Après s’être retirée du nord de l’Ukraine à la fin du mois de mars et au début du mois d’avril, l’armée russe meurtrie – qui a perdu jusqu’à 15 000 soldats tués et des dizaines de milliers de blessés – s’est réorganisée et redéployée. À l’Est.
Depuis un mois maintenant, les Russes ont concentré leurs efforts sur un petit secteur du champ de bataille dans la région de Donbass. Leur objectif : encercler et isoler la garnison ukrainienne de Sievierodonetsk, la dernière ville sous le contrôle de Kiev sur la rive orientale de la rivière Siverskyi Donets.
Les choses ne se passent pas très bien pour les Russes. Les Ukrainiens auraient contre-attaqué et annulé certains des gains récents des Russes dans cette ville industrielle de plus en plus dévastée, qui comptait 100 000 habitants avant la guerre.
Dans la mesure où la prise de Sievierodonetsk est devenue le principal objectif à court terme du Kremlin en Ukraine, la contre-offensive ukrainienne pourrait être désastreuse. Le président russe Vladimir Poutine espérait apparemment une victoire décisive, bien que de faible ampleur, afin de consolider le soutien interne faiblissant pour sa guerre coûteuse. Alors que l’armée ukrainienne tient bon à Sievierodonetsk, une victoire rapide et facile pour la Russie semble de plus en plus improbable.
Pendant deux semaines, fin mai et début juin, il semblait que les Russes étaient en train de gagner la bataille de Sievierodonetsk. Des bataillons de l’armée russe, renforcés par des séparatistes ukrainiens et des mercenaires du groupe Wagner, ont attaqué le nord-ouest de Popasna, à 24 kilomètres au sud de Sievierodonetsk.
Des barrages d’artillerie russes incessants ont dégagé un chemin pour les attaquants. Jusqu’à une centaine de soldats ukrainiens sont morts chaque jour alors que les Russes avançaient sur près de la moitié de la partie de territoire ukrainien de 48 kilomètres de large, du nord au sud, ancrée à l’est par Sievierodonetsk.
Pendant ce temps, les troupes russes et alliées ont directement attaqué les banlieues résidentielles de Sievierodonetsk par le nord, l’est et le sud. La colonie de Metolkine, au sud-est de la ville, est rapidement tombée. Vers le 30 mai, la garnison ukrainienne a battu en retraite. Certaines troupes se sont retranchées autour d’une usine chimique tentaculaire dans le nord de Sievierodonetsk. D’autres se sont repliées sur le dernier pont intact reliant Sievierodonetsk à Lyssytchansk, sa ville jumelle située sur la rive ouest, plus élevée, du fleuve. Pour le Kremlin, la victoire était imminente. Du moins, c’est ce qu’il semblait.
En fait, les Russes n’ont pas réussi à mettre en place les conditions d’une victoire durable à Sievierodonetsk. Une tentative de traverser le fleuve Siverskyi Donets sur le côté nord s’est soldée par un désastre pour les Russes début mai lorsque l’artillerie ukrainienne a surpris deux ou trois bataillons russes sur les rives du fleuve et les a détruits, tuant jusqu’à 400 Russes.
L’attaque russe le long de l’axe de Popasna s’est rapidement arrêtée. Cela a laissé ouverte une route critique pour les Ukrainiens. Cette route, qui relie Kramatorsk à Sievierodonetsk via Siversk, a permis à Kiev de renforcer et de réapprovisionner ses troupes dans et autour de Sievierodonetsk.
L’armée ukrainienne a déplacé une partie de sa meilleure artillerie vers l’est pour contrer les canons russes, plus nombreux. Dans une démonstration spectaculaire de « contre-batterie » d’artillerie, les artilleurs ukrainiens ont localisé et mis hors d’état de nuire l’une des armes les plus puissantes des Russes – un mortier 2S4 de 240 millimètres – après que les médias russes ont diffusé une vidéo du mortier en action.
« Les forces ukrainiennes ralentissent les opérations russes visant à encercler les positions ukrainiennes dans l’oblast de Louhansk et à prendre d’assaut Sievierodonetsk grâce à des contre-attaques locales prudentes et efficaces et à la défense de l’ouest du Siverskyi Donets », explique l’Institute for the Study of War de Washington.
Le tournant s’est produit la semaine dernière. Les forces ukrainiennes qui occupaient les hauteurs de Lyssytchansk ont tiré sur les troupes russes à Sievierodonetsk. La légion étrangère volontaire d’Ukraine – des vétérans étrangers combattant pour Kiev – a pris pour cible Metolkine occupée.
« Au cours des dernières 24 heures, les forces ukrainiennes ont contre-attaqué dans la ville contestée de Sievierodonetsk, dans l’est de l’Ukraine, freinant probablement l’élan opérationnel que les forces russes avaient acquis en concentrant leurs unités de combat et leur puissance de feu », a rapporté dimanche le ministère britannique de la Défense.
Dans une action surprise ce week-end, le président ukrainien Volodymyr Zelensky s’est glissé à Lyssytchansk pour rencontrer les troupes. Le fait que Zelensky et sa garde rapprochée aient pu entrer et sortir de la ville en toute sécurité souligne la durabilité des lignes de communication de l’Ukraine dans la poche de Sievierodonetsk.
La bataille pour Sievierodonetsk se poursuit. Les Ukrainiens ont peut-être le vent en poupe, mais cela pourrait facilement changer. Il est important de noter, cependant, que Sievierodonetsk est plus important pour la Russie que pour l’Ukraine.
En fait, l’armée ukrainienne n’a délibérément pas déployé toutes ses forces disponibles dans la poche de Sievierodonetsk. Elle a retenu certains de ses bataillons et a attendu. Une fois que les Russes ont déplacé tous leurs meilleurs bataillons vers l’est, les forces ukrainiennes ont contre-attaqué dans le sud.
Le 27 mai, les troupes ukrainiennes ont traversé la rivière Inhulets près de Davydiv Brid, au nord-est de Kherson, occupée par les Russes, sur la côte de la mer Noire. Au cours d’une semaine de durs combats, les Ukrainiens ont lentement établi un cantonnement sur l’autre rive de la rivière.
C’est un long chemin de là à Kherson – 64 kilomètres. Mais pour l’armée ukrainienne, la traversée du fleuve est la première étape, sans doute la plus difficile, d’une éventuelle marche sur Kherson, qui comptait près de 300 000 habitants avant la guerre.
Le Kremlin a parié gros sur un effort maximal pour atteindre un objectif minimal : la prise de Sievierodonetsk. On peut se demander si la prise de la ville orientale vaut vraiment la peine pour les Russes, surtout si cela signifie qu’ils risquent de perdre leur emprise sur Kherson.
Article traduit de Forbes US – Auteur : David Axe
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