Rechercher

Quel Est L’Avenir Des Centres Commerciaux ?

centres commerciaux
Crédit : Wiki Commons / Intérieur d'un des centres commerciaux Westfield, le Westfield Garden State Plaza

L’annonce, cette semaine, d’un projet de « divertissement familial » piloté par le Cirque du Soleil dans un centre commercial de Toronto au Canada, en dit long sur l’avenir des centres commerciaux. L’espace de 2 230 mètres carrés, appelé « Creactive », sera une sorte de terrain de jeu inspiré par le cirque, avec une gamme d’activités allant du jonglage à la corde raide et qui permettra aux fans de « découvrir l’envers du décor et de s’imaginer dans la peau [des] artistes », selon Marie Josée Lamy, productrice de Creactive. Flâner dans un centre commercial prendra une signification toute nouvelle, alors que des clients pourront s’essayer au trapèze. Et c’est bien là tout l’enjeu.

Les centres commerciaux ne peuvent plus se contenter aujourd’hui d’être des espaces passifs où les gens vont simplement faire quelques courses. Ils doivent devenir des lieux attrayants, où l’on peut se livrer à plusieurs activités. Sans quoi cet espace particulier sera relégué au statut de relique – « un anachronisme historique, une aberration qui ne répond plus aux besoins du public, du consommateur ou du détaillant, depuis une soixantaine d’années », comme le pensait Rick Caruso (un multimillionnaire et philanthrope américain).

Avec cette idée en tête, prenons un premier exemple : le Randall Park Mall, dans l’État américain de l’Ohio. Lorsqu’il a ouvert ses portes en 1976, le Randall Park Mall a détenu brièvement le titre de plus grand centre commercial du monde. Cependant, il a rapidement perdu de sa compétitivité, et en 2000, le centre commercial était déserté à près de 92%. En 2017, Amazon a fait part de la construction d’un centre d’expédition de près de 80 000 mètres carrés, à l’endroit même où se trouvait le Randall Park Mall. Un résultat qui prouve sans mal que le shopping en ligne est devenu bien plus compétitif que le shopping dans les centres commerciaux, ou comment « l’informatique dévore le commerce » comme le disait Marc Andreessen, capital-risqueur et fondateur de la société Netscape. Mais le destin de tous les centres commerciaux ne sera pas nécessairement aussi funeste.  

Comme toute forme de commerce de détail, les centres commerciaux ne sont pas condamnés à disparaître, mais ils doivent pour cela être radicalement réinventés. Et ce, même si beaucoup, comme le site Deadmalls.com, pensent le contraire.

Ce mois-ci, la chaîne de centres commerciaux Westfield (très réputée à Londres) a dévoilé sa « Destination 2028 », où les centres commerciaux deviennent de véritables « micro-cités hyper connectées ». Dans cette vision, les allées des centres sont équipées d’intelligence artificielle, les clients peuvent avoir accès à des scanners oculaires qui personnalisent leur visite, et des vestiaires intelligents offrent une « extra-périence » aux potentiels acheteurs. Mais le véritable enjeu est bien la réinvention du commerce de détail. Les magasins ne deviendront que des étapes, des vitrines, qui mettront en vedette les fabricants, les marques, et les processus derrière la création de chaque produit. Des « zones d’événements » accueilleront en outre des activités interactives.

Westfield met déjà un pied dans le futur, avec le lancement cet été du Westfield Square (à Londres, toujours), un espace gigantesque dédié à la restauration, au divertissement et aux loisirs en plein air, y compris le plus grand restaurant japonais européen, Ichiba.

Le groupe chinois Alibaba a lui aussi travaillé sur sa propre version des centres commerciaux de demain avec son concept « More Mall ». En bref, il s’agit d’un centre commercial de cinq étages qui a ouvert ses portes fin avril à Hangzhou (la capitale de la province chinoise du Zhejiang) et qui regroupe une quantité de nouvelles technologies, comme des caisses automatiques.

Dans certains cas, les centres commerciaux ne seront pas amenés à disparaître à cause du commerce en ligne ; ils aideront plutôt à solidifier des boutiques en ligne. Simon Property Group, une entreprise spécialisée dans la gestion foncière des centres commerciaux a ainsi créé une « plateforme de vente au détail évolutive », appelée The Edit. Il s’agit d’un espace pop-up pour les start-up dans le milieu du commerce électronique qui sont de plus en plus désireuses d’obtenir une présence physique pour leurs produits – en magasins, donc.

Certains centres commerciaux pourront être réinventés mais il est certain que de nombreux autres seront amenés à être détruits. Et ce pour une raison très simple. Les besoins et les attentes des clients ont changé en 2018 et il existe bien trop de centres commerciaux. Entre 1970 et 2017, on estime que dans les pays développés, le nombre de centres a quadruplé. Mais à l’époque, il était utile autant que nécessaire d’avoir des magasins à proximité de son domicile. Aujourd’hui, avec l’avènement d’Internet et des smartphones, nul besoin d’avoir un accès immédiat et physique aux produits : on peut commander depuis n’importe quel endroit et à n’importe quelle heure, se faire livrer chez soi ou même récupérer ses produits en boutique. Nos téléphones sont ainsi devenus une passerelle vers un monde digital de marques. Pour certains, comme le conseiller en investissements dans le commerce de détail Daniel Hurwitz, le fond du problème est que « nous n’avons pas trop construit, mais pas assez démoli ».

Pour conclure, les centres commerciaux qui survivront à cette purge technologique ne seront plus exclusivement dédiés au shopping. Ils regrouperont « restaurants, loisirs et divertissement », et le shopping ne sera qu’un complément (et un petit plaisir en plus), mais plus nécessairement la raison première qui nous poussera à nous déplacer.

Et puis après tout, les centres commerciaux ne représentent-ils pas des marchés modernes ? De grands marchés comme le Borough Market de Londres, vieux de 1000 ans, par exemple, existe depuis l’aube du commerce de détail. Et il a su évoluer avec le temps !

Vous avez aimé cet article ? Likez Forbes sur Facebook

Newsletter quotidienne Forbes

Recevez chaque matin l’essentiel de l’actualité business et entrepreneuriat.

Abonnez-vous au magazine papier

et découvrez chaque trimestre :

1 an, 4 numéros : 30 € TTC au lieu de 36 € TTC