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Tribune | Freelance ou CDI ? Pourquoi devoir choisir ?

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A group of three young women and two men of different ethnicities are in a business meeting in a modern day office. A bald man is talking to the group while there are laptops and documents on the table.

Le CEO de Malt, Alexandre Fretti, Co-CEO de Malt, s’interroge dans une tribune pour Forbes France, sur l’opposition faite entre freelancing et salariat, qui lui parait dépassée. 

Aux yeux de l’opinion publique, le salariat a longtemps été perçu comme le seul modèle d’emploi dans la société industrielle. Poussé par le patronat il y a un siècle, longtemps combattu – ironie de l’histoire –  par les syndicats qui y voyaient une forme d’asservissement du travailleur envers son employeur, le salariat a culminé au milieu des années 2010. Depuis lors, il perd progressivement du terrain. En 2015, le taux de salariés dans la population employée française a atteint 92%. En moins de dix ans, il est tombé à 88%. Durant cette même période, le nombre d’indépendants a doublé. On les estime aujourd’hui à environ deux millions en France. Malgré tout, notre pays n’est pas le plus avancé dans cette transformation : aux Etats-Unis, par exemple, 36% des actifs sont aujourd’hui indépendants. Ils devraient être 50% à horizon 2027.

Au sein même du monde des freelances, de fortes transformations sont à l’œuvre. Trop souvent, on associe indépendant à précarité, on l’associe au modèle des plateformes donneuses d’ordre, pourvoyeuses de missions ponctuelles (taxi, livraisons de courses, etc…) qui mettent les indépendants en compétition et instaurent de facto une pression sur les prix. Mais à cette “Gig economy” répond aujourd’hui l’économie du talent : on recherche l’indépendant pour ses compétences particulières. C’est lui qui fixe ses tarifs et qui décide ou non de travailler pour tel ou tel client en fonction de ses propres qualités professionnelles et appétences personnelles.

La notion de choix est cruciale. D’après l’étude annuelle « Freelancing in Europe » que nous venons de publier chez Malt, qui a interrogé plus de 5 000 freelances utilisant sa plateforme, 90% des freelances ne cherchent pas de CDI. Un monde qu’ils connaissent bien puisque 93% d’entre eux ont été salariés à temps plein par le passé, dont plus de la moitié avec plus de sept ans d’expérience. Mieux : les deux tiers d’entre eux sont devenus indépendants en raison d’une motivation personnelle et non dû à des facteurs externes, démontrant qu’il s’agit d’un choix de carrière assumé.

Autre mythe, la précarité supposée des freelances. Aujourd’hui, près des trois quart des freelance estiment gagner mieux ou autant leur vie que quand ils étaient salariés à temps plein. Enfin, les freelances consacrent en moyenne quatre à six heures par semaine au développement de leurs compétences pour rester compétitifs et mettre en avant la nature disruptive de leur travail. Preuve que s’ils ont choisi le freelancing pour avoir plus d’autonomie, de liberté et moins de règles, ils n’en sont pas moins totalement intégrés aux évolutions de leur métier.

Pour toutes ces raisons, il n’y a plus lieu d’opposer le monde du salariat à celui de l’indépendant. Il faut même tout faire pour les relier

Autrefois présenté comme un mercenaire, le freelance est devenu un missionnaire, prêt à s’engager pour son client. Ce qui oblige l’entreprise à changer son approche en parallèle : elle sollicite les freelances pour acquérir des compétences pointues en externe, non plus pour combler un manque de ressources. De fait, les freelances de Malt sont présents sur les 25% des emplois les plus disruptés sur le marché du travail et sont ainsi capables de répondre aux besoins précis des entreprises. 64 % estiment même avoir des compétences plus spécifiques que leurs clients. Ils représentent donc une ressource précieuse et rare pour les entreprises qui en ont pleinement conscience et n’hésitent plus à faire appel à eux.

Nombreuses sont celles qui mixent ainsi les équipes sur des projets complexes, entre collaborateurs internes et externes. Et elles apprécient la fidélité grandissante des freelances à leur égard. Depuis 2022, d’ailleurs, la part des missions des freelances réalisées pour les grandes entreprises a ainsi bondi de 55% en Allemagne, 73% en Allemagne et 220% en Espagne.

Bien sûr, tout n’est pas simple pour les indépendants. Se posent encore de nombreuses questions en terme de droits attachés aux salariés (formation, santé) qui ne sont pas forcément accessibles avec les mêmes avantages aux indépendants. Il est curieux d’ailleurs qu’à l’heure où l’on évoque une nouvelle réforme du marché du travail, avec un recours accrû à la flexibilité (semaine de 4 jours), le mot même de freelance reste dans l’angle mort des discours publics. De même que le freelancing peut offrir une formidable réponse au besoin crucial d’augmenter le taux d’emploi des seniors. Ces derniers représentent un réservoir idéal pour devenir les freelances de demain justement parce qu’ils possèdent une expertise rare. Quelques grandes entreprises ont compris l’enjeu et se saisissent de ce thème qui leur permet de gérer en douceur les transitions de leurs pyramides d’âge. Les pouvoirs publics seraient bien inspirés, eux aussi, de se saisir de ce thème.

Alors, CDI ou freelance ? Finalement, plus besoin de choisir. Le changement est à l’œuvre, partout dans nos territoires. Et la bonne nouvelle, c’est qu’il est souhaité autant par les entreprises que par les travailleurs.


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