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Christophe Dandois, PDG de Leocare : « Nous simplifions la relation à l’assurance au sein d’un seul contrat, une seule application. »

Leocare
Christophe Dandois, PDG de Leocare.

Fondée en 2017 près de Rennes par Christophe Dandois et Noureddine Bekrar, Leocare est une start-up qui souhaite changer les codes de l’assurance. Pour Forbes France, Christophe Dandois est revenu sur la genèse de son projet tout en ayant la conviction que les Assurtech comme la sienne disposent de l’innovation et la flexibilité nécessaires pour mieux s’adapter à l’accélération du digital dans le quotidien des Français et Européens.


 

Comment vous est venue l’idée du projet Leocare ?

Christophe Dandois : Notre projet ne vient pas de nulle part… Noureddine Bekrar et moi avons travaillé depuis plus de 20 ans dans le domaine de la transformation digitale des acteurs publics français. Nous avons commencé par les telecom et les fournisseurs d’énergie, qui ont dû s’adapter à l’ouverture à la concurrence dès les années 2007-2008. L’évolution réglementaire en la matière a d’ailleurs permis d’apporter plus de valeur au consommateur.

Le deuxième pilier important pour la transformation de ces acteurs a été le fait de s’adapter à un consommateur exigeant et qui demande de plus en plus de confort dans son quotidien. Ce dernier utilise désormais majoritairement son smartphone et l’enjeu pour les entreprises n’est plus la marque mais le fait de délivrer une expérience client et des services adéquats. Que cela soit les télécom, la distribution, le retail ou les banques, tous les secteurs ont dû s’adapter aux évolutions digitales pour simplifier l’expérience de leur client.

En 2017 nous avons décidé de nous investir dans le monde de l’assurance pour être en phase avec le passage du modèle de commodités à celui du serviciel. Nous avons créé une application mobile qui regroupe tous les besoins du foyer en matière d’assurance au même endroit. Nous sommes convaincus que l’expérience d’assurance doit être simplifiée, d’autant plus que c’est dans ce secteur que le client paye un service qu’il ne consomme pas directement.

 

Quels sont les avantages de Leocare face aux offres d’assurance classiques ?

Sur l’application Leocare, il est possible de gérer ses contrats d’assurance habitation, voiture, scolaire, smartphones, animaux, etc… et que cela soit pour réaliser un avenant, faire un devis ou déclarer un sinistre, tout se fait au même endroit. Le deuxième avantage est la flexibilité de notre solution : cela revient à offrir une bonne garantie au bon moment et au bon prix. Par exemple, pendant le confinement, nombreux ont été les clients à ne plus utiliser leur voiture. Il était donc possible de baisser son niveau de garantie le temps que la voiture reste au garage. Et pour récupérer la garantie initiale, une simple photo du véhicule pour vérifier son état est nécessaire.

Enfin, le troisième avantage de Leocare est la proximité. C’est la capacité à exister dans le quotidien de nos clients tout en mélangeant prévention et protection. Nous nous efforçons par exemple de transmettre les bonnes informations au bon moment, comme le fait de communiquer sur les mois de l’année avec les plus gros taux d’accidents routiers dus au sous-gonflage des pneus. Nous mettons également à disposition une cartographie de ces accidents et notre équipe de R&D a la possibilité de reconstituer le complexe de l’accident (Est-ce à cause de la pluie ? de bouchons ?).

La technologie permet aujourd’hui de marquer une étape dans le tournant serviciel et notre travail de mutualisation des garanties est directement inspiré des best practices ; comme celles d’UberEats par exemple : lorsque vous appelez l’assistance avec Leocare, vous pouvez suivre son arrivée en temps réel. Nous simplifions la relation à l’assurance au sein d’un seul contrat, une seule application. De la contextualisation du sinistre à la télé-expertise (ou bien la visio-expertise voire en physique si nécessaire) en passant par la mise en relation avec des artisans et l’indemnisation.

La technologie sert à maximiser la prévention et elle va nous permettre par exemple – dans le cadre d’un nouveau service d’assurance scolaire en fin d’année – d’envoyer une notification push aux parents dès que leurs enfants sont rentrés de l’école.

 

Votre offre est-elle principalement adressée aux digital natives ?

Pas du tout. Il y a quelques Assurtech qui ont choisi de s’adresser exclusivement aux digital natives mais Leocare s’adresse à tous, de part sa simplicité d’utilisation, et à toutes les problématiques du foyer. Je dirais que nos clients sont des digital actives et cela ne concerne pas seulement les plus jeunes. Nos clients ont entre 28 et 48 ans et sont issus majoritairement de milieux urbains. 

Il faut également préciser que 2021 a marqué un profond virage dans nos modes de consommation. La Covid a été synonyme d’accélération du digital et elle a démontré notre intérêt à nous placer au plus proche des gens.

 

Comment vous positionnez-vous face aux acteurs historiques de l’assurance ?

Si nous portons attention à l’histoire, nous pouvons remercier les acteurs historiques de l’assurance d’avoir ériger un modèle français où le rapport garantie-prix est très bas. Maintenant, la vie a bien changé depuis et notre relation aux mobilités ou au logement a évolué. L’exode urbain est d’autant plus marqué et de plus en plus de monde délaisse leur appartement de ville pour vivre dans une maison, avec voiture.

Le fait est que l’assurance traditionnelle n’est pas en mesure de répondre à cette autonomie à géométrie variable, alors qu’il est possible de le faire grâce à la technologie. Prenez aussi par exemple la généralisation du télétravail, les garanties liées aux dégâts des eaux, aux dommages électriques, aux vols ou aux incendies. C’est bien les acteurs comme nous qui pourront répondre à ces nouveaux besoins serviciels.

La technologie n’a jamais été au cœur des préoccupations des grandes assurances et pourtant nous savons que c’est la seule manière de répondre aux nouveaux besoins du client. Le monde de l’assurance est un vase clos qui n’a pas pour habitude d’être en situation de porosité avec d’autres écosystèmes. Cela est amené à changer à mesure que de nouvelles Assurtech comme la nôtre s’investissent sur ce marché estimé à plus de 35 milliards de primes par an en France.

 

Christophe Dandois : Trop souvent, la R&D française part à l’étranger et revient dans l’Hexagone par le biais d’un géant qui disrupte tout le marché.

 

Est-ce important de rendre les systèmes d’information plus interopérables entre les différents acteurs de l’assurance ?

La loi Hamon de 2015 permet de changer d’assurance librement après un an de contrat passé chez une compagnie. Mais lors de sa promulgation, cette loi n’a pas été mise en avant et c’est à mon sens un manque d’honnêteté vis-à-vis du citoyen. De la même manière, tous les soirs, nous sommes tenus en tant qu’assureurs de remplir des fichiers des véhicules assurés (FVA) pour éviter les cas de fraude. Expliquez-moi quelle est la difficulté d’ajouter un logiciel type CRM pour récupérer l’identité de l’assuré, son immatriculation, et ainsi faire gagner du temps aux assureurs ?

Je ne sais pas qui sera en mesure de le déployer en France, en Europe, voire au niveau mondial, mais si nous pensons pouvoir protéger le monde de l’assurance en agissant de la sorte, nous allons tomber de haut et nous retrouver dans la même situation qu’Alcatel ou Kodak.

Tout est considérablement en train de bouger et les cartes sont rebattues dans tous les secteurs. Stellantis vient par exemple d’annoncer un partenariat avec Amazon pour accélérer sa transformation software. La data va devenir l’enjeu stratégique prioritaire et les acteurs numériques comme nous auront de l’avance.

De notre côté, nous sommes par exemple le premier assureur de Tesla en France et nous coopérons librement avec cette communauté pour mieux identifier leurs besoins et leur laisser le choix de piloter leur contrat d’assurance en temps réel.

 

Est-ce possible de signer des partenariats avec des acteurs extra-européens tout en préservant notre souveraineté ?

Nous nous flattons toujours de notre recherche française, notamment en matière d’intelligence artificielle. Mais ce qui m’intéresse le plus, c’est le client. Nous avons cru au minitel mais nous n’avons pas vu arriver internet. Nous avons cru que l’avenir serait le téléphone, tout en oubliant que la valeur était bien logée dans les serveurs.

Il faut donc arrêter de se protéger face aux grandes évolutions technologiques car cela va à l’encontre même de la souveraineté. Si nous sommes capables d’utiliser notre savoir-faire existant et de donner un coup d’accélérateur à la transformation, cela favorisera l’émergence de modèles conquérants qui peuvent s’imposer à l’extérieur. La France a un modèle d’assurance formidable dont tous les pays au monde rêvent. Il faut mettre la technologie au service du client – et non de l’assuré – pour que la France devienne un acteur majeur du renouvellement en la matière.

L’enjeu est aussi éthique, puisque le client est davantage concerné par la transparence et l’engagement sociétal et environnemental. Les vêtements fabriqués par des Ouïghours sont par exemple de plus en plus boycottés ! C’est la même chose pour les assurances, il faut avant tout éviter les centres d’appel délocalisés et faire valoir son engagement pour la maîtrise de son savoir-faire. Trop souvent, la R&D française part à l’étranger et revient dans l’Hexagone par le biais d’un géant qui disrupte tout le marché.

 

Vous avez levé 133 millions de dollars en 2021… Quelle étape cela marque pour Leocare ?

À toutes nos étapes de développement, l’enjeu a surtout été de démontrer notre capacité à croître, à gouverner et ancrer notre marque dans la tête des Français et Européens. Ces nouveaux fonds vont permettre de maintenir notre croissance : nous comptons 27,6 millions d’euros à notre portefeuille à la fin de l’année 2021 et l’objectif est d’atteindre les 200 millions d’ici 2023.

Nous projetons également des acquisitions digitales cette année ainsi que des recrutements dans nos équipes en relation client ou encore en R&D pour adresser les besoins des conducteurs de voitures autonomes par exemple. Enfin, nous avons l’intention de nous exporter sans pour autant faire un concours de punaises sur la mappemonde. Nous souhaitons construire notre marque au fur et à mesure, pays par pays.

En complément, Leocare proposera également prochainement des fonctionnalités qui permettent de réduire les sinistres. Il s’agit notamment de TakeCare, un bot qui, grâce à l’open data fournie par l’Observatoire Interministériel de la Sécurité Routière et de l’Intelligence Artificielle, permet d’alerter les clients Leocare lorsqu’ils entrent dans des zones à risques.

 

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