Elle est l’ancienne « madame Cinéma » de Canal+, certes, mais Isabelle Giordano a marqué plus que le seul paysage audiovisuel français. Véritable philanthrope et pionnière en la matière, la journaliste voue aujourd’hui sa vie à changer le monde. Déléguée générale de la fondation BNP Paribas et responsable du mécénat du groupe, elle mène une quête ardue pour l’impact et le changement systémique avec l’écosystème philanthropique français et international.
Un article issu du numéro 28 – automne 2024, de Forbes France
D’une mère guadeloupéenne et d’un père italien, Isabelle Giordano grandit en région parisienne avant de faire ses classes à Sciences Po. À 22 ans, passionnée par le fait de « raconter des histoires », elle devient journaliste pour la presse écrite, avant de rejoindre le paysage audiovisuel dans sa première émission, Histoire d’un jour. À 20 h 30, elle raconte des histoires sur le pouvoir du cinéma, qui pour elle fait état du monde et des relations humaines. Sa première apparition à la télévision a lieu dans l’émission Bouillon de culture de Bernard Pivot dans les années 1980 sur Antenne 2. On la retrouve ensuite dans Demain, avec Michel Denisot, et Scrupules sur Canal+ durant l’été 1990. En 1991, elle retourne chez Canal+ comme présentatrice et rédactrice en chef du Journal du cinéma jusqu’en 2002. Toujours sur Canal+, à partir de 1997, elle présente, en plus de son émission quotidienne, un rendez-vous hebdomadaire, Allons au cinéma ce week-end, qui accueille des critiques de cinéma de renom.
Créer de l’impact vers un changement systémique
De 2006 à 2011, Isabelle Giordano présente et produit Service public sur France Inter, qui lui confère une réelle appétence pour la philanthropie. Une expérience « d’éducation populaire », qu’elle qualifie de pré-configuration de ce qu’elle fait aujourd’hui. En effet, entre la culture, l’art et les relations humaines, la journaliste est sur tous les fronts. « J’aime regarder les gens dans les yeux et essayer de les comprendre pour mieux les aider. » C’est dans cette optique que l’ancienne animatrice de radio s’intéresse au monde associatif, jusqu’à créer sa propre association en 2006. Celle-ci, Cinéma pour tous, organise des projections de films pour « ouvrir les portes du 7e art aux adolescents » dans les quartiers défavorisés, à Paris, Lille, Lyon, Rouen et leurs périphéries. Depuis 2018, l’association a rejoint L’Ascenseur, nouveau lieu engagé et véritable « QG de l’égalité des chances ». Pour Isabelle Giordano, il s’agit du premier tiers-lieu en Europe consacré à la formation de la jeunesse, symboliquement installé à côté de la Bastille. « La philanthropie est une autre manière d’avoir un rapport au monde, et d’essayer de l’améliorer avec humilité », explique-t-elle.
À partir de 2013, Isabelle Giordano passera six ans à la tête d’UniFrance, organisme chargé de la promotion du cinéma français à l’étranger, avant de participer à la création du pass Culture après la crise du Covid qui fait naître en elle une envie de se rendre toujours plus utile. Elle se tourne alors vers des fondations, comme la fondation Rolex, la fondation Obama ou encore la fondation Gates. Mais c’est celle de BNP Paribas qui lui fera particulièrement écho. « L’impact est significatif dans un groupe international. Si l’on change un peu les choses avec 183 000 collaborateurs qui eux-mêmes vont aider à changer les choses, l’effet boule de neige est considérable dans les 63 pays où BNP Paribas est présent. » Depuis juillet 2021, la journaliste philanthrope est donc déléguée générale de la fondation BNP Paribas, où elle dirige le mécénat désormais sous la direction d’Anne Pointet, directrice de l’engagement d’entreprise de la banque. La fondation s’implique dans le mécénat du groupe selon trois grandes thématiques : la solidarité, avec pour point d’orgue la lutte pour l’égalité des chances et l’insertion sociale ; l’environnement, et plus particulièrement le climat et la biodiversité ; et enfin la culture.
BNP Paribas, une entreprise à vocation philanthropique
Dans son rôle de meneuse au sein de la fondation BNP Paribas, Isabelle Giordano souhaite construire quelque chose d’impactant et stratégique. Mais la tâche est ardue et les crises mondiales éclatent rapidement. Entre la guerre en Ukraine, le tremblement de terre en Turquie et le séisme au Maroc, le monde vit deux rentrées difficiles marquées par l’inflation. Pour l’ancienne journaliste, en charge de la coordination des douze fondations et fonds de dotation qui constituent le mécénat de BNP Paribas, pas question de rester les bras croisés. « Nous avons beaucoup de défis, beaucoup de travail quand on couvre trois champs d’actions que sont la solidarité, l’environnement et la culture», explique-t-elle. Toutes les fondations du groupe ont leur écosystème mais se rejoignent sur les sujets à impact. « Que l’on soit polonais, italien ou allemand, on aide la jeunesse, les femmes, les réfugiés et la planète. Nous avons une responsabilité en tant que grande banque et cet esprit a toujours été présent chez BNP Paribas depuis sa création il y a près de deux siècles. » En effet, le groupe bancaire figure parmi les grands donateurs aux côtés de LVMH. En 2023, BNP Paribas a consacré plus de 110 millions d’euros pour ses actions de mécénat, soit 1,1 % du résultat net part du groupe. Pour la guerre en Ukraine, ce sont 18,5 millions d’euros qui ont été mobilisés en 2022. Les salariés du groupe bancaire sont également très engagés, avec plus de 1 000 collaborateurs qui sont mentors pour la jeunesse. « Il y a un esprit d’engagement qui est dans l’ADN du groupe », affirme Isabelle Giordano. Au sein de la direction de l’Engagement, il y a deux bras armés : le mécénat et la RSE. En ces qualités, le groupe se pose en pionnier puisque c’est la première entreprise dont la direction de l’Engagement est rentrée au sein du Comex. Dans sa feuille de route, la déléguée générale de la fondation cherche avant tout l’impact, le travail en coalition avec le reste de l’écosystème philanthropique et le changement systémique. « On veut réduire, et idéalement éradiquer, les inégalités sociales et le décrochage scolaire. On se fixe des objectifs et on travaille en consortium avec les autres fondations », développe Isabelle Giordano. Pour elle, la fondation BNP Paribas se pose même en incubateur. « La philanthropie est un levier qui permet de transformer la société en profondeur. » Et afin de mener à bien ce combat, elle puise son inspiration dans les fondations anglo-saxonnes, à l’instar de la fondation Gates, qui ne lésinent pas sur les moyens. Un procédé qu’elle applique en Seine-Saint-Denis, notamment, où la fondation BNP Paribas accorde 950 000 euros par an au département pour le programme « Odyssée jeunes » qui s’inscrit dans la durée et qui a permis en quinze ans d’existence à 57 000 collégiens de partir en voyage scolaire en France et à travers le monde, majoritairement en Europe.
La fondation fête ses 40 ans cette année. Un anniversaire significatif qui voit naître d’autres projets de mécénat en faveur de la solidarité, de l’environnement et de la culture. En matière de solidarité, la fondation lance un concept de création de fresques à l’effigie de fondateurs d’associations, de chercheurs et d’artistes soutenus par la fondation BNP Paribas. Car si Kylian Mbappé a eu droit à sa fresque dans sa ville natale, les acteurs du changement méritent la leur dans les villes où ils agissent. Sur un immeuble, une maison, un muret ou même une devanture de gare, l’objectif est de donner à ces personnes une visibilité. Ces fresques seront accompagnées par des événements d’inauguration visant à mettre en avant les personnalités qu’elles illustrent et leur action en faveur du territoire où elles officient. Ensuite, le projet Banlieues opéré par la fondation BNP Paribas apporte son soutien à des associations locales dans les quartiers prioritaires. Depuis 2006, 1 350 associations ont été soutenues et ont bénéficié à 1 300 000 personnes. 35 millions d’euros ont été attribués, dont 10 millions aux initiatives locales. En 2024, la fondation accompagne 450 associations dont 150 nouvelles pour un budget de 1,2 million d’euros. Et en cette période de rentrée, BNP Paribas, grâce à son soutien à L’Ascenseur, un tiers-lieu unique en Europe basé à Bastille à Paris et qui regroupe une vingtaine d’associations qui luttent pour l’égalité des chances, soutient notamment le Choix de l’école, une association qui accompagne la reconversion d’hommes et de femmes au professorat, ainsi que la journée nationale contre le refus de l’échec scolaire, portée par le partenaire historique de la fondation, l’Afev.
Des programmes de grande ampleur comme ceux-ci, c’est ce qui anime Isabelle Giordano dans la poursuite de sa mission à impact. La culture est également une source d’inspiration pour l’ancienne animatrice de télévision, fan de hip-hop (une des nouveautés pour laquelle la fondation est un mécène pionnier) et qui tente de créer des synergies entre les industries culturelles en puisant dans tout ce qu’elle a connu dans sa carrière pour le moins pluridisciplinaire.
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