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TRIBUNE | En 2024, ne confondez plus RSE et impact !

Sabrine Aouida, cofondatrice de Weefin
Sabrine Aouida, cofondatrice de Weefin

Dans une tribune exclusive pour Forbes France, Sabrine Aouida, cofondatrice de Weefin et ancienne analyste à Autorité des Marchés Financiers (AMF), s’attaque au sujet de la difficulté à définir la notion d’impact. Face à la multiplication des cadres d’évaluation, les entreprises sont souvent perdues et retardent leur passage à l’action. Voici quelques conseils pour ne plus confondre impact et RSE ainsi que quelques lignes de conduite à suivre pour se lancer, tout en évitant « l’impact washing ».

 

Dans un contexte d’urgence climatique et de transition, un nombre croissant d’entreprises se revendiquent “à impact”. Si l’on se réjouit de la considération grandissante des entreprises pour ces enjeux, force est de constater que la notion d’impact est largement débattue. À tel point que le terme “impact washing” devient de plus en plus prégnant : et pour cause, il n’existe aucune définition universelle de l’impact. Une entreprise qui se crée pour répondre à un besoin n’a-t-elle pas de facto un impact sur le monde, positif ou négatif ? Mais comment l’évaluer ? Et surtout, apporter la preuve que son impact soit positif ?

RSE et impact ne sont pas synonymes

Trop souvent pour parler de l’impact d’une entreprise, on évoque sa RSE. Pourtant, ces deux termes font écho à deux notions différentes. La RSE pourrait se traduire par les pratiques internes de l’entreprise, soit sa manière d’opérer, tandis que l’impact fait référence à sa raison d’être. Une entreprise à impact intègre les enjeux sociaux et environnementaux dans son modèle économique, de l’interne à l’externe, de sa construction à son exécution, en prenant en compte toute la chaîne de valeur.

À l’image d’une poupée russe, la RSE fait donc partie de l’impact, mais elle n’en est qu’une composante. Par exemple, une entreprise peut avoir une mission sociétale importante, mais une gouvernance désastreuse qui en détruit tout le sens : le scandale Orpea en 2022 en est la preuve. Et à l’inverse, une gouvernance dont la parité et la diversité seraient exemplaires ne compense pas un modèle économique incompatible avec les limites planétaires. Cela souligne l’importance d’une approche holistique et cohérente pour véritablement prétendre être une entreprise à impact. Pour autant, toutes les initiatives allant dans le bon sens doivent bien entendu être encouragées.

Jungle des cadres d’évaluation

L’accumulation des cadres d’évaluation et le manque d’indicateurs standardisés viennent complexifier la donne. Certains, comme les Objectifs de Développement Durable (ODD) des Nations Unies, sont souvent brandis par les entreprises pour justifier de leur impact. Cependant, ils s’appliquent davantage aux États et, dans une moindre mesure, aux multinationales, mais se révèlent peu adaptés aux entreprises de plus petite taille. Cet exemple illustre à quel point mesurer l’impact d’une entreprise nécessite à la fois des critères qui soient précis, mais aussi adaptés à chaque entreprise : il y a autant d’indicateurs envisageables qu’il existe d’entreprises à impact. Un cadre méthodologique global applicable à tous serait idéal, mais semble utopique, car il n’existe aucun univers où la mesure d’impact peut être normalisée. Il est néanmoins crucial d’établir des lignes directrices et des garde-fous afin d’éviter l’impact washing et encourager les initiatives sérieuses.

En France, un cadre méthodologique de place a récemment été créé. Celui-ci propose un équilibre entre guidance, incitation et flexibilité dans le choix des méthodes et des indicateurs de mesure. Engageant et exigeant, il ouvre la voie vers une évaluation rigoureuse de l’impact. Ainsi, trois notions ont émergé dans le langage de la finance durable et sont facilement adaptables à l’échelle de l’entreprise.

La première est la notion d’intentionnalité : c’est-à-dire l’expression claire de la volonté de l’entreprise à générer des bénéfices sociaux et environnementaux. La seconde est la notion de mesurabilité : des critères d’évaluation précis et définis au préalable pour pouvoir évaluer concrètement ces impacts. À cela s’ajoute, la notion d’additionnalité : à savoir la part de l’impact mesuré qui n’aurait pas eu lieu sans l’activité de l’entreprise. En somme, il s’agit d’évaluer le chemin entre l’intention et la concrétisation, et les efforts produits entre temps pour atteindre ces objectifs.

La notion de matérialité peut également être considérée bien qu’elle ne soit pas indispensable : certaines entreprises peuvent avoir un impact, mais qui ne soit pas pour autant tangible. Il est certain qu’il sera plus facile pour une entreprise qui reforeste des écosystèmes abîmés de justifier de son impact que pour certaines startups dont les solutions technologiques visent à accompagner un secteur à adresser des problématiques systémiques, de l’intérieur, en accélérant sa mue. Pourtant, planter des arbres n’a pas forcément plus d’impact positif que de prendre des décisions d’investissement éclairées pour les flécher vers des projets vertueux. Ainsi, l’impact n’est pas l’apanage des entreprises de l’économie sociale et solidaire. L’impact concerne aussi des entreprises technologiques qui facilitent la transition, tout en étant elles-mêmes actrices du changement.

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