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Future of Sustainability | CSRD : reculer pour ne jamais sauter

Les premiers rapports CSRD doivent être publiés d’ici janvier prochain pour les entreprises d’au moins 500 employés. Et pourtant, une fois encore, cette norme de rapport extra-financier fait l’objet d’attaques.

Alors que la Cour de Justice de l’Union européenne vient d’ouvrir une procédure contre 17 pays (oui 17 sur 27) qui n’ont toujours pas retranscrit la régulation dans leur législation nationale, c’est la France, qui était pour une fois bonne élève, qui remet en question cette nouvelle norme.

Michel Barnier, dans une interview au JDD, s’est dit favorable à un moratoire visant notamment à retarder l’application de la CSRD dans l’hexagone. Un nouveau coup de boutoir dans cette réglementation déjà mise à mal dans le rapport Draghi remis le mois dernier. Celui-ci identifiait la CSRD comme l’une des causes de la complexité réglementaire européenne.

Première chose, ce recul proposé par Barnier pose un problème juridique évident : il représenterait une violation manifeste du droit européen et pourrait mettre en difficulté les entreprises qui suivraient ses recommandations. Michel Barnier, jeune premier ministre mais acteur politique engagé depuis des décennies, semble avoir oublié les règles qui permettent à l’Union européenne de fonctionner de concert. Auparavant ardent défenseur des processus européens, comme l’a montré son implacable défense des intérêts de l’UE pendant la triste période du Brexit, il s’attaque cette fois de front à l’un des piliers du Green Deal, pourtant porté par Ursula Von der leyen, issue du même groupe politique que le sien au Parlement européen.

Dans le même temps, les entreprises se préparent depuis des mois à cette échéance. Elles ont déjà commencé à se doter des équipes et outils nécessaires pour répondre aux exigences de la CSRD. Et, faut-il le rappeler, l’Union européenne n’a pas inventé le rapport extra-financier. Cela fait maintenant des années que les entreprises sont soumises à cet exercice, répondant aux exigences de transparence de leurs consommateurs et investisseurs. La CSRD a justement pour objectif de standardiser ces divulgations, en offrant un cadre normatif commun pour la publication des informations ESG. Cela devait faciliter la tâche des entreprises, qui se doivent régulièrement répéter cet exercice en fonction des différents formats qui leur sont demandés.

Traitons maintenant du fond de cette annonce. Au moment de sa nomination, nombreux sont ceux qui ont rappelé les faits de guerre de M. Barnier en matière d’écologie. Ancien ministre de l’environnement d’Edouard Balladur, il est notamment à l’origine de l’inscription du principe de pollueur-payeur dans la loi française, l’un des piliers de notre code de l’environnement. Alors, que s’est-il passé ? Le vent a-t-il soufflé si fort que notre Premier ministre a abandonné ses principes fondateurs pour céder aux sirènes de la démagogie ?

Devons-nous le rappeler, le principe même de lutte contre une supposée écologie punitive a été l’incipit du Rassemblement National pendant la dernière campagne électorale européenne. Était-il donc opportun pour le premier ministre de se servir de cet argument populiste moins d’une semaine après les inondations qui ont ravagé le sud de la France ? Les victimes apprécieront ce sens du timing.

Dans ce contexte, il est important de rappeler que les entreprises, dans leur grande majorité, ont saisi l’importance des normes environnementales. Pour la plupart des grands groupes, ces questions sont désormais traitées au niveau de la direction. Elles savent pertinemment que la crise climatique représente un risque majeur pour leurs activités et leur pérennité. Ce qu’elles attendent aujourd’hui, c’est un cadre clair et prévisible – exactement ce que la CSRD propose. Les circonvolutions incessantes des dirigeants politiques européens autour des normes environnementales ne leur permettent de se fixer un cap.

Pour rappel, en octobre 2022, un rapport de la commission d’enquête parlementaire, ordonné par les Républicains, rendait une conclusion sans équivoque: la perte de souveraineté énergétique de la France sur les 30 dernières années est principalement le fruit de nos errements politiques.

Le rapporteur de cette commission d’enquête était Antoine Armand, aujourd’hui ministre de l’économie et des finances au sein du gouvernement Barnier.


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