Le 15 avril prochain commence à Paris une semaine de conférences consacrées à la blockchain. Fruit de plus de 20 ans de recherche en cryptographie, la blockchain – et sa plus illustre application qu’est le bitcoin – est apparue il y a plus de 10 ans. Elle constitue pour beaucoup l’une des innovations les plus fondamentales depuis l’apparition des connexions inter-réseaux (1971 Arpanet) et du World Wide Web (1989).
Si Internet a permis un partage et une circulation sans limite de tous types d’objets numériques (documents, vidéo, logiciels,…), les technologies blockchain fournissent la possibilité d’une unicité numérique. Opérer des transactions sans tiers de confiance, attester des titres de propriété, garantir l’authenticité de l’information, partager des données personnelles de manière sécurisée, échanger sans intermédiaire, prouver la traçabilité logistique… autant d’usages qui peuvent être équipés de ces technologies et qui viendront soutenir un nouveau train d’innovations. Plus qu’une nouveauté technologique dans cet univers Internet que nous connaissons, la blockchain est un pourvoyeur de rareté dans un monde dématérialisé et surabondant par ses échanges. Et de cette rareté naît la valeur.
Dans le modèle « classique », chaque fois qu’une transaction, ou un échange, s’opère, elle fait intervenir un tiers de confiance. Avec les technologies blockchain, ce tiers de confiance peut être lui-même dématérialisé, garantissant le cas échéant l’intégrité, l’unicité, la non répudiation, l’horodatage, ou encore l’archivage des transactions. La confiance, actif intangible des entreprises et des institutions, est au cœur de la valeur apportée par la blockchain. Elle peut désormais être assurée par la technologie seule, sans tiers, là où, jusqu’à présent, elle était sous-tendue par la fiabilité des processus, les mécanismes assurantiels et la réputation des acteurs en présence. Directement inspiré du mouvement des « Cypherpunk », la blockchain trouve sa source dans l’idéal d’une gouvernance décentralisée, aux mains des utilisateurs et de transactions transparentes et accessibles de tous.
Le potentiel de désintermédiation est la conséquence immédiate de l’usage de la blockchain et elle n’épargne dans l’absolu aucun acteur. A l’extrême, un service de VTC peut ainsi être envisagé sans Uber, un service d’échange de location de vacances sans Airbnb, une marketplace sans Amazon, etc. Si la confiance dans les grandes plateformes digitales venait à s’effriter, ces technologies pourraient constituer une menace redoutable pour les acteurs actuels. Mais les usages de la blockchain prennent aussi à revers les prérogatives régaliennes des nations et leurs institutions, avec comme illustration les crypto-actifs. Face à cela, la France a fait le choix de ne pas appliquer par défaut un principe de précaution, et de doter ces crypto-actifs d’un cadre réglementaire, juridique et fiscal pour favoriser leur développement. En effet, seul un cadre clair permet aux acteurs économiques de se positionner en masse, n’en déplaise aux pères fondateurs de ces technologies ! On ne peut que s’en féliciter car le contraire aurait immanquablement conduit à brider nos entreprises d’un vaste potentiel de développement, voire de financement ; d’autant plus que la France compte déjà sur son territoire des champions au rayonnement mondial incarnant l’excellence technologique, scientifique et académique française.
Aujourd’hui, l’enjeu de ces technologies reste bien leur industrialisation de masse, l’appropriation large de leurs usages. Pour ce faire, il est essentiel de favoriser une appréhension positive de ces technologies, au-delà de l’image du bitcoin et des crypto-monnaies.
Montrer leur réalité et parfois leurs risques est une bonne façon d’accompagner la montée inéluctable de ces technologies par l’éducation des citoyens à leur usage. C’est tout l’objet de la conférence du 15 avril que nous avons incité à créer sous l’égide des pouvoirs publics. Valoriser davantage l’écosystème d’acteurs de ce secteur d’avenir, et par extension soutenir une filière plus vaste comprenant les cabinets conseils et les entreprises de technologies est nécessaire, autant que pour d’autres technologies comme l’intelligence artificielle, ou le big data. Forte de cette dynamique en plein ébullition, la France dispose aujourd’hui de tous les atouts pour rayonner mondialement en emmenant l’Europe dans son sillon. Mais il faut continuer à agir, et vite.
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