Le gouvernement a enfin présenté le très attendu troisième Plan National d’Adaptation au Changement Climatique (PNACC). Et il faut bien admettre qu’après un an et demi de retard, nous nous attendions à quelque chose de plus abouti et plus ambitieux.
Il serait toutefois injuste d’accabler le jeune gouvernement Barnier, qui a au moins eu le mérite de publier ce document à peine 3 mois après son arrivée au pouvoir quand ses prédécesseurs n’ont eu de cesse de repousser l’échéance sous divers prétextes.
Premier constat, ce plan s’appuie sur une trajectoire de référence à +4C° pour la France à l’horizon 2100. Déjà extrêmement inquiétante, cette trajectoire est, selon Christophe Cassou, climatologue et membre du GIEC, “la version optimiste d’un scénario réaliste”. Cette vision “optimiste” donc, aurait déjà des conséquences dramatiques sur la nature, les populations, la biodiversité, les infrastructures.
Rappelons que si la planète a, au cours de son histoire, connu des variations de température, celles-ci s’e sont étalées sur des milliers d’années, laissant aux écosystèmes le temps de s’adapter. Le réchauffement climatique actuel, d’origine anthropique, va à un rythme tel que les écosystèmes n’auront pas cette fois le temps d’évoluer en conséquence et nos sociétés peinent à en anticiper les effets.
C’est pourquoi, au-delà de l’adaptation, ce PNACC doit surtout nous permettre de renforcer notre résilience face aux bouleversements climatiques.
Pourtant, sans aller jusqu’à parler de coquille vide, cet enchaînement de belles promesses manque sérieusement de fond et de fonds. Si le terme “concret” et l’ensemble de son champ sémantique sont répétés inlassablement dans le document de référence transmis par le ministère de la transition écologique, force est de constater que c’est bien de cela que manque ce nouveau PNACC. Les 5 grands axes et 51 mesures qui constituent ce document souffrent d’un calendrier imprécis, d’un budget aux abonnés absents et sont constitués d’une succession de projets d’études et de diagnostics qui cachent difficilement le manque… d’actions concrètes.
Ce premier jet ouvre cependant la voie à une consultation publique et sectorielle, permettant d’affiner la version finale du document, qui espérons-le, devra être publiée début 2025 pour une mise en œuvre immédiate.
Quelques points positifs méritent cependant d’être mentionnés. Le plan prévoit la réalisation d’une cartographie complète des risques naturels sur le territoire français et la mise en place de mesures permettant à chacun de s’assurer à un coût qui reste accessible. Des mesures essentielles pour de plus en plus de français et même certaines communes doublement pénalisés, se retrouvant dans des zones désormais considérées comme à risque et sans possibilité d’assurer leurs biens.
Seul engagement financier chiffré à l’heure actuelle : le fonds Barnier, dédié à la prévention des risques liés aux événements naturels, bénéficiera de 75 millions d’euros supplémentaires pour atteindre 300 millions d’euros. Une goutte d’eau malheureusement compte tenu de l’ampleur des besoins.
Cela ne permettra par ailleurs pas de compenser les coupes budgétaires prévues par le gouvernement dans le PLF 2025 qui, dans sa version initiale, réduit de près de 2 milliards d’euros les fonds alloués à la transition écologique. La Prime Renov, les primes à l’achat de véhicules électriques et le Fonds Vert sont les premières victimes de ces coups de rabot qui, comme l’ont relevé de nombreux acteurs de la société civile, mettent à mal la future applicabilité de ce PNACC. Agnes Pannier-Runacher, actuelle ministre de la Transition Ecologique, est la première à s’en émouvoir, ayant mis sa démission dans la balance en espérant ainsi peser sur les arbitrages en cours.
Enfin, il est demandé à certains acteurs économiques stratégiques, en premier lieu aux grandes entreprises de l’énergie et des transports, de mener des études de vulnérabilité aux conséquences du changement climatique. Les mauvaises langues y verront une forme de dissonance avec les récentes déclarations du premier ministre dans le JDD qui appelait à repousser l’application de la norme européenne CSRD dont l’étude de matérialité doit justement inciter les entreprises à mesurer l’impact du changement climatique sur leurs activités.
Malgré des lacunes évidentes, la publication de ce plan reste une bonne nouvelle. Sa version finale et surtout, les sommes allouées à sa mise en œuvre à l’issue du vote du budget au Parlement sont cependant les seuls critères qui nous permettront de savoir si celui-ci n’est pas une simple campagne de communication gouvernementale.
En attendant, comme l’a justement affirmé le premier ministre, “s’adapter, ce n’est pas se résigner”. L’ONU a annoncé la semaine dernière qu’avec les efforts actuels, la température de la planète pourrait augmenter de 3.1C° en moyenne d’ici 2100, bien loin de l’objectif de 2C° fixé par les Accords de Paris. Plus inquiétant encore, les engagements actuels des Etats ne mèneraient qu’à une baisse de 2.6% des émissions de gaz à effet, loin des 43% visés. Se préparer au scénario du pire ne doit pas nous faire oublier qu’il reste un espoir de limiter les conséquences du changement climatique. La solution est simple, et connue, agir immédiatement pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre et notre impact sur les écosystèmes.
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