Depuis l’invention par Karl Benz du premier moteur à combustion en 1885 à Mannheim, l’automobile s’est imposée aux quatre coins du monde. Taxis jaunes ou bus rouges sont devenus le symbole des grandes agglomérations ainsi que des kilomètres d’embouteillages et des rues congestionnées.
Bien que les innovations aient été nombreuses depuis les débuts de l’automobile, ses composants essentiels n’ont que très peu changé depuis les années 20 et Henry Ford, fondateur du constructeur automobile éponyme. Toutefois, cette industrie subit pour la première fois depuis 50 ans une vague de transformations qui devrait la métamorphoser irrémédiablement.
Les déplacements urbains durablement affectés par la mobilité 2.0
A l’urbanisation galopante s’ajoute désormais un désir profond de modification des modes de mobilité. Contrairement à leurs parents, les millenials sont aujourd’hui de plus en plus rares à posséder une voiture ou à passer leur permis de conduire. Plus besoin donc du sésame rose, ce sont désormais les services de mobilité qui sont privilégiés, engendrant un secteur en croissance exponentielle depuis 2014. Vélos, trottinettes et scooters électriques, apps de taxis sont dorénavant proposés par des opérateurs comme Lime, Bird, CityScoot ou encore Uber.
En 2018, plus d’un demi-milliard de personnes utilisaient déjà ces différents services de mobilité dans le monde. Leur impact sur le secteur de l’autotech est donc croissant. Preuve en est, Didi et Uber ont atteint des sommets, dépassant des valorisations de plus de 50 milliards de dollars chacun, malgré les récentes déconvenues boursières de ce dernier : une valorisation stabilisée autour de 73 milliards de dollars après un début de cotation chaotique.
Les véhicules transformés
Sous les coups de boutoir des évolutions réglementaires, ainsi que de la prise de conscience de la population vis-à-vis de leur empreinte carbone, les constructeurs automobiles doivent repenser l’impact de leurs véhicules sur l’environnement. Cela se traduit par des annonces spectaculaires, comme, par exemple, lorsque Jaguar Land Rover a dû récemment rappeler plus de 44 000 véhicules qui n’étaient pas aux normes antipollution, ainsi que par l’explosion annoncée de la voiture électrique. Pour cette dernière, les ventes demeurent confidentielles, à part en Norvège où elles représentent déjà la moitié des voitures neuves vendues, mais elles augmentent chaque année et le « mass-market » est pour bientôt.
Autres révolutions technologiques annoncées : la conduite autonome – Tesla a annoncé son intention de faire rouler ses voitures sans conducteur d’ici 2020, tandis que Waymo compte déjà plus de 16 millions de kilomètres parcourus avec ses voitures autonomes sur les routes publiques – et les véhicules connectés.
Ces technologies, groupées, permettent d’entrevoir un développement à grande échelle de voitures connectées, autonomes et plus respectueuses de l’environnement. Ces progrès viendront des efforts opérés à la fois par les start-up et les géants de la tech pour innover dans un secteur resté trop longtemps entre les mains d’acteurs historiques traditionnels.
Fin de l’hégémonie des constructeurs automobiles traditionnels ou renouveau du secteur ?
En août 2018, sur les 56 entreprises détenant l’autorisation d’essayer leurs voitures autonomes sur les routes de l’État de Californie, 71 % venaient du secteur tech, allant des Titans aux start-up innovantes telles que Drive.ai, Zoox ou encore Pony.ai. À l’instar de la bataille que se livrent les banques traditionnelles et les fintech depuis une dizaine d’années, les constructeurs automobiles et les acteurs de la tech se retrouvent désormais dans une opposition de plus en plus frontale.
Le Boston Consulting Group estime que les profits provenant de l’assemblage des composants mécaniques d’un véhicule, domaine traditionnel des constructeurs, vont stagner d’ici à 2035, et passer de 30% des profits de l’industrie à moins de 20%, alors qu’ils vont exploser pour les nouvelles technologies telles que les composants permettant la conduite autonome, la connectivité, etc. Les bénéfices du secteur vont donc se déplacer vers les logiciels où les constructeurs manquent de connaissances et d’expérience. Quant aux investissements en R&D pour le développement de nouvelles technologies, le risque est que les acteurs traditionnels ne parviennent pas à suivre le rythme imposé par les start-up et autres géants de la tech tels que Google ou Tesla.
Toutefois, plusieurs signes montrent que l’industrie automobile traditionnelle n’entend pas se laisser dépasser par les nouveaux arrivants : investissement en milliards de $ en R&D, restructuration et compartimentation des activités, déploiement d’unités mobiles, prises de participation et acquisitions à grande échelle d’entreprises innovantes.
Les constructeurs automobiles ont aussi montré qu’ils pouvaient nouer des partenariats et des alliances en misant sur leur réseau de distribution et leur marque pour garder un contrôle sur le consommateur. Ainsi, BMW, Daimler et Renault – Nissan ont déjà annoncé leur intention de s’associer à des opérateurs innovants dans la mobilité, la connectivité et les technologies de conduite autonome.
Plus que tout, leur succès dépendra de leur capacité à s’adapter. Et cela passera notamment par la culture d’entreprise. En créant une nouvelle ère liée au dynamisme et à l’innovation, ils réussiront à attirer les meilleurs talents du software. S’ils ne s’adaptent pas, ils ne pourront pas se battre à armes égales face aux géants tech : Facebook, Google, Amazon, Microsoft ou encore Didi.
Gageons que les constructeurs sauront mieux résister que les fabricants de téléphones traditionnels. La bataille ne fait que commencer, attachez vos ceintures !
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