Les ordinateurs quantiques représentent une avancée comparable au passage des tubes à vide aux transistors dans le domaine de l’ingénierie informatique. Il ne s’agit pas seulement de traiter les données plus rapidement, mais aussi de les exploiter d’une manière qui redéfinit notre compréhension de ce que sont les données et de ce que l’on peut en faire.
La nature, le monde qui nous entoure, l’univers et les forces physiques qui rendent tout cela possible ne sont pas fondamentalement numériques. Pour se rapprocher de la compréhension, de la modélisation et de la prévision de leur vaste complexité chaotique, l’informatique binaire « classique » ne suffira donc jamais.
C’est là qu’intervient l’informatique quantique et son étonnante capacité à exploiter d’étranges propriétés quantiques, telles que l’effet tunnel et la superposition, afin de résoudre certains problèmes complexes en quelques secondes plutôt qu’en plusieurs dizaines d’années.
Par exemple, les ordinateurs classiques sont limités, en raison de leur architecture électronique « classique », au stockage et au traitement de données en « bits » d’un ou zéro. Cela s’explique par le fait que, fondamentalement, leur architecture consiste simplement en un très grand nombre d’interrupteurs marche/arrêt.
Un ordinateur quantique, en revanche, stocke et traite les données sous forme de « qubits » : des bits quantiques qui peuvent, de manière quelque peu déconcertante, exister dans les deux états simultanément ainsi que dans un nombre infini de points situés entre les deux.
L’informatique quantique est déjà appliquée à la recherche pharmaceutique et chimique, aux sciences des matériaux, à la logistique, à la finance, à la cryptographie et à la cybersécurité. Contrairement au passage des valves à vide aux transistors, les ordinateurs quantiques ne remplaceront pas immédiatement les ordinateurs « classiques » actuels. Ils seront réservés à des applications spécialisées et de niche que les ordinateurs classiques ne seraient pas en mesure de traiter ou dont la réalisation prendrait une éternité.
Le marché mondial des services d’informatique quantique devrait atteindre 15 milliards de dollars d’ici 2030, à mesure que les premiers utilisateurs se lanceront dans l’aventure. Ce montant proviendra du matériel, des outils, des applications et des services quantiques en nuage. Si vous vous demandez quel sera l’impact de l’informatique quantique sur votre secteur, votre entreprise ou votre profession, voici les principaux acteurs que vous devez suivre :
IBM
IBM a été l’un des pionniers des ordinateurs à valves à vide et à transistors, il n’est donc pas surprenant que l’entreprise soit également une pionnière de l’informatique quantique. Elle a mis au point certains des premiers qubits supraconducteurs et a été la première à proposer un service quantique en nuage. L’année dernière, elle a lancé la puce Condor, qui est actuellement l’un des processeurs quantiques les plus puissants disponibles, avec plus de 1 000 qubits.
Google Quantum AI
La branche d’Alphabet chargée du développement et de la commercialisation de l’intelligence quantique s’est distinguée par des percées, notamment en revendiquant le premier moment de « suprématie quantique ». Cela s’est produit en 2010 lorsque son système Sycamore de 53 qubits a résolu un problème que l’on pensait impossible avec une architecture informatique classique.
Cette affirmation a toutefois été invalidée rétroactivement quelques années plus tard, lorsqu’une équipe de l’Université des sciences et technologies de Chine a démontré qu’il était possible de le faire. En 2024, Google a de nouveau affirmé avoir atteint la suprématie quantique avec un Sycamore actualisé de 67 qubits.
Les dernières puces quantiques Willow de Google possèdent 105 qubits, mais surtout une correction d’erreur nettement améliorée. Cela pourrait permettre de résoudre les problèmes d’instabilité qui ont jusqu’à présent limité le potentiel de l’informatique quantique pour certaines applications.
Microsoft Azure Quantum
Microsoft construit ses derniers processeurs quantiques, connus sous le nom de Majorana 1, autour d’une méthode d’informatique quantique connue sous le nom de qubits topologiques. Il s’agit d’un autre moyen d’améliorer (théoriquement) la stabilité et de rendre l’informatique quantique accessible à un plus grand nombre de tâches. Du point de vue de l’utilité, sa stratégie, similaire à celle de Google, consiste à fournir aux entreprises et aux organismes de recherche une série d’outils quantiques en nuage grâce à sa plateforme Azure.
Université des sciences et technologies de Chine
Centre de recherche technologique chinois de premier plan, les chercheurs de l’USTC sont à l’origine de certaines des percées les plus importantes réalisées à ce jour en matière d’informatique quantique. En particulier, en 2023, l’ordinateur quantique Zuchongzhi-2 a réalisé la tâche de « suprématie quantique » démontrée par Sycamore de Google en 2019 en seulement 20 secondes, contre 200 secondes pour Sycamore.
Son successeur, Xuchongzhi-3, vient d’être dévoilé et, avec 105 qubits, il serait l’un des ordinateurs quantiques les plus rapides construits à ce jour.
D-Wave
D-Wave, qui était à l’origine une entreprise de recherche canadienne, a été l’un des premiers groupes à tirer parti des implications commerciales de l’informatique quantique. L’entreprise a lancé le premier ordinateur quantique commercialisé, le D-Wave One, en 2011.
L’approche de D-Wave en matière de construction de machines quantiques est légèrement différente : l’entreprise se concentre sur une technologie appelée recuit quantique, très efficace pour résoudre les problèmes d’optimisation. Cela est particulièrement important pour les entreprises, car ces solutions (trouver les itinéraires les plus efficaces pour les chauffeurs qui effectuent des livraisons multiples ou la combinaison la plus efficace d’ingrédients pour fabriquer des médicaments, par exemple) peuvent débloquer d’importants gains d’efficacité.
Intel
La société Intel est connue pour ses puces, en particulier ses puces de processeur. Comme pour d’autres entreprises technologiques, l’évolution vers l’informatique quantique était une étape naturelle. À l’instar de Microsoft, Google et IBM, son implication démontre l’importance que les grandes entreprises technologiques accordent à l’informatique quantique pour l’avenir.
La technologie quantique d’Intel est centrée sur son processeur Tunnel Falls, qui utilise des qubits à spin en silicium. Ceux-ci sont construits sur une infrastructure de semi-conducteurs classique, qui est encore beaucoup plus évolutive et rentable que d’autres technologies quantiques plus complexes à l’heure actuelle.
Quantinuum
La société Quantinuum est née de la fusion de la division de recherche en informatique quantique d’Honeywell et de la start-up Cambridge Quantum, soutenue par l’université de Cambridge. Bien qu’elle ait mis au point que certains des ordinateurs quantiques les plus avancés, comme le premier processeur quantique à ions piégés de 56 qubits en 2024, elle a également développé certains des ensembles et des plateformes les plus aboutis pour les entreprises. Elle propose des solutions matérielles et logicielles combinées et s’attache à faciliter le passage de l’informatique quantique du laboratoire de recherche à l’industrie.
Rigetti Computing
Rigetti se concentre sur la fourniture de systèmes hybrides classiques/quantiques prêts à l’emploi, que les clients peuvent commencer à utiliser dès aujourd’hui, plutôt que sur la réalisation d’objectifs théoriques tels que la suprématie quantique. L’entreprise adopte la même approche conventionnelle de l’ingénierie informatique quantique, basée sur les qubits supraconducteurs, que les grands acteurs tels qu’IBM et Google.
En effet, sa stratégie consiste à réduire le temps nécessaire à ses clients pour commencer à tirer parti de leur investissement dans l’informatique quantique. Elle a proposé l’une des premières offres de services quantiques en nuage et compte parmi ses clients des entreprises, des agences gouvernementales et des organismes de recherche.
China Telecom Quantum Group
Un autre leader chinois, CTQG, a développé un ordinateur quantique de 504 qubits appelé Tianyan-504. En termes de qubits, il s’agit de l’ordinateur quantique le plus grand et le plus puissant que la Chine ait produit jusqu’à présent. Développé en partenariat avec l’Académie chinoise des sciences, il sera intégré à la plateforme quantique en nuage de Tianyan afin de fournir à ses clients un service quantique en tant que tel.
CTQG a également acquis QuantumCTek, un pionnier chinois de l’informatique quantique qui s’est distingué par ses travaux dans le domaine des communications et de la sécurité quantiques, et a développé des services commerciaux autour de ces capacités.
IonQ
IonQ est une autre entreprise quantique qui a connu un grand succès sur le marché émergent des services quantiques. Elle est à l’origine d’une technologie d’informatique quantique connue sous le nom d’ion piégé, qui utilise des atomes super stables suspendus dans des champs électromagnétiques en tant que qubits. Comme ils sont isolés des autres atomes, ils restent cohérents plus longtemps, ce qui réduit le nombre d’erreurs.
Cette technologie est donc particulièrement adaptée aux simulations de haute précision nécessaires à de nombreuses tâches compatibles avec l’informatique quantique, telles que la modélisation financière et la découverte de médicaments.
Êtes-vous prêt pour le quantique ?
Tout le monde n’a pas besoin d’utiliser les ordinateurs quantiques tout de suite. Leur puissance énorme et leur coût relativement élevé signifient que les ordinateurs classiques seront encore suffisants pour de nombreuses tâches informatiques quotidiennes dans un avenir prévisible.
Cependant, les entreprises, les industries et les professionnels travaillant dans des domaines où l’informatique quantique fera la différence ne peuvent pas se permettre de négliger cette opportunité.
Il est essentiel de se tenir au courant de l’évolution de la situation, y compris des dernières mesures prises par les acteurs clés mentionnés ici, si l’on ne veut pas rester à la traîne.
Une contribution de Bernard Marr pour Forbes US, traduite par Flora Lucas
À lire également : L’urgence de la préparation à l’ère quantique : les entreprises sont-elles prêtes ?
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