Selon une simulation utilisant l’intelligence artificielle (IA), le coronavirus pourrait contaminer jusqu’à 2,5 milliards de personnes en 45 jours, et parmi elles 52,9 millions pourraient mourir des suites de la maladie. Fort heureusement, les conditions de la maladie évoluent, et les modes de propagation et de détection sont plus précis, ce qui modifie des facteurs cruciaux que le programme ne prend pas en compte.
Cela signifie que nous sommes sans doute plus en sécurité que nous le pensons. Et le mot-clef ici, c’est sans doute.
Car rationnelle ou non, la peur du coronavirus se répand dans le monde entier. Aux États-Unis, les habitants se jettent sur les masques à gaz. Au Canada, où se trouve une grande communauté chinoise, les masques chirurgicaux se vendent comme des petits pains. United Airlines, Air France ainsi que d’autres compagnies aériennes ont annulé leurs vols vers la Chine, et un bateau de croisière transportant des milliers de passagers est en quarantaine au large de l’Italie après la découverte d’un passager contaminé (le nombre de cas sur le bateau s’élève désormais à 10).
Un nouveau site internet qui suit en temps réel la propagation du coronavirus dans le monde entier indique que le nombre de cas attestés est aujourd’hui de 31 521, avec 639 décès et 1 607 guérisons. Toutes ces discussions ont poussé James Ross, cofondateur de la start-up HedgeChatter, à construire un programme permettant d’estimer la portée mondiale totale du coronavirus.
Il explique : « J’ai commencé par la propagation jour après jour en utilisant les chiffres publiés par les autorités chinoises. J’ai ensuite pris ces données et je les ai intégrées dans une IA qui fonctionne avec un réseau neuronal récurrent, et j’ai lancé la simulation 10 millions de fois. Ce résultat correspondait aux prévisions du lendemain. Une fois ce chiffre édité, je l’ai ajouté au jeu de données, et j’ai relancé l’opération 10 millions de fois ».
Jusqu’à présent, les résultats sont parvenus à prédire les chiffres du lendemain, avec 3 % de marge d’erreur. Mais les résultats à long terme, eux, sont bien plus effrayants. Selon le programme, le coronavirus pourrait contaminer 50 000 patients et faire 1 000 morts en une semaine, puis 208 000 patients et 4 400 morts en deux semaines. Les chiffres augmentent rapidement, car chaque patient contamine des personnes de son entourage. L’IA estime donc que 2 millions de personnes pourraient mourir des suites de la maladie en 30 jours. Mais haut les cœurs, car tout n’est pas perdu.
Le programme ne connaît pas tous les facteurs du virus, et ça, James Ross le sait bien. Par ailleurs, selon de nombreux professionnels de la santé, la bonne nouvelle est que les conditions du coronavirus évoluent et que les données qui alimentent le programme devraient refléter ces changements. Ainsi, les prévisions pourront être revues à la baisse.
Parmi ces évolutions, la plus importante est sans doute le taux de mortalité. Le professeur Eyal Leshem, du Sheba Medical Center en Israël, explique : « Si une grande partie des personnes contaminées sont asymptomatiques, ou présentent des symptômes légers, ces patients peuvent ne pas être déclarés. Ainsi, le nombre réel de cas en Chine est sans doute bien plus élevé que ce que l’on pense. Cela pourrait vouloir dire que le taux de mortalité (actuellement estimé à 2 % des personnes contaminées) pourrait être beaucoup plus faible ».
En d’autres termes, un virus qui se propage plus largement ne semble pas être une bonne nouvelle à première vue, mais en réalité, cela peut faire baisser le taux de mortalité. Dès lors, le coronavirus devient moins menaçant.
Le docteur Amesh Adalja, chercheur principal au Johns Hopkins Center for Health Security (Baltimore), complète ces explications : « Le taux de mortalité baisse au fur et à mesure que nous comprenons que la majorité des cas ne sont pas graves. Une fois que des tests seront effectués sur des portions plus importantes de la population (et pas seulement sur les patients hospitalisés), nous verrons que l’ampleur de la maladie ne fait pas d’elle une pandémie grave ».
Brian Labus, professeur assistant à l’école de santé publique de l’université du Nevada à Las Vegas, compare le coronavirus à la grippe : « Le taux de mortalité constaté au début d’une épidémie est généralement gonflé, car nous examinons d’abord les personnes les plus malades. Parmi elles, beaucoup ne survivent pas, ce qui donne une image faussée. Les prévisions du programme sont irréalistes. L’an dernier, la grippe a contaminé environ 8 % de la population sur 7 à 8 mois, tandis que selon l’IA, un tiers de la population de la Terre aurait été touchée en 6 semaines ».
Tous ces facteurs ont des conséquences cruciales sur le taux d’infection et le taux de mortalité, et même de petits changements ont des répercussions énormes sur les prédictions informatiques. Le docteur Jack Regan, PDG et fondateur de LexaGene, une société qui fabrique des équipements de diagnostic automatisés, déclare : « De petits changements dans la transmissibilité, le taux de létalité, etc. peuvent avoir un impact conséquent sur le taux de mortalité à l’échelle mondiale ».
Il poursuit : « Jusqu’à présent, chaque jour qui passe ne fait qu’augmenter le nombre de cas et de décès. Puisque chaque patient semble contaminer plusieurs personnes autour de lui, le taux de propagation s’accélère, ce qui rend le virus encore plus difficile à endiguer. Il est clair que cette maladie va continuer à se propager et il y a des chances pour que nous ne parvenions pas à la maîtriser. Le coronavirus pourrait donc bien devenir une pandémie ».
En d’autres mots, malgré tous les efforts médicaux, le coronavirus risque de se propager à l’échelle mondiale. Mais grâce aux initiatives mises en place, il est peu probable qu’il soit aussi mortel que prévu.
Après tout, la grippe existe depuis toujours (et serait responsable de 50 millions de décès après la Première Guerre mondiale) et elle est toujours présente. Cette année, elle a déjà touché 19 millions de personnes, causé 180 000 hospitalisations et tué 10 000 patients… rien qu’aux États-Unis.
Quant à James Ross et son programme inquiétant ? Il ne rêve que d’une chose : s’être trompé et constater que ses prédictions n’étaient qu’un mauvais rêve. Il conclut : « Bien que l’IA et les réseaux neuronaux puissent être utilisés pour résoudre ou prédire de nombreuses choses, il y a toujours des variables supplémentaires qui permettent d’affiner les programmes. J’espère que les gouvernements comprendront qu’une action préventive aujourd’hui permettra d’économiser des coûts et des moyens plus tard ».
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