Comme tous les ans, les rapports de l’IGGN et l’IGPN sur les activités en 2021 sont désormais disponibles. Que nous disent-ils de la société aujourd’hui et de la sécurité en France ? Pourquoi certains équipements des forces de l’ordre, notamment les caméras-piétons, ne sont pas encore mentionnés dans ces études ?
Avant toute chose, il faut saluer la transparence des différents services. Ils fournissent un travail indispensable pour améliorer la sécurité des populations et des agents sur le terrain.
Si ces rapports permettent de faire le point sur l’année écoulée en matière de sécurité intérieure, il est important de noter qu’ils pourraient être plus exhaustifs en matière d’analyse de tout ce qui constitue l’écosystème de la sécurité. En effet, l’augmentation de l’utilisation d’armes de force intermédiaire telles que le pistolet à impulsion électrique (PIE) est une bonne nouvelle. Cela montre non seulement que ce type de matériel est de plus en plus accepté par les agents et utilisé, en revanche, quid de l’utilisation des caméras-piétons et de l’impact des vidéos captées tant sur le plan déontologique pour les agents que sur le plan judiciaire pour prouver la réalité des faits ?
Pour une harmonisation des formats
En fonction des évolutions et des nouvelles technologies adoptées d’une année sur l’autre, de nouveaux chiffres et de nouvelles statistiques viennent heureusement enrichir les rapports. Toutefois, il est regrettable que certaines données ne soient pas mentionnées dans l’un alors que le second en fait une analyse chiffrée très complète, concernant notamment le PIE. Cela empêche ainsi les comparaisons pour une compréhension plus exhaustive de l’évolution du métier et une analyse du contexte dans lequel les agents exercent leur profession.
En effet, les policiers et les gendarmes ont des équipements similaires à leur disposition, c’est le cas des caméras-piétons et des PIE par exemple. Une harmonisation des chiffres analysés concernant ces matériels permettrait de mieux se rendre compte de leur utilisation au quotidien par les agents d’une part mais aussi sur leur potentiel dissuasif.
La surveillance d’un écosystème de sécurité incomplet
Au sein de la Police nationale, l’utilisation des PIE a été multipliée par cinq entre 2014 et 2021 et la dotation des équipes a été multipliée par sept pour un taux d’efficacité de 94 %. Les blessures des suites de leur utilisation sont rares ; de l’ordre de 0,03 % sur 2 699 utilisations. Par ailleurs, dans 75 % des cas d’utilisations, le PIE ne l’a pas été en mode tir.
Autre précision qui ne figurait pas dans le rapport 2020, en 2021 l’arme de poing a été utilisée en mode dissuasif avec 18 tirs en direction du ciel ou du sol. Selon le rapport : « Cette hausse témoigne de l’importance pour les effectifs de police d’être dotés de façon individuelle d’armes de force intermédiaire, comme le pistolet à impulsion électrique (PIE), qui dispose d’un mode dissuasif par pointage laser. »
Difficile en revanche de faire un état des lieux pour la gendarmerie car les chiffres concernant le nombre de dotation et le nombre de fois où le PIE a été utilisé ne sont pas communiqués. La seule information rassurante concerne le nombre de blessés : deux personnes.
Il est toutefois indispensable de rappeler qu’un équipement complet de sécurité va au-delà d’un gilet par balle et d’une arme (qu’il s’agisse d’une arme à feu, un PIE, un bâton…). En effet, les images font partie intégrantes du quotidien des agents et des contrevenants. De fait, l’usage des caméras notamment devrait être pris en compte dans les indicateurs à suivre. La sécurité implique aussi bien de répertorier le nombre d’agressions, les manquements déontologiques, le nombre de sanctions mais aussi le contexte dans lequel les faits se sont produits. Et pour en rendre compte, quoi de plus parlant que les vidéos ?
Le stockage « en local » est-il la cause du manque d’information ?
La loi encadre et permet l’utilisation des images captées par les caméras. Alors, pourquoi les rapports ne contiennent-ils pas encore ces analyses chiffrées ? Il serait pourtant intéressant de voir, par exemple, le nombre de vidéos captées, le nombre de vidéos ayant permis de révéler la vérité, ou encore si la présence des caméras a permis d’apaiser des situations et donc d’éviter de faire usage d’une arme. Les caméras-piétons ne sont mentionnées que deux fois dans chacun des rapports. Soit comme axe d’amélioration possible de l’écosystème (rapport IGPN), soit pour expliquer ce qu’elles sont et la façon dont les vidéos sont traitées par la suite, mais aucun chiffre n’est disponible (rapport IGGN). Elles sont pourtant déjà déployées au sein des deux services.
De notoriété publique les agents sur le terrain passent du temps à traiter des questions administratives notamment pour partager des preuves numériques, et en particulier lorsque que ces dernières ne sont pas disponibles pour un partage sans friction. Est-ce le cas pour les vidéos alors même que le partage rapide et sécurisé des preuves est au cœur des besoins, aussi bien pour l’exécutif que pour les impératifs judiciaires ?
Quoi qu’il en soit, nul doute que la mise à disposition et l’utilisation de matériel de sécurité fiable contribue à aider les agents sur le terrain au quotidien. Et l’état des lieux que dressent ces deux rapports est rassurant pour l’avenir de la sécurité des personnels et des agents en France malgré un contexte social difficile.
Sources :
Tribune rédigée par Cathy Robin, Directrice Axon, France, Belgique, Afrique, Europe de l’Est et Centrale
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