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Sauve-Qui-Peut Sous Les Ors De La République

Commons. Wikipedia

Alors que le crépuscule du quinquennat de François Hollande commence à poindre, de nombreux conseillers élyséens et plus largement dans l’ensemble des ministères de la République songent à leur devenir et ferraillent, dans une ambiance feutrée, pour s’engouffrer dans la moindre brèche susceptible de leur offrir une porte de sortie.

« Lorsque je suis arrivée, on m’a tout de suite dit : « Réfléchis à ta sortie ». L’anecdote peut prêter à sourire mais elle constitue le lot quotidien des conseillers de l’ombre dans les ministères qui 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 demeurent à la disposition d’un supérieur hiérarchique pas comme les autres, qu’il soit secrétaire d’Etat, ministre ou encore président.

« Des petites mains » qui commencent à s’agiter et surtout scruter l’horizon, le quinquennat de François Hollande étant sur le point de trouver son épilogue, la reconversion des uns et des autres devient le sujet majeur dans les couloirs des palais de la République. Car en dépit de la stature, plus ou moins grande, et du carnet d’adresse, plus ou moins épais, du « patron » qui vous emploie, la destinée des uns et des autres peut s’apparenter à un véritable chemin de croix.

« La peur du vide »

« Beauvau, Bercy, Matignon, Quai d’Orsay », Stéphanie Von Euw (Les Républicains), actuellement vice-présidente de la région Ile-de-France détaille par le menu les coulisses de l’antichambre de la République, dans son livre « Les entrailles du pouvoir » (éd. Du Moment). Elle y décrit notamment « la peur du vide » des collaborateurs du président, notamment les collaborateurs politiques, qui sont prêts à se livrer corps et âme pour leur chef, et rester le plus longtemps possible à ses côtés, comme son chef de cabinet, ses conseillers en communication ou encore ses attachés de presse.

Quant à l’inverse, la deuxième catégorie de collaborateurs, en l’occurrence les fonctionnaires, ces derniers seraient davantage enclins à se servir de leurs élogieux états de service auprès de la présidence pour tenter de « rebondir » ailleurs, forts de cette expérience riche en enseignements. Ils réussiront ainsi, comme le raconte Stéphanie Von Euw, à obtenir des postes qu’ils n’auraient guère pu obtenir sans ce passage sous les ors de la République. « Leur passage se compte souvent en mois, avant qu’ils ne retournent dans leur administration d’origine », souligne-t-elle. Néanmoins ce phénomène s’est accéléré ces dernières semaines où de nombreux collaborateurs ont pris la « poudre d’escampette », sentant le souffle chaud de l’alternance caresser leur nuque.

« Recasage organisé »

Ainsi, Laurent Stéfanini, chef du protocole a récemment plié bagage pour devenir ambassadeur français à l’Unesco, tandis que Marie-Hélène Aubert, conseillère du président pour les négociations internationales sur le climat a également quitté le navire au mois de mai dernier, période durant laquelle elle a été nommée inspectrice générale de l’administration du développement durable. Le conseiller agriculture du président, Philippe Vinçon, a, lui aussi tiré sa révérence, nommé par François Hollande, directeur général de l’enseignement et de la recherche. « Un phénomène normal » pour l’Elysée, arguant des changements d’orientation professionnelle naturels au bout de deux ou trois ans passés auprès du président.

Des polémiques vaines

Mais certains « recasages » ont du mal à passer. Dans un milieu où l’on est pourtant enclin à « avaler les couleuvres », certains s’élèvent contre des pratiques d’un « autre temps », un « fait du prince ».  Ainsi, le ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, a usé de toute son influence-et elle est très importante-auprès de François Hollande pour proposer la nomination de son directeur de cabinet, Philippe Maugain, à la tête de l’Institut national de la recherche agronomique (Inra). Les chercheurs de l’Inra se sont ainsi élevés contre cette nomination, soulignant que Philippe Maugain « n’était même pas titulaire d’un doctorat », condition sine qua non pour prendre les rênes de l’institut. Des « remous » qui ont poussé Stéphane Le Foll à se justifier, devant les députés ce mercredi.

« Un haut fonctionnaire qui a servi pendant 30 ans la fonction publique dans le domaine de l’agriculture a-t-il un conflit d’intérêts à assumer une direction d’un établissement public? C’est faux, c’est un mensonge, un procès injustifié », a répondu le ministre aux accusations de nomination illégale. Faisant fi de l’émoi des chercheurs, François Hollande a finalement  saisi les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat de cette « proposition de nomination ». « La République exemplaire » a encore de beaux jours devant elle.

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