À quelques jours du début de la Coupe du monde au Qatar, la série-documentaire FIFA : Ballon rond et corruption sur Netflix révèle les dessous controversés de l’attribution du tournoi au Qatar.
« C’est de la frustration », déclare le secrétaire général de la Coupe du monde Hassan Al Thawadi sans sourciller, lorsqu’il est confronté aux accusations de longue date du lanceur d’alerte Phaedra Almajid. Ce dernier affirme que le Qatar a soudoyé Issa Hayatou, Jacques Anouma et Amos Adamu, trois puissants responsables du football mondial, pour décrocher les droits d’organisation de la Coupe du monde 2022. « Ils sont tous intrinsèquement faux, et il y a des faits concrets qui le prouvent. »
C’est l’un des moments les plus marquants de la série-documentaire FIFA : Ballon rond et corruption sur Netflix, qui s’intéresse à la corruption qui a conduit au scandale du Fifagate et à la chute de Sepp Blatter, forme de parrain moderne de la FIFA. Hassan Al Thawadi verse même quelques larmes de crocodile lorsqu’il évoque sa « dépression » après que la FIFA a attribué au Qatar l’organisation de la Coupe du monde en 2010 et que le pays du Golfe s’est retrouvé sous le feu des critiques. Ce n’était que le début : l’indignation est passée des accusations de corruption au traitement lamentable des travailleurs migrants par le Qatar, et les critiques n’ont jamais cessé. Hassan Al Thawadi s’oppose aux accusations d’achat de vote : « Le gaz est ce sur quoi nous construisons notre avenir, nous n’allons pas l’utiliser pour acheter un vote pour la Coupe du monde ».
La série-documentaire sur Netflix explique l’histoire de la corruption au sein de la FIFA de manière exhaustive pour un public mondial, et le fait avec brio. Ricardo Teixeira, Jérôme Valcke et Mohammed Bin Hammam comptent parmi les nombreux intervenants qui viennent enrichir l’histoire, souvent brillamment racontée par les journalistes d’investigation Ken Bensinger (États-Unis) et David Conn (Angleterre). De João Havelange à Chuck Blazer, tous les « méchants » qui ont participé à cette supercherie mondiale sont présents. João Havelange a transformé la FIFA en une entreprise capitaliste mondiale, tandis que Chuck Blazer était l’exemple même de l’officiel sous l’ère Blatter, obsédé par l’enrichissement personnel, agissant depuis une position d’isolation absolue, mais tous ses agissements l’ont rattrapé le 27 mai 2015.
Et que dire des actions de Sepp Blatter, 86 ans. L’éternel survivant était, selon David Conn, « consommé en politique extérieure » et est tombé, non pas à cause de tous les scandales et de la corruption sous sa direction, mais après un paiement sans fondement à Michel Platini, son protégé. Sepp Blatter apparaît comme le vieux méchant de pantomime, autrefois considéré comme un vieil oncle corrompu dans un monde plus centriste. Le sourire de l’ancien patron de la FIFA est toujours aussi malicieux. Il parle ouvertement de la politique politicienne et d’élimination de rivaux puissants. Il ne connaît ni remords ni introspection. Guido Tognoni résume le caractère de son ancien patron : « Blatter ne pouvait pas contrôler son ambition. Il était le véritable Machiavel du sport ».
Le même manque d’introspection s’applique à l’acolyte de Sepp Blatter, Jérôme Valcke, secrétaire général de la FIFA de 2007 à 2015. Interrogé sur tous les scandales et les turbulences, le Français déclare sèchement : « Nous n’étions pas parfaits ».
La série-documentaire a cependant un défaut majeur : elle laisse Gianni Infantino complètement hors de cause. Les producteurs de la série n’examinent pas son bilan et, alors que le président en exercice ne cesse de clamer que la FIFA n’est plus toxique, la réalité est quelque peu différente.
Gianni Infantino excelle dans l’ancien système de patronage. Dans son premier discours en tant que président de la FIFA en 2016, il a déclaré : « L’argent de la FIFA est votre argent ». Quelle douce musique pour les 200 présidents des associations nationales de football présents dans la salle ce jour-là. Cette déclaration a donné le ton à des années de réformes en surface et de poudre aux yeux, on pense notamment à la nomination de Fatma Samoura au poste de secrétaire générale de la FIFA en 2016.
Si l’on met de côté les réformes du système de transfert, Gianni Infantino n’a pas fait grand-chose pour faire le ménage à Zurich : le manque de bonne gouvernance (avec le renvoi de Domenico Scala, Hans-Joachim Eckert et Cornel Borbely) et de transparence persiste. La destination de l’argent de la FIFA pour le développement reste souvent très floue. Néanmoins, tout cela ne devrait pas être une surprise. Peut-être que Gianni Infantino n’est qu’un fonctionnaire du football égoïste de plus dans une longue lignée de méchants. Comme le souligne à juste titre David Conn, la crise actuelle de la FIFA est bien plus profonde : où va le football mondial ?
Article traduit de Forbes US – Auteur : Samindra Kunti
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