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Les écoles supérieures privées à la croisée des chemins face à l’érosion des soutiens financiers

Les écoles supérieures privées à la croisée des chemins face à l’érosion des soutiens financiers

Les écoles supérieures privées occupent une place importante dans le paysage éducatif français. Elles incarnent une alternative aux filières publiques souvent engorgées. Cela est particulièrement vrai dans le contexte actuel de Parcoursup, où de nombreux étudiants se retrouvent déçus par l’absence de places dans les formations de leur choix. En 2024, sur 849 000 candidats, 124 000 n’ont reçu aucune proposition en réponse à leurs vœux, une hausse par rapport à 2023. Ces écoles privées représentent souvent une solution pour rebondir.

Une contribution de Damien Jordan, directeur général délégué de l’IPSSI, école d’informatique et cybersécurité

 

Pourtant, ces établissements traversent aujourd’hui une période de turbulences sans précédent. Ils sont fragilisés par la baisse des soutiens financiers provenant de France compétence qui gère le budget des OPCO et les montant des aides à l’embauche d’alternants. Cette situation, si elle persiste, risque de remettre en question leur modèle économique et leur capacité à remplir leur mission éducative.


 

Une conjoncture économique difficile

 

Depuis plusieurs années, le financement des écoles supérieures privées repose en grande partie sur trois piliers : les frais de scolarité payés par les étudiants et leurs familles, les contributions des entreprises partenaires à travers le budget de leur OPCO qui provient lui des taxes de l’URSAAF ou du MSA et, dans une moindre mesure, les subventions publiques locales.

Cependant, chacun de ces piliers montre des signes d’essoufflement.

Les aides à l’embauche d’alternants sont revus périodiquement à la baisse avec par exemple la suppression de l’aide pour les contrats pro et la revue à la baisse récente pour les contrats d’apprentissage. De fait et en plus de contraintes budgétaires accrues, les entreprises réduisent les embauches d’alternants. Parallèlement à cela, les prises en charge de formations, même sur des secteurs en forte tension comme la cybersécurité ou l’intelligence artificielle, observent des baisse significative allant jusqu’à 20%.

Malgré ces défis, de nombreux établissements privés ont choisi de ne pas augmenter leurs frais de scolarité . Cette décision, bien que louable, les place dans une situation financière périlleuse alors que leurs charges ne cessent d’augmenter : loyers, salaires des enseignants, maintenance des infrastructures et investissement dans les nouvelles technologies, energies,etc. Il est essentiel de rappeler que, si elles remplissent une mission éducative, les écoles privées restent des entreprises, devant équilibrer leurs comptes pour survivre.

À cela s’ajoute la concurrence accrue entre écoles pour attirer des subventions publiques qui, elles aussi, diminuent sous la pression des restrictions budgétaires. Le soutien des collectivités locales, souvent déterminant pour les écoles implantées en région, tend à se raréfier.

 

Des conséquences multiples sur la qualité de l’enseignement

 

La baisse des ressources impacte directement la capacité des établissements à maintenir la qualité de leur offre pédagogique. Les recrutements d’enseignants qualifiés deviennent plus difficiles, l’ouverture de nouveaux campus est plus complexe et les projets innovants sont souvent reportés ou annulés. Ces limitations peuvent entraîner une baisse de la compétitivité des diplômés sur le marché du travail, nuisant ainsi à la réputation des écoles.

Par ailleurs, les écoles risquent de renforcer une stratégie d’augmentation des frais de scolarité pour compenser les pertes, au risque de devenir inaccessibles pour une partie croissante des étudiants. Un tel cercle vicieux pourrait creuser davantage les inégalités sociales dans l’accès à l’enseignement supérieur.

 

Une adaptation nécessaire mais complexe

 

Face à ces défis, les écoles supérieures privées n’ont d’autre choix que de s’adapter. Cela passe par une diversification des sources de financement. Certaines écoles explorent de nouvelles voies, telles que le développement de formations en ligne, la création de cursus courts plus accessibles ou encore la mise en place de partenariats internationaux.

Cependant, ces initiatives demandent du temps et des investissements initiaux que de nombreux établissements ne peuvent se permettre. D’autres initiatives, comme le renforcement des dispositifs de bourses ou la création de fonds solidaires, méritent également d’être explorées.

La question du financement des écoles privées ne peut être laissée à la seule initiative des établissements. Une réflexion collective impliquant l’État, les entreprises, les établissements et les étudiants est indispensable pour imaginer un modèle soutenable.

Les entreprises doivent être encouragées à investir dans la formation, élément clé de leur compétitivité à long terme. L’État, de son côté, pourrait reconsidérer les modalités de redistribution de la taxe d’apprentissage afin de mieux soutenir les établissements qui préparent à des métiers stratégiques.

Enfin, une communication renforcée sur l’impact des écoles privées dans la formation des talents de demain pourrait contribuer à revaloriser leur rôle et à mobiliser de nouveaux soutiens.

 


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