Le revenu universel, à l’unanimité
Parmi les mesures économiques les plus emblématiques citées tout de go par les primo-votants, l’une d’entre elles – de manière positive ou négative – est revenue dans toutes les discussions : le revenu universel d’existence proposé par le candidat socialiste en déliquescence, Benoit Hamon. « Pour le meilleur ou pour le pire », cette proposition semble avoir marqué au fer rouge les jeunes électeurs et notamment ceux davantage sensibles aux thématiques relatives au monde du travail comme Sanaa B. 30 ans, franco-marocaine récemment naturalisée, actuellement Portfolio Project Manager au sein de l’une des trois plus grandes banques hexagonales. Elle est la seule à être ce que l’on appelle plus communément une jeune active, et de facto, elle a développé une sensibilité particulière sur cette question du travail, au point « d’exhumer » une autre proposition du candidat socialiste. « J’ai été particulièrement touchée également, outre le revenu universel, par la proposition de Benoît Hamon de reconnaître le burn-out comme maladie professionnelle ».
Mais la jeune femme a également « picoré » dans d’autres programmes puisque les autres mesures ayant particulièrement retenu son attention vont de « l’augmentation de la TVA de 2 %, suppression des 35h et suppression de l’ISF de Fillon » à « la VIe République de Mélenchon », en passant par « l’exonération en 3 ans de la taxe habitation de Macron ». Amel a également son avis sur la question du revenu universel. « Cette proposition est assez inattendue et intéressante à comprendre : en quoi cela pourrait créer un cercle vertueux économique ? ». Mais le temps de la campagne n’était visiblement pas le temps des débats d’idées comme l’analyse Manon, avec son regard d’expatriée. « La gauche a au moins eu le mérite de tenter de relever le débat avec ses idées économiques- dont le revenu universel- mais elles ont été rapidement occultées par les retournements de vestes des socialistes qui lâchaient Benoît Hamon, les uns après les autres ». Un moment fort pour Raphaël, 20 ans, petit frère de Sarah, et actuellement en licence 3 de Philosophie qui, comme sa grande sœur, se rendra dans l’isoloir pour la première fois. « Benoît Hamon a été abandonné en rase campagne par une majeure partie des ténors socialistes qui se sont détournés de lui pour rejoindre Macron, foulant aux pieds les règles de la primaire pour certains. La solitude de cet homme était aussi pour moi un moment charnière de la campagne ».
Terrorisme et handicap, « grands oubliés » de la campagne pour les primo-votants
Difficile dans ce marasme ambiant de peaufiner et ciseler son choix. « J’avoue que je ne sais pas si mon vote ira pour le candidat que j’aurai choisi ou contre celui que je ne choisirai jamais, je n’arrive pas vraiment à me rendre compte », souligne Sanaa B. Mais pour d’autres, cette campagne a néanmoins permis d’affiner son choix après moult tergiversations. « Si vous m’aviez interrogé il y a deux mois, je vous aurai sans doute répondu Emmanuel Macron », développe Sarah. Et de poursuivre. « Mais ces dernières prises de position sur la culture ou sur l’histoire m’ont particulièrement mise mal à l’aise, et j’ai finalement décidé de voter pour François Fillon. Je préfère quelqu’un qui va peut-être nous mener la vie dure -notamment avec les deux points de TVA supplémentaire- mais qui a une certaine éthique et une haute idée de la France ».
Et de déplorer le fait qu’aucun des onze candidats n’ait véritablement parlé de terrorisme et d’islam radical. Un « appel » qui résonne tristement au lendemain de l’attentat des Champs-Elysées revendiqué par l’Etat islamique. « Nous avons tout de même eu 300 ou 400 morts en 2015-2016 et cela personne n’en a parlé et c’est résolument pitoyable. Cela a été totalement passé sous silence durant cette campagne. Tous s’accordent à réclamer plus de policiers et de militaires mais il n’y a aucun raisonnement sur les causes et la manière de véritablement combattre l’islam radical». Autre thématique totalement oubliée dans cette campagne : les problématiques relatives au handicap, comme le regrette Justine, 23 ans, elle-même en situation de handicap. « Le choix est vite fait, si je regarde uniquement ce critère. Le seul qui en parle réellement, c’est Mélenchon (12 millions de français sur 65 millions sont touchés par un handicap (selon l’INSEE). Il propose de baisser les prix sur le matériel médical qui est horriblement, et injustement cher -3 000€ pour un fauteuil et plus de 7 000€ pour des roues motorisée, qui valent seulement 400€ pour un vélo électrique! –
Quoi qu’il advienne, cette campagne aura été riche en enseignements pour ces lycéens, étudiants et jeunes actifs qui vont prendre, pour la première fois, véritablement part et de manière directe au destin de leur pays. Et nul doute qu’ils garderont longtemps en tête – outre le fait qu’il s’agisse de leur « première fois – cette campagne si particulière qui, en dépit de son caractère délétère par certains aspects, ne les aura néanmoins pas dissuadés de jouer le jeu de la démocratie. Et c’est déjà une première victoire.
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