Le classement des inventeurs par leur nombre de brevets privilégie les sociétés anciennes, qui ont eu davantage de temps pour constituer leur portefeuille. Pour mettre à l’honneur les sociétés plus jeunes, le Palmarès des Jeunes Inventeurs de la French Tech dévoile les podiums par année de création de la société, de 2008 à 2016.
Withings, qui fabrique des objets connectés, montre en France la voie de la protection par brevet des innovations non technologiques (même si elles intègrent des briques technologiques). L’OCDE avait déjà prouvé 2005 le rôle prééminent de ces innovations, et réédité en conséquence son Manuel d’Oslo. En 2009, le rapport Morand-Manceau avait élargi la définition française de l’innovation à l’innovation d’usage. Il a pourtant fallu attendre 2015 pour que Bpifrance adopte cette nouvelle doctrine, et l’Institut national de la propriété industrielle (INPI), qui se présente comme « la maison des innovateurs », définit toujours aujourd’hui le brevet comme une « protection de l’innovation technique » (1). Withings, heureusement, n’a pas attendu pour protéger ses innovations non technologiques.
Kalray et Eveon sont à l’inverse des sociétés technologiques pour lesquelles le dépôt de brevet est plus classique. La première développe, sur la base d’une technologie propriétaire affinée durant dix ans, un processeur « intelligent » destiné à analyser à la volée de grand flux de données, réagir et prendre des décisions en temps réel. Les dispositifs médicaux développés par la seconde assurent un débit maîtrisé, précis et constant pour l’administration automatique et sécurisée de nouvelles thérapies fluidiques et médicaments complexes.
Sur la plus haute marche du podium 2009, Sigfox ambitionne d’être le premier réseau cellulaire mondial des objets connectés. Pour cette société, le brevet est un élément essentiel de la valorisation de l’entreprise, notamment pour obtenir des financements. Plus on dépose de brevets, plus on a de crédibilité. Le « brevet inside » est évidemment également un atout en termes d’image (2). La start-up toulousaine est en bonne voie pour devenir ce que l’on appelle une « licorne », ces jeunes sociétés dont la valorisation dépasse le milliard de dollars (3). Cedexis, qui accélère le temps de chargement des pages web, a été rachetée en février pour un montant d’environ 100 millions de dollars par l’américain Citrix. Et pour cause : de nombreux géants du Net, médias, acteurs du e-commerce ou mastodontes du cloud ont intégré sa technologie unique au monde, adoubé par sept brevets. Ainsi, en huit ans à peine, l’aiguilleur du Web a été adopté par Google, Facebook, Twitter, Airbnb, Slack, Microsoft, Air France, Accor Hotels, Hermes, Dailymotion, Samsung, Tencent, Huawei et beaucoup d’autres. De quoi faire monter les enchères… (4) Surgivisio, société medtech innovante qui développe des technologies d’imagerie 2D/3D intégrées à la navigation chirurgicale, a bouclé un tour de financement de 10,7 millions d’euros en particulier grâce à la protection de sa technologie.
Isorg conçoit des photodétecteurs organiques et des capteurs d’images en électronique polymère à partir d’un procédé de fabrication par impression. Actility développe et exploite un système de communication machine à machine (M2M), adapté aux applications de très grand volume. Fineheart a mis au point une mini-turbine cardiaque. Ses ruptures technologiques sont brevetées pour empêcher toute fabrication, détention et importation dans les territoires visés, mais avec des difficultés contrastés. Pour obtenir une délivrance rapide et peu coûteuse aux US, la start-up a d’abord effectué un dépôt au Canada en requérant un examen accéléré. Obtenu, ce brevet a ensuite été étendu aux US selon la procédure PPH (Patent Prosecution Highway) pour éviter les aller-retour avec l’examinateur américain. À l’inverse, la société s’époumone à convaincre le bureau chinois des brevets, malgré la délivrance d’un même titre dans la plupart des autres pays du G20. Les examinateurs chinois contestent systématiquement les revendications déposées et entrent dans un jeu d’usure onéreux et à l’issue incertaine.
Plus brillantes et plus efficaces sur le plan énergétique, les LED d’Aledia pourraient bousculer les technologies existantes pour l’éclairage des futurs écrans de smartphones, de montres connectées ou de lunettes de réalité augmentée. La structure d’émission de ses LED est constituée d’une forêt de nanofils en nitrure de gallium, d’où un rendement lumineux très élevé. Oledcomm diffuse Internet à haut débit sans fil et sans ondes, grâce à la modulation à haute fréquence du signal lumineux émis par les LED – invisible à l’œil – qui transmet les données, jusqu’à 23 mégabits par seconde. Ynsect est le leader mondial de la production d’insectes pour les besoins de l’alimentation animale.
L’assistant vocal de Snips garantit le respect de la vie privée. Ceux d’Apple, Google ou Amazon, envoient votre voix dans le Cloud pour l’analyser et renvoient le résultat. Snips analyse votre voix localement, dans l’appareil, sans qu’aucune donnée ne soit envoyée sur Internet. Les sportifs peuvent utiliser un capteur Bodycap, de la taille d’une gélule, qui permet de mesurer leur température interne pendant l’effort. CorWave développe une technologie de pompe ventriculaire à membrane ondulante. Pour pallier la déficience du ventricule gauche, majoritairement responsable des insuffisances cardiaques, la pompe de Corwave assure un fonctionnement physiologique similaire à celui du cœur natif.
Le millésime 2013 se caractérise par des cycles de recherche particulièrement longs.
InFlectis BioScience développe des thérapies qui exploitent la réponse intégrée au stress pour le traitement d’un large éventail de maladies. Cailabs veut faire passer, dans une même fibre optique, 45 formes différentes de lumière. Cette technologie ouvre de nouveaux marchés dans l’avionique et les réseaux locaux. GamaMabs Pharma est une entreprise de biotechnologie en Immuno-Oncologie, leader dans le développement d’anticorps optimisés ciblant AMHR2 dans le cancer. Les brevets sont donc au coeur du développement de ces sociétés pour protéger leurs investissements de long terme. Gamamabs a une stratégie duale, proactive et réactive. La première consiste à engager des études pour renforcer certaines protections. La deuxième consiste à analyser systématiquement tous les résultats générés au regard des brevets existants pour identifier les inventions non encore protégées. En revanche, la longueur de ces cycles engendre des coûts d’extension et de maintenance des brevets prohibitifs dans les pays européens. En attendant le brevet unitaire européen (5), ces coûts continuent à pénaliser ces TPE sur leur marché domestique.
La tablette numérique d’ISKN concilie les sensations du dessin sur papier et les avantages du digital, contrairement aux tablettes graphiques où le «stylet» est roi et le papier, bon à jeter. Dreem commercialise un bandeau portable qui mesure l’activité cérébrale afin de faciliter l’endormissement, améliorer la qualité du sommeil profond et permettre de se réveiller plus reposé. Exagan veut révolutionner l’électronique de puissance avec des transistors dix fois plus rapides grâce à l’apposition d’une couche de nitrure de gallium (GaN) sur des plaquettes de silicium. Les marchés visés sont ceux des chargeurs de téléphones, de l’automobile électrique, l’industrie, le photovoltaïque et l’aéronautique, à plus long terme.
Solable transforme l’eau du robinet en eau pure, à travers un processus inspiré par la nature, sans filtre ni produit ajouté. Enovap a pour objectif d’aider le fumeur à arrêter avec plaisir. Son vaporisateur intelligent contrôle les substances actives via différentes méthodes de diffusion du principe actif, en particulier la nicotine, ce qui a valu à son inventeur la Médaille d’or au concours Lépine de 2014. MIP Robotics veut rendre la robotique industrielle accessible à tous, pour des petites ou moyenne séries mais aussi pour des utilisateurs n’ayant pas de connaissance en informatique ou en programmation.
Parmi les 100 premiers inventeurs de la French Tech, une seule entreprise a été créée depuis 2016. Il s’agit de Helper, start-up qui envoie ses drones faire du sauvetage en mer ♦
(1) Collectif. Pour protéger la French Tech, il faut élargir le champ des brevets. Le Monde, 2017 https://www.lemonde.fr/idees/article/2017/09/01/pour-proteger-la-french-tech-il-faut-elargir-le-champ-des-brevets_5179472_3232.html
(2) Brevet, les bonnes questions à se poser. INPI 2017, https://www.inpi.fr/fr/brevets-les-bonnes-questions-se-poser
(3) Internet des objets : la start-up toulousaine Sigfox a refusé une offre à un millard d’euros. La Dépêche, 2018 https://www.ladepeche.fr/article/2018/02/15/2743202-internet-objets-start-up-toulousaine-sigfox-grande-ambitions-2018-2018.html
(4) Sylvain Rolland, Pourquoi le français Cedexis se vend à l’américain Citrix. La Tribune, 2018 https://www.latribune.fr/technos-medias/innovation-et-start-up/pourquoi-le-francais-cedexis-se-vend-a-l-americain-citrix-768222.html
(5) Manuel Moragues. « Le premier brevet unitaire européen devrait être délivré début 2019 », estime Benoît Battistelli de l’OEB. L’Usine Nouvelle, 7 juin 2018. https://www.usinenouvelle.com/editorial/le-premier-brevet-unitaire-europeen-devrait-etre-delivre-debut-2019-estime-benoit-battistelli-le-president-de-l-oeb.N703704
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