Érigée en priorité du quinquennat actuel autant que du dernier, la réindustrialisation de la France n’est, pour l’heure, pas au niveau souhaité. Au-delà des moyens techniques et financiers à déployer, il nous faut retrouver l’amour pour notre industrie. Autrement dit : la rendre attractive et souveraine grâce à l’innovation, notamment via la digitalisation.
Une contribution de Guillaume Charpentier, Responsable des offres filières de 4CAD Group.
Une réindustrialisation qui doit s’accélérer
Disons-le, malgré les quelques signaux positifs, on ne peut pas dire que la vague de réindustrialisation soit massive au sein de notre pays. Quelles que soient les raisons, le constat est sans appel : l’industrie française est encore peu attractive ou compétitive. Le rapport création/fermeture d’usines progresse doucement mais reste timide et peu d’activités délocalisées retrouvent leur place sur le territoire français. De manière symptomatique, se pose la question du financement, avec des réponses actuellement insuffisantes : le plan France 2030 semble prometteur mais nécessite du temps pour être déployé, tandis que le manque d’investisseurs privés entrave l’attrait réel du secteur industriel.
Néanmoins, la responsabilité de la réindustrialisation ne doit pas être portée seulement par les institutionnels, les entreprises du secteur industriel et les investisseurs privés. Il nous faut impliquer tout le monde, du système éducatif à la formation pour créer de nouvelles compétences dédiées à notre industrie. Les sociétés du numérique dans la projection et l’accompagnement des industriels vers l’industrie 4.0 ont également un rôle à jouer. Plus qu’un retard, nous avons une dette à combler. Et il est impératif que nous réaffirmions notre leadership de nation industrielle en mobilisant l’ensemble des acteurs.
Le digital, une étape incontournable pour y arriver
Depuis plusieurs décennies, l’industrie n’attire plus. Son image vieillissante et affaiblie n’encourage en rien les vocations et donc la création de nouvelles compétences à même de favoriser l’innovation. Notre industrie n’est pourtant pas celle dépeinte dans Germinal, loin de là. Notre industrie est celle des investissements dans la R&D, des technologies de pointe et de l’excellence opérationnelle. Tout comme les métiers liés à la data, à l’intelligence artificielle et à d’autres technologies, nous devons promouvoir ces compétences pour valoriser les atouts de ce secteur. En effet, l’industrie ne pourra se déployer sans une digitalisation efficace et complète. Repenser les processus de production en intégrant le digital revient à produire mieux, plus vite et partout à proximité de nos clients. Miser sur le numérique est également une façon d’améliorer la formation en captant et en restituant plus simplement, sur divers supports, le savoir des anciennes générations aux nouvelles. Et comment ne pas évoquer le cas de l’éco-conception qui, via le digital et la simulation de modèles physiques notamment, permet de réduire et de mieux sourcer les quantités de matières premières nécessaires à la production.
Dans un marché mondial tourné vers la servicialisation (facturation à l’usage et non à la possession), la maitrise des nouvelles technologies de connectivité permet d’être à l’avant-garde de cette mutation. De même, la réduction du time to market grâce aux outils digitaux permet de proposer aux clients de nouveaux services innovants et différenciants. Autant de leviers qui doivent nous amener à rendre concrète la souveraineté industrielle après laquelle notre classe politique court depuis tant d’années.
Le made in France, un argument choc ?
Suivant la logique de souveraineté industrielle, il sera compliqué de faire aboutir cette réindustrialisation si les habitudes de consommation priorisent encore et toujours les produits venant d’ailleurs. Certes, les prix restent la métrique la plus importante aux yeux des consommateurs mais les acteurs du secteur ont tout intérêt à communiquer davantage auprès des Français pour les sensibiliser aux enjeux et défis auxquels notre industrie fait face. Cette stratégie « made in France » permettra aux industriels de financer leur mutation digitale et de redevenir compétitifs sur le marché mondial, tout en créant des entreprises industrielles locales afin d’en faire de véritables bassins d’emplois, créant ainsi un véritable cercle vertueux.
La route est encore longue mais nous disposons de solutions. Toutefois, les moyens, notamment en matière de communication, devront être mutualisés en désignant des fers de lance à même de porter les valeurs et les qualités au plus près des Français. Dans tous les cas, l’industrie française doit rallier les consommateurs à sa cause pour faire aboutir la réindustrialisation et la pérenniser. Il en va de la survie de notre modèle industriel.
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