandémie, les plus efficaces ont été ceux qui ont su mettre les technologies les plus récentes au service d’une politique de santé plus largement basée sur la prévention.
De ce point de vue, les travaux menés actuellement par la London School of Hygiene and Tropical Medicine (LSHTM) sont édifiants. Celle-ci analyse les données statistiques fournies par chaque pays pour mieux comprendre l’effet des différentes mesures de contrôle et de prévention. En comparant ensuite les résultats, la LSHTM espère pouvoir proposer des modèles qui permettront de mieux prédire ce qu’il faudra faire lorsque de nouvelles pandémies comparables surviendront.
Ces modèles, qui seront disponibles via l’Organisation Mondiale de la Santé, devraient donc permettre à chaque pays de faire des simulations sur son environnement propre. Et donc d’établir une politique de santé prédictive spécifique. Aux États-Unis, les systèmes de santé privés les plus efficaces appliquent déjà à leurs membres des stratégies de tests et de dépistage systématiques, complétées par des campagnes de sensibilisation personnalisées vis-à-vis des risques sanitaires encourus.
Raisons affichées pour une telle politique : préserver la santé des membres bien sûr mais surtout maîtriser les coûts de gestion. Plus les maladies sont soignées de façon précoce, moins elles coûtent cher. La crise du Covid a certainement accéléré cette prise de conscience de la part des gouvernants du monde entier, mettant sur les rails les jalons d’une santé prédictive, qui pour être applicable à nos standards démocratiques devra se tenir à bonne distance de la vie privée.
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