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L’école française : une fabrique d’inégalités

« On sait désormais que l’on obtient bien plus d’un élève qui prend plaisir à apprendre que d’un autre qui n’étudie que par pure contrainte. Des chercheurs de l’université de Cambridge ont ainsi démontré dans une étude récente que la lecture pour le plaisir participe à la réussite scolaire des enfants et améliore la santé mentale[4]. Tirer pleinement les conséquences de cette découverte implique de concevoir des cours plus ludiques et concrets. »

Une contribution de Etienne Porche, co-fondateur et CEO Les Sherpas

 

Notre système éducatif se targue de défendre l’égalité des chances, mais les chiffres sont là: 63 % des parents le jugent inéquitable[1]. L’école française telle que nous la connaissons aujourd’hui est une véritable machine à reproduire les inégalités sociales. Alors que les enfants de cadres trustent les diplômes, ceux des classes populaires restent sur le carreau. Cette situation est-elle une fatalité ? Absolument pas ! Il est grand temps de briser ce cercle vicieux en osant une révolution pédagogique. La clé ? Remettre le plaisir d’apprendre au cœur de l’éducation. Contrairement à ce que l’on peut penser, réussite et plaisir ne sont pas antinomiques. Bien au contraire ! Il est urgent que notre futur gouvernement repense notre approche de l’enseignement pour enfin offrir à chaque élève, quel que soit son milieu, une véritable chance de s’épanouir et de réussir.

 

Le mythe de la méritocratie à la française

Alors que seulement 37% des parents considèrent que le système scolaire français garantit à chaque enfant la même chance de réussir, nos politiques ne peuvent plus se voiler la face : notre école est bien en crise[2]. Quand on constate que 67 % des enfants de cadres obtiennent un diplôme du supérieur contre seulement 33 % des enfants d’ouvriers ou d’employés[3], peut-on parler d’égalité des chances ? Notre système éducatif, loin de gommer les différences sociales, les accentue. Il est grand temps de se poser les vraies questions : pourquoi l’école française est-elle incapable d’impliquer tous les élèves dans l’apprentissage, quel que soit leur milieu ?

 

Stop à l’école des initiés

Le problème est systémique : notre école repose sur des codes implicites que seuls les initiés maîtrisent. Ficher, réviser, disserter… autant de compétences qui ne sont pas enseignées par les professeurs, mais supposées acquises. Résultat ? Ceux qui n’ont pas la chance d’avoir des parents issus de catégories socio-professionnelles aisées, ou d’étudier dans des établissements élitistes aux méthodes rigoureusement définies, se retrouvent complètement dépassés. Cessons cette omerta et enseignons ces savoir-faire à tous les élèves pour leur donner les mêmes chances ! 

 

Osons révolutionner notre pédagogie

Si la méthodologie est un enjeu crucial, elle n’est rien sans envie de travailler. C’est donc celle-ci qu’il faut également stimuler au quotidien. De nombreux élèves ou anciens élèves en échec scolaire ont l’habitude de dire qu’ils n’étaient « pas faits pour l’école ». Et si c’était plutôt elle qui n’avait pas été faite pour eux ? C’est la question que l’on est en droit de se poser au regard de la pédagogie souvent austère et excessivement abstraite qui prévaut en France, et qui peut détourner les élèves les moins disposés à s’y adapter.

On sait désormais que l’on obtient bien plus d’un élève qui prend plaisir à apprendre que d’un autre qui n’étudie que par pure contrainte. Des chercheurs de l’université de Cambridge ont ainsi démontré dans une étude récente que la lecture pour le plaisir participe à la réussite scolaire des enfants et améliore la santé mentale[4]. Tirer pleinement les conséquences de cette découverte implique de concevoir des cours plus ludiques et concrets. Au lieu de rester abstrait et froid, l’apprentissage des mathématiques pourrait s’appuyer sur leur omniprésence dans le monde qui nous entoure. Un cours de physique décrivant la conception des ailes d’un avion suscitera aussi bien plus d’intérêt qu’un autre qui consisterait à appliquer des formules sur des problèmes théoriques.

 

Choc éducatif : quelles pistes pour revitaliser l’enseignement ?

L’école a aujourd’hui besoin d’un électrochoc ! Adoptons massivement les méthodes qui ont fait leurs preuves ailleurs. La méthode de Singapour en mathématiques ? C’est un excellent début, mais on peut aller plus loin. Pourquoi ne pas s’inspirer des pédagogies Montessori ou Freinet, qui misent sur la curiosité naturelle des enfants ? On peut aussi regarder du côté des pays scandinaves, particulièrement à la pointe sur ces sujets. Il est temps de mettre fin au règne de l’abstraction et du par cœur pour laisser la place au concret et au ludique pour permettre à plus d’élèves de prendre plaisir en cours, et donc de réussir !

 Travailler l’implication des élèves demande aussi de considérer leur position face aux enseignants. Si de nombreuses avancées ont été faites en la matière, le mode privilégié de transmission des connaissances reste basé sur la verticalité et la communication à sens unique dans laquelle un enseignant est actif et transmet un savoir à un élève qui le reçoit passivement. Or, on sait que cette passivité est facteur de démotivation pour de nombreux élèves. Il reste donc beaucoup à faire pour rendre l’enseignement plus interactif, didactique et impliquant, et (re)donner le goût d’apprendre à tous.

La réussite scolaire est loin d’être jouée à la naissance, quel que soit le milieu duquel on est issu. Pour permettre à chacun de réussir, faisons sauter le verrou de cette éducation à l’ancienne, et enseignons largement à nos enfants des méthodologies concrètes et modernes, avec une bonne dose de plaisir au programme. Enseignants, parents, décideurs : refusons l’inertie et exigeons une vraie révolution pédagogique dès maintenant. C’est la solution pour donner leur chance à tous nos enfants !

 


À lire également : L’école de la république doit apprendre à investir

[1] Baromètre IFOP x Les Sherpas – Egalité des chances à l’école – Mai 2024

[2] Baromètre IFOP x Les Sherpas – Egalité des chances à l’école – Mai 2024

[3] Etat de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation en France – 2019/2021

[4] Early-initiated childhood reading for pleasure: associations with better cognitive performance, mental well-being and brain structure in young adolescence – Juin 2023

 

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