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Pourquoi les entreprises américaines doivent-elles promouvoir une plus grande diversité sur le lieu de travail ?

diversitéLa décision de la Cour suprême des États-Unis de juin dernier est utilisée par les opposants aux programmes de diversité en entreprise pour saper les politiques de discrimination positive dans le monde des affaires. | Source : Pixabay

Une contribution de Michael Posner pour Forbes US – traduit par Flora Lucas

 

DIVERSITÉ | En juin dernier, la Cour suprême des États-Unis a jugé que les politiques d’« affirmative action » à l’admission dans les universités, forme de discrimination positive pour favoriser l’accession aux études supérieures de certains étudiants en fonction de leur origine ethnique, violaient le principe d’égalité entre les citoyens. Alors que la plupart des établissements d’enseignement supérieur n’ont pas encore communiqué leurs profils d’admission pour 2024, les premiers résultats de quelques établissements, notamment du MIT et d’Amherst, suggèrent que la décision de la Cour suprême a réduit le nombre d’admissions d’étudiants afro-américains et hispaniques. Parallèlement, cette décision est utilisée par les opposants aux programmes de diversité en entreprise pour saper les politiques de discrimination positive dans le monde des affaires.

 

Les conséquences de la décision de la Cour suprême

Moins d’un mois après la décision de la Cour suprême, les procureurs généraux de 13 États américains ont écrit aux dirigeants des 100 plus grandes entreprises américaines. Cette lettre invitait les entreprises à mettre fin à « tous les quotas ou préférences illégaux fondés sur la race ». Dans cette lettre, les procureurs généraux ont averti les dirigeants d’entreprise que s’ils ignoraient cette demande, « vous serez tenus pour responsables, tôt ou tard, de votre décision ».

Ces États et d’autres se sont également empressés d’adopter des lois ciblant les initiatives en matière de diversité, d’équité et d’inclusion (DEI) dans les institutions publiques. Au moins 84 projets de loi anti-DEI ont été introduits dans 28 États, dont 12 sont devenus des lois et 13 autres ont reçu l’approbation législative finale.

Certains chefs d’entreprise sont entrés dans la danse, notamment Elon Musk, qui a écrit sur sa plateforme sociale X : « Les initiatives en matière de DEI ne sont qu’une façon détournée pour désigner le racisme. Honte à tous ceux qui en font la promotion. » Il s’est rallié au point de vue plus large de Bill Ackman, fondateur et PDG de Pershing Square Capital Management, qui a dénoncé les programmes DEI en janvier. Selon Bill Ackman, il s’agit d’un « mouvement intrinsèquement raciste et illégal dans sa mise en œuvre, même si les pro-DEI prétendent œuvrer en faveur des soi-disant opprimés ». Si de nombreux dirigeants d’entreprise ne partagent pas son avis, trop peu d’entre eux ont accepté de s’exprimer publiquement pour défendre les programmes de diversité. Ce n’est pas le cas de l’investisseur Mark Cuban, ancien propriétaire de l’équipe de basketball des Dallas Mavericks, qui a écrit que « disposer d’une main-d’œuvre diversifiée et représentative des parties prenantes est bon pour les affaires ».

 

Malgré l’abondance d’études sur les avantages d’un environnement de travail diversifié, plusieurs grandes entreprises font marche arrière

L’affirmation de Mark Cuban est étayée par des études empiriques, notamment une série d’enquêtes réalisées par le cabinet de conseil McKinsey & Co. Dans sa dernière étude, publiée en décembre 2023, McKinsey a constaté que « les entreprises dotées d’équipes de direction diversifiées continuent d’être associées à des rendements financiers plus élevés. Notre ensemble de données élargi montre que cela est vrai dans tous les secteurs et toutes les régions, malgré des défis, des attentes des parties prenantes et des ambitions différents ». L’étude conclut également que « la diversité des dirigeants est également associée de manière convaincante à des ambitions de croissance holistiques, à un impact social plus important et à une main-d’œuvre plus satisfaite ».

Malgré ces conclusions qui soulignent les avantages d’un lieu de travail diversifié, plusieurs grandes entreprises ont récemment réduit leurs engagements en matière de programmes de diversité face à la pression exercée par les activistes conservateurs. En juillet, John Deere, l’entreprise de machines agricoles pesant 100 milliards de dollars, a réagi à une campagne anti-DEI en annonçant qu’elle ne soutiendrait plus les événements de « sensibilisation sociale ou culturelle » et qu’elle vérifierait ses supports de formation pour s’assurer qu’ils sont exempts de « messages à motivation sociale ». En août, le fabricant de motos Harley-Davidson a fait de même, expliquant qu’il n’avait « pas mis en œuvre de programme DEI depuis avril 2024, et nous n’avons pas de programme DEI actuellement. Nous n’avons pas de quotas d’embauche et nous n’avons plus d’objectifs de dépenses en matière de diversité des fournisseurs ». Fin août, la société Ford Motor Co. a annoncé qu’elle renonçait à ses engagements antérieurs en matière de DEI et qu’elle mettait fin à sa participation à une enquête culturelle externe menée par Human Rights Campaign, le groupe de défense des droits des personnes LGBTQ+. Dans un mémo adressé aux employés de Ford, le PDG Jim Farley a tenté de justifier le recul de l’entreprise en écrivant : « Nous sommes conscients que nos employés et nos clients ont un large éventail de croyances. » Le commentaire de Jim Farley suggère que Ford souhaite se tenir à l’écart plutôt que de soutenir un lieu de travail plus inclusif.

Ces entreprises réagissent en partie à l’attention que ces questions reçoivent sur les réseaux sociaux, souvent générée par des bots. Selon Axios, ces bots sont utilisés pour manipuler l’opinion publique et donner l’impression que les initiatives anti-DEI bénéficient d’un soutien populaire plus important qu’il ne l’est en réalité. Guy Tytunovich, PDG de la plateforme de cybersécurité CHEQ, explique que les bots sont conçus pour tromper les algorithmes de recommandation et faire en sorte que certains messages soient considérés comme fiables, pertinents et suffisamment intéressants pour être montrés à un plus grand nombre de personnes.

 

L’exemple de la conférence en Alberta organisée par l’organisation Canada Strong and Free

Un exemple particulièrement frappant concerne le parrainage par une entreprise d’une conférence de réseautage à venir en Alberta, organisée par une organisation conservatrice appelée Canada Strong and Free. La conférence promet une liste « d’intervenants de premier plan et de leaders d’opinion [qui] exploreront des thèmes tels que la responsabilité fiscale, la liberté individuelle et la préservation des valeurs traditionnelles ». L’intervenant principal est Chris Rufo, l’un des principaux instigateurs du tollé suscité par la théorie de la race critique, que le Southern Poverty Law Center a qualifié de « figure de proue de la guerre culturelle anti-LGBTQ+ menée par la droite ». L’approche de Chris Rufo a été illustrée par son rôle en tant qu’administrateur du New College de Floride, poste auquel il a été nommé par le gouverneur républicain Ron DeSantis. Chris Rufo a critiqué la composition de l’établissement, dont les deux tiers des étudiants étaient des femmes. Il a averti que le fait d’avoir autant de femmes que d’hommes transformait le New College en « ce que beaucoup ont appelé un ghetto de justice sociale ».

Ce qui est frappant à propos de cette conférence organisée par Canada Strong and Free, c’est qu’elle reçoit un soutien financier considérable de la part de grandes sociétés cotées en bourse. Meta est un « sponsor en or » et a déclaré au site médiatique Popular Information que « la société sponsorise des organisations des deux côtés de l’échiquier politique et soutient l’organisation Canada Strong and Free depuis au moins dix ans ». Meta affirme n’avoir joué aucun rôle dans le choix des intervenants. Coca-Cola figure également sur la liste des sponsors, mais la société n’a pas répondu aux questions de Forbes concernant son parrainage.

Il est nécessaire de mener des discussions éclairées sur la manière d’élaborer des programmes DEI qui favorisent la réalisation des objectifs de diversité, d’égalité et d’inclusion tout en garantissant l’égalité des chances. La société est mal servie par le recul actuel des entreprises sur les programmes DEI et le parrainage par les entreprises de conférences qui diabolisent les initiatives DEI. Les dirigeants d’entreprise devraient plutôt partir du principe qu’une économie plus diversifiée et plus inclusive est dans l’intérêt de la société. Une fois qu’ils ont souscrit à cet objectif, ils ont un rôle important à jouer dans l’élaboration de modèles et d’initiatives pratiques qui contribueront à la réalisation de ces objectifs importants.

 


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