Instagram a-t-il une incidence sur les jeunes cerveaux ? À cause du développement cérébral et d’une sensibilité accrue à la dopamine (un neurotransmetteur associé à la motivation, au plaisir et à la récompense), les adolescents ont davantage tendance à rechercher les expériences leur procurant une sensation de récompense. De plus, en raison du développement inachevé de leur cortex préfrontal (la zone du cerveau associée à la compréhension, le jugement et la prise de décision), les interactions sociales influencent grandement la formation du contrôle de l’impulsivité et de l’esprit critique.
Par le passé, nous avons souvent considéré la conduite rapide ou la tentative d’adaptation pour obtenir l’approbation de ses pairs comme des comportements à risque. Mais à l’ère des smartphones, des réseaux sociaux, des followers, et des « like », les comportements adolescents orientés vers la récompense sont de plus en plus associés à l’approbation en ligne.
En 2018, Instagram comptait plus d’un milliard d’utilisateurs dans le monde, dont plus de la moitié sont des utilisateurs quotidiens. Parmi ces derniers, 60 % sont des femmes et des filles âgées de moins de 34 ans. Ce n’est pas un hasard. En fait, le logiciel a été conçu pour retenir leur attention plus longtemps et les faire revenir toujours plus. Le fil d’actualités sans fin, les tags, les notifications et les « stories » exploitent la peur de rater quelque chose (également désignée par l’acronyme anglais FOMO, Fear Of Missing Out) qui rend les adolescents si anxieux. Autrement dit, comme l’a soulevé We The Internet dans une vidéo YouTube, Instagram fonctionne avec une « addiction programmée ».
Voici donc quelques faits que vous devez savoir sur les effets que les réseaux sociaux – et Instagram en particulier – ont sur les cerveaux des jeunes femmes.
Mis en parallèle avec Twitter, Facebook ou YouTube, il apparaît qu’Instagram nous force davantage à nous comparer aux autres. En retour, cela contribue à l’augmentation de l’anxiété et de la dépression à cause d’un sentiment d’inadéquation. La recherche suggère que cela est dû à une exposition accrue à des images « idéalisées » d’autres femmes, d’autres couples, et d’autres vies en général. Cette exposition accrue est liée à une diminution de satisfaction avec sa propre vie.
Des IRM fonctionnelles ont pu montrer que le nombre de like (qui sont souvent factices, achetés ou fabriqués) sur une publication Instagram influence l’attraction du public pour cette photo. Par exemple, quand des jeunes filles voient une image avec un fort taux d’évaluations positives, leur cerveau (notamment le noyau accumbens, ou circuit de la récompense) l’associe instinctivement comme étant meilleur, et ce peu importe le contenu. Leurs cerveaux ne peuvent littéralement pas s’empêcher de préférer les images qui ont plus de like que les autres. Comme l’ont formulé des chercheurs de l’Université de Californie à Los Angeles, les adolescents réagissent à ce qu’ils considèrent des « validations » de contenu. Grâce à leur accès aux smartphones, 92 % des adolescents rapportent qu’ils se connectent à Internet tous les jours. Parmi ces derniers, 24 % admettent être en ligne « presque constamment ». Par ailleurs, selon une étude du Pew Research Center, l’usage du smartphone est sensiblement le même entre les ethnies et les cultures. Toutefois, l’étude est arrivée à la conclusion que les jeunes filles afro-américaines utilisent leurs smartphones plus souvent que leurs camarades blanches ou hispaniques (85 % comparés à 71 %). Néanmoins, tout ce temps passé en ligne modifie la façon dont les jeunes femmes regardent l’approbation sociale et ce qu’il est nécessaire de faire pour être « aimée ».
Les sites visuels comme Instagram attirent les filles plus que les garçons, qui semblent préférer les jeux vidéo aux réseaux sociaux. Mais ce décalage instaure un rapport très différent aux images. Par exemple, les filtres, le maquillage, l’éclairage, les angles et la pose sont la preuve que les images dont sont constamment abreuvées les jeunes filles ne sont pas basées sur la réalité. Mais contrairement à un jeu vidéo où l’utilisateur sait que les images qui lui sont présentées sont fausses, les publications Instagram troublent la limite entre réalité et fiction.
Les influenceuses sur Instagram peuvent être rémunérées jusqu’à 1 million de $ par publication. Et la jeune fille américaine lambda passe environ 6 à 10 heures par jour sur les réseaux sociaux, où on lui présente des produits dont l’efficacité n’a pas été prouvée ou des images qui ne sont pas réelles. Dans de nombreux cas, les adolescentes ne savent pas distinguer ce qui est faux ou ce qui consiste en de la publicité promotionnelle. Et à un si jeune âge, il est presque impossible de faire la différence. En fait, une étude de l’Université de Stanford est arrivée à la conclusion que les jeunes ne savent pas quand ils sont exposés à de fausses informations sur les plateformes de réseaux sociaux, ou comment évaluer la crédibilité d’un contenu.
Que vous soyez un parent ou une jeune personne aspirant à passer moins de temps sur votre smartphone, il y a une multitude de bonnes raisons de réduire l’utilisation des réseaux sociaux. Mais il est également important de comprendre que bon nombre des effets négatifs de l’utilisation de ces réseaux, tels que la solitude et l’anxiété, sont un résultat direct du développement cérébral. Nous vivons dans un monde nouveau, et nous apprenons tous au fur et à mesure. Il faut simplement nous efforcer d’apprendre quelles boucles de rétroaction nous fournissent des informations, ainsi que la qualité et la crédibilité de ces informations.
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