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L’IA dans le recrutement : nous remplacer ou nous replacer ?

L'IA dans le recrutement : nous remplacer ou nous replacer ?

Le 10 février prochain, le gratin mondial de l’intelligence artificielle se réunira au Grand Palais Éphémère. Entre fascination et appréhension, une question revient sans cesse : l’IA va-t-elle nous voler nos emplois ? Dans les départements RH, cette interrogation fait trembler les murs. Selon une étude récente de McKinsey (« The State of AI in Talent Acquisition », 2023), 65% des professionnels du recrutement craignent d’être remplacés par des algorithmes d’ici 2030. Et si nous avions tout faux ? Si l’IA, plutôt que de nous menacer, était en réalité notre planche de salut ?

Une contribution de Malik Rajan, fondateur du Club du Pricing

 

Regardons les chiffres en face : selon l’étude Deloitte « Global Human Capital Trends 2023 », un recruteur passe 60% de son temps à faire… tout sauf recruter. Tri de CV, présélection téléphonique, planification d’entretiens. Un gâchis monumental de talent et d’expertise, particulièrement dans un marché où, d’après l’enquête « Besoins en Main d’Œuvre 2023 » de Pôle Emploi, 82% des entreprises françaises hurlent à la pénurie de compétences. C’est comme demander à un chef étoilé de passer ses journées à éplucher des pommes de terre plutôt que de créer des plats d’exception.


 

Le mythe du recruteur remplacé par la machine

 

Parlons franchement : combien de talents exceptionnels avons-nous manqués à cause de nos biais inconscients ? Comme la mémoire involontaire de Proust qui surgit à notre insu avec le goût d’une madeleine, nos préjugés influencent nos décisions sans même que nous en ayons conscience. L’étude LinkedIn Talent Solutions « Global Recruiting Trends 2023 » est implacable : 94% des recruteurs admettent que leurs biais affectent leurs choix. Un nom qui sonne trop étranger, une école méconnue, un parcours atypique… et hop, à la poubelle ! L’IA, elle, ne juge pas. Elle ne s’arrête pas au packaging. Elle plonge dans la substance, dans les compétences réelles, dans le potentiel brut.

Selon une étude de cas publiée par Gartner (« AI in HR », 2023), une grande banque française a constaté une augmentation de 35% de la diversité des profils recrutés après l’implémentation d’un système d’IA pour la présélection des candidats. Non pas parce que l’IA avait des quotas à respecter, mais simplement parce qu’elle a regardé là où les humains ne regardaient plus.

 

75% de gain de temps dans le recrutement grâce à l’IA

 

Vous pensez que tout cela n’est que théorie ? Détrompez-vous. Dans les coulisses des grands groupes comme des startups innovantes, l’IA transforme déjà radicalement la façon dont on recrute. Une directrice RH d’une licorne française me confiait récemment : « Avant, je passais mes journées à faire de l’administratif. Aujourd’hui, je fais enfin mon vrai métier : comprendre les gens, évaluer leur potentiel, construire des équipes qui fonctionnent. »

D’après le rapport McKinsey « The State of AI in HR » (2023), les entreprises qui ont adopté l’IA en complément de leurs équipes RH constatent une réduction de 75% du temps de recrutement. Mais le plus impressionnant n’est pas là. L’étude révèle une amélioration de 50% du taux de réussite des périodes d’essai, une satisfaction des managers en hausse de 65%, et un turnover en baisse de 30%.

 

L’humain augmenté, pas remplacé

 

Comme le narrateur de « À la recherche du temps perdu » qui ne trouve le sens de son existence qu’en assemblant les fragments de sa mémoire, le recruteur moderne redécouvre la vraie valeur de son métier grâce à l’IA. Elle fait ce que les machines font le mieux – analyser des données en masse, détecter des patterns, éliminer les biais – pour nous permettre de faire ce que les humains font le mieux : comprendre les aspirations profondes, évaluer les soft skills, sentir les dynamiques d’équipe.

« Ce n’est pas la technologie qui déshumanise », écrivait Harvard Business Review dans son rapport « Future of Work 2023 », « c’est le manque de temps pour être humain. » L’IA nous offre justement ce luxe devenu si rare : le temps. Le temps d’écouter, de comprendre, d’accompagner. Le temps de faire ce pour quoi nous avons choisi ce métier : révéler le potentiel humain.

 

L’avenir appartient aux hybrides

 

Alors que le sommet de l’IA s’apprête à débattre du futur de la technologie, une chose est sûre : l’avenir du recrutement n’appartiendra ni aux purs technophiles, ni aux irréductibles du tout-humain. Il appartiendra à ceux qui sauront combiner le meilleur des deux mondes.

Selon une étude récente du MIT Technology Review (« The AI Advantage in Talent Acquisition », 2023), les algorithmes peuvent désormais analyser un million de profils en moins de 24 heures, avec une précision de matching de 95%. Mais c’est toujours l’humain qui comprendra pourquoi un candidat brillant préfère une petite structure innovante à un grand groupe prestigieux. C’est toujours l’humain qui détectera cette étincelle dans le regard, cette capacité à inspirer les autres, cette intelligence émotionnelle qui fera la différence.

Les données de l’Observatoire de l’IA en France (2023) sont éloquentes : les entreprises qui réussissent le mieux leur transformation digitale ne sont pas celles qui ont le plus investi dans la technologie, mais celles qui ont su créer une véritable symbiose entre leurs outils d’IA et leurs équipes RH. Comme le souligne une étude du Boston Consulting Group, ces entreprises affichent une performance de recrutement supérieure de 40% à la moyenne du marché.

 

 

La prochaine fois qu’on vous demandera si l’IA va remplacer les recruteurs, répondez simplement : « Non, elle va enfin nous permettre d’être de vrais recruteurs. » La technologie n’est pas notre ennemie, elle est notre alliée la plus précieuse dans la quête des talents qui feront l’entreprise de demain. Comme l’écrivait Proust, « le véritable voyage de découverte ne consiste pas à chercher de nouveaux paysages, mais à avoir de nouveaux yeux. » L’IA nous donne ces nouveaux yeux. À nous maintenant d’en faire le meilleur usage.

 


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