Maire-adjointe déléguée à l’égalité, romancière, entrepreneuse, présidente du réseau « Maman travaille » et référente – entre autres – au sein du mouvement « En Marche! » d’Emmanuel Macron, Marlène Schiappa dresse un constat dur mais empreint de lucidité sur la position et le statut des femmes, aussi bien dans « l’écosystème » politique que dans celui de l’entreprise. Pour tenter d’inverser une tendance solidement ancrée, celle qui est considérée comme le chantre de la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle avance ses pions aux côtés, et non pas dans le sillage, de son candidat.
Dernièrement, vous souligniez dans une étude pour la Fondation Jean Jaurès que les femmes étaient considérées comme un « dernier recours » en politique. Pourriez-vous développer davantage ce point de vue ?
Effectivement, les femmes sont souvent considérées comme un dernier recours en politique. Le dernier exemple le plus flagrant est celui du « Brexit » où on a fait appel à une femme (ndlr Theresa May qui a succédé à David Cameron au lendemain de la victoire du « non ») après le cataclysme engendré par le résultat de cette consultation, ou encore les dernières élections régionales en Ile-de-France où Valérie Pécresse a déclaré qu’il fallait une femme à la tête de la région « pour faire le ménage » après des années de gouvernance de ses adversaires politiques. Ce qui renforce, dans l’imaginaire collectif, cette idée selon laquelle les femmes ne seraient que des plans B, C ou D, uniquement sollicitées dans des situations désespérées, dans des fonctions stéréotypées de « soignante » ou de « maman » de la nation. Autre exemple, celui d’Hillary Clinton. Puisque les statistiques ethniques sont légales aux Etats-Unis, force est de constater que les femmes blanches d’un certain milieu ont voté majoritairement pour Donald Trump. Ce qui interpelle également sur la perception des femmes par d’autres femmes en politique. C’est affligeant, non pas parce que les femmes ont voté pour un homme, mais parce que les femmes ont voté contre tous leurs droits les plus élémentaires !
Forte justement de votre « double regard » sur le monde de l’entreprise et la vie politique, quelles sont les différences que vous percevez au sein de ces deux « univers » concernant le statut des femmes ?
Dans le monde de l’entreprise la hiérarchie est claire et établie. Ainsi, vous devez convaincre votre supérieur que vous faites du bon travail si vous voulez obtenir une promotion. Quand vous faites de la politique, tout le monde est votre patron. Ce sont les gens que vous croisez dans la rue, lors des réunions publiques, qui vont voter ou non pour vous à qui vous aurez à rendre des comptes. Ce qui a pour effet d’effacer la frontière entre vie privée et vie publique. Chaque action de votre vie privée prend un sens politique, devient un message. Tandis qu’en entreprise, vous pouvez décider de vous concentrer sur votre travail de ne jamais parler de votre vie en dehors des murs du bureau. En politique, l’évaluation de cette vie personnelle des femmes sera faite plus sévèrement que celle des hommes. Si un homme s’éloigne de sa famille pour faire campagne, on dit qu’il a le sens du sacrifice ou le sens du devoir, alors qu’à l’inverse, si une femme confie ses enfants à leur père ou à leurs grands-parents pendant une campagne électorale, elle est considérée comme une mauvaise mère. Les médias regorgent de ces exemples, façon « qui va garder les enfants ? » Un homme célibataire sans enfant est indépendant, une femme célibataire sans enfant est « seule ». Un groupe d’hommes c’est un comité de soutien, un groupe de femmes on va dire que ce sont des « groupies ». Ce traitement différencié est profondément sexiste et pesant, il n’incite pas les femmes à s’engager.
Et les similitudes ?
Après, concernant les similitudes, la place des femmes dans les sphères de pouvoir est tout aussi faible en entreprise qu’en politique. Peu de femmes au Parlement, peu de femmes aux postes de direction. Tout cela participe au consensus social tacite de répartition des rôles entre les genres : aux hommes le pouvoir, la conquête et aux femmes les enfants, le foyer, la cuisine. Il existe d’ailleurs une règle, la règle de 20%, qui nous montre à quel point les questions d’égalité femmes-hommes sont liées : 20% d’écart de salaires environ entre femmes et hommes, 20% de tâches ménagères accomplies par les hommes en moyenne, 20% environ de femmes parlementaires.
Vous vous êtes personnellement engagé auprès d’Emmanuel Macron qui fait de l’égalité femmes-hommes « une grande cause nationale ». En quoi son approche sur cette question diffère à vos yeux d’autres personnalités publiques qui ont pu tenir un discours similaire, sans qu’il ne soit forcément suivi d’actes concrets ?
C’est le seul candidat à en avoir fait une question centrale et à avoir compris que l’égalité entre les femmes et les hommes était un sujet qui devait être traité partout, tout le temps, dans toutes les strates de la société. C’est aussi le seul à avoir pris des mesures concrètes au sein de son mouvement politique. Je préside un réseau de mères actives depuis 10 ans et je suis maire-adjointe déléguée à l’égalité depuis 3 ans, je m’attache aux faits plus qu’aux intentions. Et dans les faits, Emmanuel Macron est le seul qui agisse. Il ne satisfait pas du nombre de femmes candidates à l’investiture aux législatives ? Il lance un appel, des sessions de coaching, des formations, mobilise des équipes pour aller chercher des femmes, déploie des process pour leur répondre etc. pour tenter d’inverser la tendance. Résultat ? On est passé de 15% à plus de 40% de candidatures féminines. Emmanuel Macron est un homme d’action et de faits, et c’est un homme de chiffres. Il vise l’efficacité, pas l’incantation. En quelques semaines il a fait varier un chiffre de 15 à 40. Alors que tous les partis politiques nous répètent que c’est impossible depuis des décennies.
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