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Pas de pénurie de sable en France, juste un accès à la ressource compliqué

Les Français tiennent à leurs industries stratégiques ; parmi elles, les minéraux industriels dont ils ignorent tout et notamment la difficulté d’accès à la ressource au point de soupçonner l’existence d’une pénurie. Voici quelques pistes pour y remédier.

 

Les Français ignorent tout de la richesse de leur patrimoine géologique

 

L’andalousite, les argiles kaoliniques, le carbonate de calcium, la diatomite, les feldspaths, les micas et muscovites, la silice (sable, galets, blocs), le kaolin, le métakaolin, la chamotte, le talc, la dolomie et la phonolite … tous ces minéraux font la richesse de notre sol et sont appréciées des industriels pour leurs propriétés chimiques et physiques. Celles-ci permettent de nombreuses applications, dont certaines sont vitales pour notre quotidien. Des questions légitimes se posent sur la gestion de ces ressources : il est plus que jamais nécessaire d’y répondre afin de ne pas laisser de place aux discours alarmistes, comme par exemple cette rumeur sur le risque d’une pénurie de sable. Qu’en est-il exactement ?

 

Le marché du sable siliceux en France

 

Peu le savent, mais il est important de rappeler que le sable peut être naturel ou fabriqué. On s’intéressera ici à la première catégorie et parmi la dizaine de milliers de types, plus particulièrement, aux sables siliceux – sables qui contiennent plus de 97% de silice – ce qui leur confère des qualités appréciées par les filières industrielles. Le marché français représente une production annuelle de plus de 6,5 millions de tonnes. Notre pays se classe sur la troisième marche du podium des producteurs européens…une production qui occupe une infime partie de notre territoire. En effet, les 50 carrières où sont extraites ces minéraux n’occupent que 0,002% de la superficie de la France…. Autant dire rien du tout si on compare à la superficie des zones natura 2000 qui recouvrent 13 % ou l’agriculture qui représente 60% de la surface nationale. Cet ordre de grandeur fait prendre conscience des préoccupations des pouvoirs publics, mais a-t-on bien saisi les enjeux ?

 

Un minéral stratégique

 

Comme nous le rappelions récemment, si on veut ré-industrialiser la France et faire revenir les entreprises essentielles, comme le souhaite avec justesse France Relance, il faut raisonner en logique de filières. L’exemple du sable est éloquent : avec la pandémie, les Français ont pris conscience de l’importance de produire certains biens indispensables sur le territoire national. C’est le cas notamment avec les médicaments. Si la plupart des politiques se sont précipités sur le sujet pour dénoncer le vide laissé par l’industrie pharmaceutique, aucun n’a pensé à pointer la nécessaire complémentarité des chaines industrielles. Autrement dit, si on veut faire revenir la big-pharma en France, il faut disposer de fournisseurs de verres par exemple, qui les approvisionnent en flacons et ces derniers ont besoin de… sable. Si cette ressource est difficilement accessible, alors cela complexifie la tâche des industriels qui préféreront continuer de produire là où elle est plus facile d’accès…. C’est, sans mauvais jeux de mots, « comme un grain de sable dans la machine ». Quel gâchis, car pour donner un ordre d’idée, il suffit d’une journée de production française de sable sur un seul site pour produire  70 millions de fioles vaccinales! Une paille. 

 

Faciliter l’accès à la ressource

 

Cet argument nous fait prendre conscience à quel point il faut faciliter l’accès aux minéraux industriels. Aujourd’hui en effet il est extrêmement compliqué d’ouvrir une nouvelle carrière. L’industriel qui identifie un gisement passe par un véritable chemin de croix pour arriver à obtenir une autorisation préfectorale. Il doit monter un dossier qui pèse plusieurs kilos ou giga en tenant compte des différentes législations (code du travail, code rural, code forestier, code de l’environnement, code de l’urbanisme, …). Avant de pouvoir ouvrir le site, il peut se passer une dizaine d’années, le temps nécessaire pour accomplir une quantité d’obligations : recherche géologique, sondages, maitrise foncière, compatibilité avec les documents d’urbanisme, diagnostics écologiques, de la concertation, des mesures de compensations forestières, agricoles collectives ou écologiques, parfois démesurées.

 

Sur ce chemin tortueux, on peut rencontrer de nombreuses embuches : insuccès de la négociation foncière, refus des élus d’ouvrir les documents d’urbanisme, en passant par l’impérative gestion de notre précieuse biodiversité, même si, rappelons-le, elle n’est pas menacée par les carrières…. Et si jamais on tombe sur un site archéologique à fouiller alors on peut faire une croix sur le projet. La France n’est pas une exception, il existe d’autres pays où les industriels sont confrontés à une réglementation lourde et parfois ubuesque, mais notre pays est sans doute celui qui impose les normes les plus strictes en la matière ce qui dévitalise l’activité face à la concurrence internationale.

 

Oui, des règles strictes sont nécessaires pour garantir une saine gestion des ressources. Néanmoins à force de rajouter des contraintes et de rendre la tâche difficile aux industriels, ceux-ci finissent par baisser les bras. Le résultat étant que nous devons importer ce que nous ne produisons plus chez nous ou les clients se déplacent hors de France. Si on fait la balance entre le bilan carbone d’une cargaison de sable importée du Maghreb et l’extraction de cette matière première dans notre sol où une quantité de réserves subsiste alors le bon sens nous indique vite de quel côté il faut pencher, d’autant plus quand on sait que 3000 femmes et hommes vivent directement des minéraux industriels et plus d’un million indirectement.

Tribune rédigée par Franck Evanno, dirigeant de la société Fulchiron et président de l’organisation nationale des Minéraux Industriels France.

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