Rechercher

Le Numérique A Besoin D’Un Régulateur Mondial Et Pourquoi L’UE Pourrait Tenir Ce Rôle

numérique
Source : Getty

On l’entend souvent : les données seraient le pétrole du XXIe siècle. Bien que frappante, la comparaison est fausse. Le pétrole est disponible en quantité limitée, alors que les données sont créées en continu par les utilisateurs, les ressources augmentant même de manière exponentielle au fur et à mesure que l’économie numérique se généralise. Ce changement de paradigme modifie drastiquement nos processus de création de valeur tels qu’ils existent depuis l’ère industrielle.

 

Afin de prospérer, les entreprises doivent repenser la production et la distribution de valeur au sein de ce nouveau cadre. Elles ont besoin, pour ce faire, que des normes techniques unifiées et qu’une gouvernance des données soit mise en place à l’échelle internationale. L’Union Européenne dispose à la fois de la volonté et de la capacité nécessaires pour établir ces régulations.

En 2012, la professeure américaine Anu Bradford de la faculté de droit de Columbia théorisait l’« effet Bruxelles » en référence à la capacité de l’Union Européenne d’exporter ses réglementations en dehors de ses frontières pour qu’elles soient adoptées à un niveau mondial. Les groupes internationaux estiment en effet qu’il est souvent économiquement, juridiquement ou techniquement plus pratique d’adopter les règles de l’Union au-delà de celle-ci, à cause de ses compétences réglementaires reconnue et de la taille de son marché commun, le premier dans le monde.

Aujourd’hui, la régulation sur le numérique affiche un retard par rapport au développement technologique. Si certaine région du monde ont négligé cet enjeu, l’UE fait au contraire figure de pionnier dans ce domaine. Ainsi, le Règlement général sur la protection des données (RGPD), appliqué dans l’ensemble des 27 Etats membres depuis le 25 mai 2018, constitue une avancée majeure dans la protection des données personnelles. Il permet non seulement l’autodétermination en matière d’information pour l’utilisateur, mais fournit également des recours à ce dernier en cas de violation de sa vie privée. Conçu initialement comme un cadre législatif commun à toute l’UE, les exigences du RGPD ont d’ores et déjà étaient intégrées dans les procédures mondiales de nombreuses multinationales non européennes. Avec le temps, le RGPD pourrait s’imposer comme le premier exemple d’un « effet Bruxelles » appliqué au numérique.

Depuis le début de la Révolution industrielle, l’Europe est la région du monde qui a le plus contribué au développement du cadre juridique mondial. Les normes industrielles établies par l’UE ont influencé les chaînes de production au travers le monde ainsi que les grandes règles du commerce international. C’est le règlement REACH de l’UE sur les produits chimiques qui encadre l’exécution des produits de la société américaine Dow Chemical, de la même manière que ce sont les normes de l’UE pour les produits laitiers qui guident la façon dont les usines laitières chinoises installent leurs équipements. In fine, ces réglementations, parce qu’elles sont strictes et uniformes, permettent d’améliorer la qualité des produits et des services à un niveau global.

Alors que nous traversons une zone pleine d’incertitudes, les entreprises mondialisées ont besoin, pour s’épanouir à l’ère du numérique, de la stabilité d’un système normatif universel qui préciserait la gouvernance des données et, à terme, de normes encadrant la digitalisation grandissante de la société. De par la puissance de l’« effet Bruxelles », l’Union Européenne est bien positionnée pour s’imposer comme le premier régulateur technologique du monde, autant que comme principal responsable d’une économie numérique multilatérale. D’autant qu’un marché mondial régi par des normes européennes profiterait sans aucun doute aux entreprises du Vieux Continent et favoriserait leur expansion internationale. Plus largement, ce sont les entreprises, dans leur ensemble qui pourraient tirer parti d’un tel leadership.

Tribune écrite par Catherine Chen, administratrice de Huawei Technologies

 

<<< A lire également : Les Démarches Administratives Du Quotidien Bientôt Disponibles En Numérique >>>

Vous avez aimé cet article ? Likez Forbes sur Facebook

Newsletter quotidienne Forbes

Recevez chaque matin l’essentiel de l’actualité business et entrepreneuriat.

Abonnez-vous au magazine papier

et découvrez chaque trimestre :

1 an, 4 numéros : 30 € TTC au lieu de 36 € TTC