Mardi, l’Institut Knight First Amendment a envoyé une lettre au président Donald Trump après que celui-ci a bloqué deux twittos. Une décision qui viole selon eux le premier amendement. « Nous écrivons au nom des utilisateurs Twitter que vous avez bloqués avec votre compte @realDonaldTrump, simplement parce que ceux-ci critiquaient, n’approuvaient pas, ou se moquaient de vos décisions ou de votre personne en tant que président ».
« Ce compte Twitter fonctionne sur le principe d’un forum public dans le cadre du premier amendement, et, en conséquence, le blocage perpétré à l’encontre de nos clients est inconstitutionnel. Nous vous demandons de les débloquer et de débloquer toute autre personne bloquée pour des raisons similaires. »
Cette lettre soulève d’importantes questions sur la liberté d’expression sur les réseaux sociaux.
Bien que Donald Trump ait utilisé son compte personnel, @realDonaldTrump, et non pas le compte @POTUS, Katie Fallow, une avocate du Knight First Amendment Institute qui a co-écrit la lettre, a déclaré à Forbes que la principale question était « à quelle fin est-il utilisé ? ». Katie Falow a ajouté que « [Le président Trump] l’utilise afin de s’engager auprès du public, de discuter à propos de leurs commentaires ».
Elle a également mentionné, mardi, la déclaration du secrétaire presse de la Maison Blanche, Sean Spicer : « Donald Trump est le président des Etats-Unis, alors ses tweets sont considérés comme des déclarations officielles de la part de la présidence américaine ».
L’avocate cite la « doctrine du forum public » qui stipule que lorsqu’un fonctionnaire du gouvernement ouvre un espace physique ou virtuel au public, il ne peut pas discriminer les personnes qui réagissent à ses déclarations pour leurs opinions. Elle rappelle que cette doctrine a été appliquée aux réunions du conseil municipal, ainsi qu’à Facebook, mais pas (encore) à Twitter.
« Bloquer des Twittos depuis votre compte Twitter entrave la discussion de plusieurs façons. D’abord, les Twittos ne peuvent pas vous suivre sur Twitter, sont limités dans leur capacité de commenter/d’afficher vos déclarations, à trouver vos tweets via la fonction recherche du réseau social et à savoir qui vous suit », précise la lettre. « Ils sont également limités dans leur capacité à participer et à réagir à conversations associées à vos tweets. »
D’après la lettre, Holly O’Reilly a été le bloquée le 28 mai après avoir partagé un GIF du Pape François présentant une moue inconfortable lors d’une rencontre avec le président américain, suivi de la mention « c’est ainsi que le monde entier vous voit ». Holly O’Reilly a déclaré à Forbes qu’elle avait fréquemment tweeté son dégoût prononcé pour la politique du président Trump. « J’ai tweeté le même genre de choses que je lui tweete habituellement, me moquant de lui », précise-t-elle. Cette fois, et pour la première fois, elle a été bloquée.
« Cela m’a simplement fait rire au début », déclare-t-elle. « Le leader du monde libre m’a bloqué sur Twitter. C’était tellement absurde que je ne pouvais rien faire d’autre qu’en rire. Et puis je me suis dit que ça n’était ni correct, ni juste. »
« Il ne donne pas de conférences de presse. Twitter est le seul endroit où nous pouvons échanger », déplore-t-elle. L’utilisatrice s’est dit « frustrée » à présent, parce qu’elle ne peut « plus participer » au débat. Elle ajoute : « Je ne peux plus lire ou répondre comme les autres citoyens ».
Un autre compte Twitter a été cité dans cette lettre. « Joseph M. Papp, @joepabike, a découvert qu’il avait été bloqué le 4 juin 2017, après qu’il ait posté ‘Bons vœux de Pittsburgh, Monsieur’ et ‘Pourquoi n’avez-vous pas assisté à votre rallye «#PittsburghNotParis à Washington, Monsieur ? #fakeleader », en réponse à un tweet du 3 juin ».
David Green, avocat et directeur des libertés civiles de l’Electronic Frontier Fondation, déclare qu’il a immédiatement songé à la déclaration de Sean Spicer selon laquelle le président considérait Twitter comme un endroit pour faire ses déclarations officielles. « Même si ce n’était pas le cas à l’origine, son compte Twitter est devenu un forum public », a déclaré David Greene.
Deux cas majeurs décrivent l’étendue vague de cette question, déclare Greene: Borreca c. Fasi, qui a statué que lorsqu’un fonctionnaire du gouvernement exerce une fonction dans le but de partager l’information avec le public, l’interdiction d’un individu en raison de ses opinions est assujetti à un examen rigoureux en vertu du Premier amendement ; et Ehrlich c. Baltimore Sun, qui a statué qu’un fonctionnaire du gouvernement peut refuser des entrevues privées aux journalistes. « Ce serait différent s’il leur refusait l’accès aux documents publics ou à des réunions publiques », déclare David Greene.
Bien que les utilisateurs de Twitter puissent bloquer d’autres utilisateurs, David Greene a déclaré à Forbes « ce n’est pas un problème pour la plupart des gens, car la plupart des gens ne sont pas des acteurs gouvernementaux. Mais lorsque vous faites partie d’un gouvernement et que vous utilisez votre compte comme un forum public, le Premier Amendement s’applique ». Si un compte Twitter est bel et bien considéré comme un forum public, ce n’est pas parce que vous avez la possibilité de bloquer un utilisateur que les restrictions du Premier Amendement ne s’appliquent pas.
« Nous envisageons notre démarche comme une lettre de demande. Nous informons le gouvernement de ce que nous pensons être une pratique inconstitutionnelle », a déclaré Katie Fallow.
En 2015, une rumeur a circulé selon laquelle le président Barack Obama aurait bloqué « Meninist » sur Twitter depuis le compte @POTUS, mais ces accusations n’ont jamais été confirmées par la Maison Blanche.
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