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IA : les dernières tendances qui révolutionnent l’industrie alimentaire

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IA : les dernières tendances qui révolutionnent l’industrie alimentaire. Getty Images

Les tendances d’IA révolutionnent l’industrie alimentaire, de la production à la sécurité alimentaire, en passant par les régimes personnalisés et des chaînes d’approvisionnement mieux pensées. Alors que les entreprises s’attaquent au gaspillage alimentaire, aux problèmes de sécurité, à la pénurie de main-d’œuvre et à l’évolution des exigences des consommateurs, le marché des technologies alimentaires pilotées par l’IA devrait atteindre 27,73 milliards de dollars d’ici à 2029.

 

Cette montée en puissance est alimentée par la pression en faveur d’une nutrition sur mesure, de normes de sécurité plus strictes, de l’optimisation de la chaîne d’approvisionnement et de la durabilité, marquant ainsi une nouvelle ère dans la manière dont nous nourrissons le monde.

Qu’il s’agisse d’outils d’innovation alimentaire tels que KLEVER AI, Ai Palette et TasteGPT, ou d’outils de recherche tels que Gemini AI de Google, qui aide les utilisateurs à découvrir de nouveaux restaurants, « l’intelligence artificielle est en train de révolutionner l’écosystème alimentaire mondial, opérant en coulisses d’une manière rarement remarquée par les consommateurs », déclare Tamsin Deasey Weinstein, conseillère stratégique spécialisée dans l’application de l’intelligence artificielle à travers les secteurs et les marchés.

Grâce à la plateforme SNAQ, qui utilise l’IA pour prédire la glycémie et permettre aux utilisateurs d’anticiper leur réponse glycémique avant même de manger, et à Spore.Bio, capable de détecter les concentrations bactériennes dans les aliments et boissons en quelques secondes, l’essor de l’IA dans l’industrie agroalimentaire n’a rien de surprenant. Avec un taux de croissance annuel de 34,5 % jusqu’en 2034, les technologies alimentaires qui s’appuient sur l’IA surpassent le marché global de l’IA et transforment notre manière de nous alimenter. Sid Mehta, professeur adjoint à l’Université de Colombie-Britannique et PDG de Greenworks, affirme que « le rôle de l’IA dans l’amélioration de l’efficacité, de la durabilité et de l’innovation dans le secteur alimentaire ne fera que croître ».

Cette transformation dépasse le cadre des restaurants et de la santé des consommateurs : les grands industriels de l’agroalimentaire intègrent également l’IA pour optimiser leurs opérations. Danone, par exemple, collabore avec Microsoft pour améliorer sa logistique et rationaliser sa production, tandis que des outils destinés aux consommateurs, comme Spoon Guru, les aident à mieux répondre à leurs besoins nutritionnels. M. Mehta souligne le rôle clé du Réseau canadien d’innovation en alimentation (RCIA) dans l’adoption de l’IA à l’échelle du secteur, qu’il s’agisse d’améliorer la sécurité alimentaire, l’efficacité de la chaîne d’approvisionnement ou encore d’optimiser les stratégies de tarification. Parallèlement, des start-ups comme Stocky AI révolutionnent la gestion des stocks et contribuent à réduire le gaspillage alimentaire, illustrant ainsi l’impact croissant de l’IA sur l’ensemble de l’écosystème agroalimentaire.

Voici quelques-unes des principales tendances de l’IA dans l’industrie alimentaire (hors agriculture).

Les avancées de l’IA dans la préparation des aliments

Confrontés à une pénurie de main-d’œuvre et à un fort taux de rotation, les restaurants misent de plus en plus sur l’automatisation par l’IA pour gagner en efficacité et répondre aux attentes des consommateurs en matière de praticité. Désormais, des chefs robotisés pilotés par l’IA peuvent doser les ingrédients, accélérer la cuisson et garantir la sécurité alimentaire sans intervention humaine. Au laboratoire de robotique JSK de l’université de Tokyo, des chercheurs ont mis au point un système capable de faire frire un œuf en suivant une recette, tandis que l’Alpha Grill d’Aniai, récompensé par le prix de l’innovation en cuisine 2023, cuit huit steaks hachés en moins d’une minute grâce à un gril double face et un système d’autonettoyage intégré. L’IA s’invite aussi dans les cuisines domestiques, avec des innovations comme le chef automatisé de Moley Robotics et des applications intelligentes qui analysent les courses pour fournir des conseils nutritionnels personnalisés. Des recettes générées par ChatGPT aux systèmes de cuisson robotisés de pointe, l’IA transforme la préparation des repas en la rendant plus rapide, plus sûre et plus intuitive.

 

L’IA au service de la distribution alimentaire

Face à la hausse des coûts alimentaires liée aux nouveaux tarifs douaniers et aux pénuries persistantes de main-d’œuvre, les distributeurs cherchent à réduire leurs dépenses tout en améliorant leur efficacité. La start-up Choco, spécialisée dans l’optimisation de la chaîne d’approvisionnement alimentaire, a développé Autopilote, un outil d’IA conçu pour automatiser le traitement des commandes. Autopilote analyse les commandes entrantes, vérifie leur exactitude, les traite instantanément ou les signale pour examen, éliminant ainsi la saisie manuelle et permettant aux employés de se concentrer sur d’autres tâches. Depuis le lancement de Choco en 2023, l’entreprise s’efforce de fluidifier la gestion des commandes via les boîtes vocales, les SMS, WhatsApp et les e-mails, apportant une nouvelle dimension à l’automatisation du secteur.

« Autopilote est le premier agent IA dédié à la distribution alimentaire », affirme Dan Khachab, PDG et cofondateur de Choco. « Il prend des décisions autonomes, traite les commandes en temps réel et offre aux distributeurs un contrôle total. Les agents IA vont transformer en profondeur le secteur de la distribution alimentaire, et Autopilote marque le début de cette révolution. »

 

L’IA, un levier pour une alimentation plus saine

L’intelligence artificielle révolutionne la nutrition en rendant les régimes sains plus accessibles et durables. Des outils comme Fuddle, un assistant culinaire et planificateur de repas basé sur l’IA, aident les utilisateurs à créer des recettes personnalisées en fonction de leurs besoins alimentaires, allergies et des ingrédients disponibles. De son côté, RxDiet, une application de nutrition sur mesure, élabore des plans alimentaires adaptés et fournit des ingrédients frais. Autre innovation, la cuillère à sel électronique de Kirin utilise un faible courant électrique pour intensifier la perception du goût salé, offrant une alternative aux régimes riches en sodium.

L’IA joue également un rôle clé dans l’innovation alimentaire en permettant aux producteurs de recréer des aliments traditionnels avec des ingrédients plus sains et durables. « L’IA nous permet d’analyser les aliments au niveau moléculaire, puis de les reconstituer avec des alternatives plus saines, accessibles et respectueuses de l’environnement », explique Tamsin Deasey Weinstein. Le fromage, par exemple, fait partie des produits transformés grâce à cette approche. « Nous voulons profiter du fromage en grande quantité, sans excès de calories ni produits laitiers pour ceux qui ne peuvent ou ne veulent pas en consommer. »

Grâce à des algorithmes capables d’identifier les molécules clés du goût, de la texture et du processus de fonte, les producteurs peuvent recréer des versions végétales ou cultivées en laboratoire pratiquement indiscernables des originaux. Ces innovations permettent non seulement d’éliminer les allergènes et de réduire l’impact environnemental, mais aussi d’améliorer les profils nutritionnels sans compromettre la saveur. NotCo, en Amérique latine, et Climax Foods, en Amérique du Nord, comptent parmi les entreprises pionnières qui utilisent l’IA pour développer des alternatives végétales aux produits laitiers et carnés, reproduisant fidèlement leur goût et leur texture.

 

L’IA au cœur du contrôle de la qualité et de la sécurité alimentaire

L’intelligence artificielle révolutionne l’inspection et l’assurance qualité des aliments en améliorant la détection des contaminations, en garantissant une production homogène et en optimisant les prévisions de durée de conservation et les contrôles de conformité. L’objectif : renforcer la sécurité alimentaire et la santé publique.

Des entreprises comme Nestlé intègrent des systèmes d’inspection visuelle basés sur l’IA pour affiner leur contrôle qualité, tandis que Danone collabore avec Sight Machine pour une surveillance en temps réel dans ses usines laitières. L’Agence britannique de sécurité sanitaire (UKHSA) explore également le potentiel de l’IA pour détecter les épidémies d’origine alimentaire en analysant les avis en ligne, identifiant ainsi des mentions de symptômes comme les vomissements ou la diarrhée et des aliments suspects. Une récente étude de l’UKHSA a évalué divers modèles d’IA pour repérer et classer efficacement ces informations au sein de milliers de commentaires.

Par ailleurs, des acteurs majeurs comme Coca-Cola, via son investissement dans la start-up Agnext, renforcent les contrôles de qualité des boissons, tandis qu’Unilever, avec l’acquisition de Carver Korea, fait progresser l’IA dans la production d’aliments cosmétiques. Ces avancées illustrent le rôle croissant de l’IA dans la fiabilisation de l’industrie alimentaire.

 

L’IA transforme la restauration rapide

L’intelligence artificielle révolutionne le secteur de la restauration rapide en améliorant l’efficacité et en redéfinissant l’expérience client. Ces dernières années, les kiosques interactifs, les menus numériques, l’automatisation des commandes au drive et les innovations en matière de livraison se sont généralisés, portés par les investissements des grandes chaînes dans les technologies de nouvelle génération.

Wendy’s prévoit d’équiper 600 restaurants de son système de commande vocale FreshAI d’ici 2025 pour fluidifier le service au drive. De son côté, Yum! Brands, maison mère de KFC, Pizza Hut et Taco Bell, a lancé « Byte by Yum! », une suite logicielle exploitant l’IA pour optimiser les commandes en ligne, la gestion des cuisines et la logistique de livraison. McDonald’s, quant à lui, intègre l’IA dans ses 43 000 établissements à travers des drives intelligents, des outils de précision des commandes et des systèmes de cuisine connectés afin d’accélérer et d’améliorer le service.

L’IA joue également un rôle clé dans la livraison. Uber Eats l’utilise pour optimiser les itinéraires, prédire les délais et personnaliser les suggestions. À Los Angeles, les robots autonomes de Serve Robotics effectuent désormais des livraisons pour la plateforme, illustrant l’essor de l’automatisation dans le secteur.

Au-delà de la restauration rapide, la robotique pilotée par l’IA transforme également les services de café et les distributeurs automatiques de repas. À Beyrouth, Second Cup Coffee déploie Mozo, un robot barista conçu pour garantir un service rapide et homogène tout en optimisant l’efficacité des cafés. Parallèlement, la Chulchul Box, un distributeur automatique intelligent, prépare et sert des plats gastronomiques chauds en seulement 90 secondes, offrant une alternative alliant rapidité et qualité à la restauration urbaine.

 

L’IA au service d’une alimentation plus durable

À l’échelle mondiale, l’intelligence artificielle joue un rôle clé dans la réduction de l’impact environnemental de l’industrie alimentaire en limitant le gaspillage et en optimisant les chaînes d’approvisionnement. La start-up espagnole MOA Foodtech exploite la fermentation assistée par IA pour transformer les déchets en aliments fonctionnels, tandis que Tomorrow, basée à Seattle, révolutionne la conservation des aliments grâce à l’IA, prolongeant ainsi leur durée de vie. De grands distributeurs, comme Coop et Carrefour, utilisent les outils IA de Google pour mieux anticiper la demande et limiter le gaspillage, tandis qu’Unilever mise sur la plateforme Tracemark pour accroître la transparence de sa chaîne d’approvisionnement et lutter contre la déforestation.

L’essor de l’IA dans la durabilité alimentaire attire également les investisseurs. À Londres, l’accélérateur Sustain.AI, lancé par le cabinet Bright Tide, favorise la collaboration entre start-ups et grandes entreprises du secteur, tandis qu’EIT Food, une initiative européenne dédiée à l’innovation alimentaire durable, soutient des solutions IA prometteuses.

« L’EIT Food accompagne plusieurs start-ups qui exploitent l’IA pour relever des défis liés à l’environnement, à la santé et à la sécurité alimentaire », explique Marie Russier, responsable des programmes d’entrepreneuriat à l’EIT Food. « Aux Pays-Bas, par exemple, la start-up OneThird a mis au point des scanners infrarouges pilotés par IA capables d’évaluer avec précision la durée de conservation des fruits et légumes. Elle vise à éviter 150 millions de kilos de gaspillage alimentaire d’ici 2027, tout en permettant aux producteurs et aux détaillants d’économiser des millions d’euros. En soutenant l’essor de ces innovations et en favorisant leur adoption par les acteurs de la chaîne alimentaire, nous avons l’opportunité d’accélérer la transition vers un système plus durable, plus sain et plus résilient. »

 

L’IA révolutionne la lutte contre la malnutrition et la faim

« L’intelligence artificielle s’impose comme un outil clé pour lutter contre la malnutrition et l’insécurité alimentaire », affirme Lawrence Haddad, directeur exécutif de l’Alliance Mondiale pour l’Amélioration de la Nutrition (GAIN). Cette ONG suisse s’efforce d’améliorer l’accès à une alimentation plus saine, en particulier pour les populations vulnérables. Selon lui, l’IA peut accélérer la recherche de variétés alimentaires plus nutritives et résistantes, optimiser les politiques publiques grâce à une meilleure visualisation des données et fournir des informations en temps réel sur les habitudes alimentaires et l’efficacité des programmes de nutrition.

Les agences des Nations unies exploitent également l’IA pour combattre la faim. Le Programme alimentaire mondial (PAM) s’appuie sur HungerMap LIVE, un outil de big data et d’analyse prédictive qui surveille la sécurité alimentaire en temps quasi réel. De son côté, GeoTar, actuellement déployé en Afghanistan, au Tchad et au Bangladesh, utilise les données satellitaires et les drones pour améliorer le ciblage de l’aide alimentaire. Pour aller plus loin, l’initiative AI Sandbox du PAM encourage l’innovation et la collaboration, offrant aux experts un cadre pour concevoir et déployer des solutions IA adaptées aux défis de la sécurité alimentaire.

 

Risques et défis

Si l’IA promet de transformer l’industrie alimentaire, son adoption exige une vigilance constante pour concilier innovation, précision, éthique et confiance des consommateurs. L’automatisation des opérations en restauration rapide a déjà montré ses limites : McDonald’s a suspendu son expérimentation de drives pilotés par l’IA après des erreurs récurrentes dans les commandes, illustrant ainsi la nécessité d’affiner ces technologies et de garantir leur acceptabilité auprès du public.

Dans le domaine de la nutrition, l’IA représente à la fois une opportunité et un risque. Lawrence Haddad met en garde contre sa dépendance aux données issues d’Internet, qui pourrait véhiculer de la désinformation, renforcer de mauvaises habitudes alimentaires et donner du poids à des sources non qualifiées. « Le potentiel de nuisance est énorme », avertit-il, insistant sur l’importance d’une coopération étroite entre experts en nutrition et spécialistes de l’IA pour limiter ces dangers. Il souligne également les limites de l’automatisation : « On peut apprendre à un robot à plier du linge, mais il ne pourra jamais reproduire le lien humain qui se tisse lors de l’allaitement par exemple. » Selon lui, sans un engagement fort des nutritionnistes dans le développement de ces outils, « la nutrition risque d’être laissée pour compte ».

Au-delà des enjeux de précision et de confiance, l’IA soulève des questions plus profondes sur la gouvernance des données alimentaires. Des recherches indiquent que les politiques alimentaires basées sur les données privilégient souvent la productivité au détriment de l’équité, favorisant ainsi un modèle axé sur les grandes entreprises au lieu de soutenir des solutions communautaires plus inclusives. Pour éviter d’accentuer ces déséquilibres, il est crucial de veiller à ce que l’IA serve des objectifs sociétaux plus larges, en intégrant des approches équitables et durables dans la transformation du système alimentaire.

 

L’avenir

L’IA redéfinit en profondeur la production, la consommation et l’expérience alimentaire, ouvrant la voie à une nutrition de précision qui adapte les régimes aux besoins individuels. Son impact ne cesse d’évoluer, façonnant un futur où l’alimentation s’intègre davantage à la santé et à la médecine.

Selon Tamsin Deasey Weinstein, cette convergence va s’accentuer, modifiant en profondeur l’écosystème alimentaire et notre perception de la nutrition. « D’ici sept à dix ans, une grande partie de la population suivra un régime alimentaire conçu sur mesure en fonction de son profil biologique », anticipe-t-elle. Des entreprises comme January AI exploitent déjà les données de santé personnelles pour prédire l’effet des aliments sur la glycémie, sans recourir à des tests invasifs. Avec les progrès de l’IA, l’alimentation ne sera plus standardisée, mais personnalisée.

Cette transformation annonce un basculement d’une production de masse vers une approche où la nourriture devient un levier d’optimisation de la santé et de la longévité. Plus qu’une simple amélioration des processus, l’IA révolutionne non seulement ce que nous mangeons et comment nous le produisons, mais aussi la place de l’alimentation dans notre bien-être global et son impact sur la planète.

 

Une contribution de Daphne Ewing-Chow pour Forbes US – traduit par Lisa Deleforterie


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