Le débat sur les écrans à l’école est une bataille d’Hernani. Une querelle d’Anciens et de Modernes. Du côté des Anciens, il y a la volonté de sanctuariser l’école de tout écran. Quitte à aller contre la marche du monde et créer des carences éducatives. De l’autre, les Modernes ne tarissent pas d’éloges sur leurs prouesses technico-pédagogiques et nourrissent de vastes utopies. Pourtant, l’arrivée des écrans n’est pas nouvelle. Ils sont seulement devenus plus multiformes. Outils parmi d’autres, leur usage est scolaire et offre la possibilité d’une pédagogie différenciée, à des moments jugés opportuns par l’enseignant. Face à des discours sans nuance et sans commune mesure, il est peut être temps d’en redonner un petit peu.
Une arrivée progressive des écrans
La polémique autour des tablettes ne réinscrit pas le débat dans l’histoire. Car sur les bancs de l’école, les écrans commencent à dater. Ils ont fait leur première apparition dés les années 1990 dans des salles informatiques. L’auteur de ces lignes, qui travaillait déjà dans l’informatique, comme on disait à l’époque, se souvient avoir formé tous les samedis matins les élèves de la classe de CE2 de son fils dans une telle salle informatique, dés 1999. Puis, durant les années 2000, on a vu débarquer les Tableaux Blancs Interactifs ainsi que les toutes premières tablettes poussées par le fabricant Apple.
Le Plan numérique voulu par François Hollande et Najat Vallaud-Belkacem avait pour but de démocratiser l’équipement de tablettes au sein des collèges. Au gré des divergences politiques, mais aussi face à un coût souvent jugé trop élevé, le « plan tablettes » n’a pas été suivi par tous les départements, loin de là, provoquant une réelle disparité géographique, privilégiant ou privant les élèves de la possibilité de couvrir certains besoins pédagogiques sur ce support numérique. Et le locataire en titre rue de Grenelle, Jean-Michel Blanquer, a clairement abandonné ce projet lui reprochant « des résultats plutôt contre-productifs sur le plan pédagogique comme sur celui de l’utilisation des deniers publics ».
Dans le même temps,le phénomène du Bring your own Device (BYOD ou AVEC, Apportez Votre Équipement personnel de Communication, en français) se démocratise de plus en plus. En 2019, beaucoup d’élèves rapportent leur propre matériel numérique.
De manière disparate et multiforme donc, les écrans ont – depuis deux décennies – pris place à l’école, de manière institutionnelle ou plus informelle.
L’usage de l’écran est scolaire
De manière générale, il est tout aussi faux d’avancer qu’à l’école, le quotidien est fait d’écran. Leur usage est ponctuel, dans le cadre d’exercices qui répondent à une demande de personnalisation pédagogique participative. Ainsi, au tableau de la classe, interactif ou non, un seul élève réalise l’exercice. Quand la tablette ou le smartphone permettent aux élèves de le réaliser de concert. Ces outils permettent de mieux répondre à des niveaux hétérogènes ainsi que de s’adresser à des élèves qui ont des handicaps (physique, dyslexie, dyspraxie).
Bien sûr, les risques de surexposition aux écrans sont réels. La lumière bleue pose des problèmes sanitaires et les supports se sont diversifiés (télévision, ordinateur, tablette, smartphone). Mais faut-il préciser que cette surexposition est à remettre en perspective ? Les écrans ne se surajoutent pas forcément. Depuis l’arrivée des ordinateurs, on constate que les élèves ont bien souvent délaissé la télévision. Et que plus qu’à l’école c’est surtout l’usage personnel croissant qui pose problème et demande à être régulé.
Le papier ne saurait disparaître
Et il ne doit pas disparaître. L’école sans papier est une chimère. Une utopie creuse. Elèves et étudiants auront toujours des besoins d’écrire tout comme des besoins de mémorisation dont les études s’accordent à dire qu’ils se fixent mieux sur la page. Notamment celle de l’Educational Research Review, menée auprès de 170 000 lecteurs.
Par ailleurs, tous les usages ne sont pas destinés au numérique. Le livre numérique offre un contenu supplémentaire et une interactivité dès lors que l’instituteur la juge pédagogiquement intéressante.
A l’école, la guerre des écrans n’aura certainement pas lieu. Quels qu’ils soient, ils restent des outils s’ajoutant à la panoplie des dispositifs historiquement présents. Mis à disposition du bon jugement de l’enseignant, ils peuvent être mobilisés dès lors qu’il y a lieu de faire de l’individualisation, d’enrichir le contenu et de permettre au cas par cas une meilleure réussite scolaire, en ne délaissant ni la queue de classe, ni la tête de classe.
Par Alain Ecuvillon, Directeur Général d’itslearning France
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