Publicis Sapient, cabinet de conseil en transformation digitale, a organisé le 29 février dernier un nouveau rendez-vous dans le cadre de son club Digital. For Good, un espace d’échanges autour des sujets de sobriété numérique et de digital à impact. Au programme cette fois-ci : une table-ronde sur la data au service de la réduction de l’impact environnemental de l’industrie en présence de Saint-Gobain et Schneider Electric.
« Notre mission reste d’aligner l’aspirationnel au réel, de mesurer efficacement l’impact et enfin de généraliser la durabilité dans le monde économique et industriel », introduit Clémence Knaébel, Directrice conseil innovation et développement durable chez Publicis Sapient. Cette dernière en profite pour rappeler l’historique de Publicis, groupe mondial créé à Boston dans les années 1990 et qui a racheté les années suivantes une vingtaine d’entreprises spécialisées dans le logiciel et l’analyse de données.
Cette nouvelle table-ronde se concentre sur l’industrie et deux figures du secteur ont été conviées pour l’occasion : Saint-Gobain d’une part, représentée par son Chief Data Officer Benoît Lepetit et Schneider Electric d’autre part, avec la présence de Thibaut Grégoire, Directeur stratégie et transformation pour le marché résidentiel. Au programme donc, le témoignage de deux figures industrielles historiques : l’une fondée en 1665 avec la création par Louis XIV de la Manufacture des Glaces de miroirs (Saint-Gobain), et l’autre en 1836 dans le secteur de l’acier (Schneider Electric).
Avec la forte conviction que l’industrie du futur sera placée sous le signe de la « Goodtech », il est question d’explorer les efforts possibles pour mieux connaître l’empreinte environnementale du digital et les solutions pour limiter les effets rebonds. Et pour cela, Clémence Knaébel présente en préambule un tableau permettant de décortiquer ces impacts à travers les différents scopes et ainsi délivrer une vision globale sur toute la chaîne, de la production de la matière à son acheminement en passant par sa transformation et l’électricité utilisée durant toutes ces étapes.
Mesurer pour mieux réduire
« Nous avions déjà formalisé de premiers indicateurs dans les années 1990 afin de mesurer et de réduire la consommation électrique de nos clients », amorce Thibaut Grégoire. Cela a donné lieu à la naissance d’un baromètre dès 2005 pour couvrir tous les aspects de la durabilité. Une sorte de tableau de bord de la performance extra-financière qui sert à la fois d’outil de communication et de mobilisation. La mesure de l’empreinte carbone du groupe a donc été initiée dès 2006 et lui aurait permis de diminuer drastiquement son empreinte carbone.
Chez Saint-Gobain, une équipe data est spécialement dédiée à la sustainability et l’optimisation des processus. « Pour mesurer, nous avons besoin de connaître et donc accéder à la gouvernance des assets, détaille Benoît Lepetit. Notre solution consiste à simuler l’impact et piloter la donnée pour atteindre nos objectifs de réduction de notre empreinte environnementale ». Et cet objectif reste pour le moins ambitieux : d’ici 2025, le groupe vise une réduction d’impact de 90 % sur tous les scopes – dont 10 % serait attribué à sa capacité de captation et de traitement des émissions diffuses. Concrètement, il s’agit de faire en sorte que les algorithmes déployés permettent par exemple d’adapter la température des sites industriels sans avoir besoin d’un opérateur qui se chargerait de le faire manuellement.
Quand Benoît Bazin est devenu CEO de Saint-Gobain en 2011, il a dans la foulée lancé le plan « Grow and Impact » pour allier croissance et durabilité, et contribuer à la réduction des émissions carbone du secteur de la construction. « Les solutions durables représentent 72 % des ventes du Groupe et ont permis en un an d’éviter environ 1 300 millions de tonnes d’émissions de CO2 sur leur durée de vie », fait valoir Benoît Lepetit. Et encore une fois, ce dernier assure que rien de tout cela n’aurait pu être achevé sans l’appui de la data et des solutions d’IA.
En 2020, Saint-Gobain s’est dotée d’une nouvelle raison d’être baptisée « Making the World a Better Home » qui consiste à concevoir, produire et distribuer des matériaux et des solutions qui ont un impact positif sur la vie de chacune et de chacun, tout en prenant soin de la planète.
Produire de la donnée et pouvoir la délivrer
Cette feuille de route inclut tous les pays dans lesquels Saint-Gobain est présent, avec en ligne de mire une réduction de 33% des émissions de CO2 sur les Scopes 1 et 2, et de 16 % sur le scope 3, d’ici 2030. Des objectifs validés par l’organisation Science-Based Targets Initiative (SBTi). « Notre Capex permet d’investir intelligemment et cibler la réduction carbone de nos différents business units », explique Benoît Lepetit, tout en rappelant que l’écosystème continue de s’étendre avec notamment le rachat récent de Saint-Gobain de son homologue australien CSR Limited pour 2,7 milliards d’euros.
Schneider Electric fait aussi face à ce même problème de fragmentation et d’effets d’échelle. Pour le monde du résidentiel par exemple, l’enjeu est de savoir comment aider au diagnostic de performance énergétique (DPE) grâce à la data et à la simulation de modèles de consommation de référence appelés « baseline ». « Car ce n’est pas tout de produire de la donnée environnementale, il faut aussi pouvoir la délivrer et l’exposer, justifie Thibaut Grégoire. Aujourd’hui, nous ne pouvons plus lancer un nouveau produit sans cette data ».
Dans la même lignée, Schneider Electric a officialisé en avril 2023 le lancement de Zeigo, un écosystème logiciel de développement durable conçu pour simplifier et accélérer l’action climatique pour les entreprises de petites tailles. Dans la même lignée et pour aller plus loin dans la granularité, un Dashboard a aussi été déployé dès 2020 pour accéder aux données ESG de ses parties prenantes et de filtrer toutes les solutions proposées dans son écosystème par type de produit, par fournisseur mais aussi en fonction de leur impact.
La stratégie se joue donc sur la partie software mais également en matière de hardware. « Notre Scope 3 ne cesse jamais de changer car, comme la data, notre portefeuille de produits évolue constamment », décrit Thibaut Grégoire. Ce dernier fait valoir également plusieurs expérimentations en termes de sourcing de matières recyclées comme les filets de pêche, des pneus en fin de vie, de la canne à sucre et « tous les matériaux post-industriels possibles ». « C’est important d’aller au-delà de simplement montrer de la data sur de belles slides », conclut-il.
Faire de la durabilité un enjeu collectif
« Nous avons aussi mis en place un bonus annuel pour nos employés, non pas uniquement en fonction de la performance financière du groupe, mais aussi en lien avec la progression de nos enjeux de développement durable comme la diminution de notre consommation d’eau ou de déchets par exemple », complète-t-il. L’été dernier, Schneider Electric a également lancé la « Sustainability School » qui a permis de former plus de 100 000 employés aux enjeux durables, « pour que toute l’organisation partage un langage commun sur la question ». Une initiative rendue désormais accessible à tous les clients partenaires du groupe.
Du côté de Saint-Gobain, le choix a été fait de déployer massivement les ateliers durables de La Fresque du Climat avec pour objectif de sensibiliser 80 % des collaborateurs aux enjeux climatiques d’ici 2025, soit 132 000 personnes. « Plusieurs solutions de mesure de l’impact carbone ont également été développées en interne », ajoute Benoît Lepetit.
Saint-Gobain entre dès lors dans une phase d’uniformisation des systèmes d’information déjà présents dans ses différents business units. Cela permet aussi de cibler les secteurs où l’enjeu de réduction carbone est le plus important : par exemple dans l’industrie verrière où la consommation d’énergie est assez conséquente. Mais cela vaut aussi pour les industries de la céramique, de l’abrasif ou encore des pare-brises – dont Saint-Gobain détient 50 % du marché mondial. En parallèle, il est aussi question d’un meilleur pilotage des flottes de transport pour éviter les déplacements inutiles et anticiper les stockages en fonction des délais d’attente.
Ces approches ne restent pas non plus campées sur leurs positions et s’efforcent constamment de s’adapter à l’évolution des technologies du marché. « Le plus urgent reste de créer un environnement pour que tout le monde puisse utiliser dès maintenant la data et produire en parfaite autonomie, déroule Benoît Lepetit. L’intelligence artificielle générative est par ailleurs prometteuse pour accélérer ces cas d’usage ».
L’IA est aussi au menu de Schneider Electric avec le lancement prochain de logiciels d’optimisation de l’énergie pour les maisons, qui apprendront des habitudes des occupants pour leur proposer des solutions pour baisser leur consommation. Enfin, l’IA générative permettrait aussi d’être plus proche des utilisateurs et de leur offrir une expérience toujours plus pertinente.
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