Le combat pour un débat démocratique sain ne fait que commencer. Depuis l’élection de Trump en 2016 et les présidentielles françaises de 2017, les fake news prennent une place grandissante dans le débat public. Emmanuel Macron en avait fait les frais pendant sa campagne, avec les rumeurs sur son homosexualité ou sur l’existence d’un compte offshore aux Bahamas. Les effets des fake news ne se limitent pas à la seule sphère politique puisque Starbucks, McDonalds ou Microsoft, pour ne citer qu’eux, en ont été victimes. Il ne passe désormais pas un mois sans que des personnalités publiques dénoncent les fake news : encore récemment, le 25 janvier, le pape s’est élevé avec force contre les fake news.
Les fake news, que l’on peut définir comme de fausses informations créées dans l’objectif d’induire en erreur le lecteur, n’ont rien de particulièrement nouveau. Le “Great Moon Hoax” de 1835 est un exemple : une série d’articles publiés dans le New York Sun relatant la fausse découverte d’une vie extraterrestre sur la Lune. Le changement s’appuie sur deux tendances. Les médias traditionnels sont de plus en plus discrédités : seulement 24 % des Français croient que les journalistes sont indépendants. Ce discrédit des médias s’inscrit dans une dynamique plus large, celle du discours anti-élites et anti-institutions. La deuxième tendance est évidemment l’essor des réseaux sociaux permettant à chacun de pouvoir écrire et diffuser une information. Celle-ci induit une viralité croissante et parfois incontrôlables des informations sur Internet.
Réseaux sociaux
Les principaux médias sociaux prennent la mesure des dangers qu’ils encourent à laisser exister de fausses informations. En dégradant le contenu auquel ont accès les utilisateurs, elles risquent de réduire leur temps de présence sur les plateformes, et donc les revenus publicitaires associés. Ainsi, le 4 janvier dernier, Mark Zuckerberg a annoncé qu’il en ferait son combat personnel, indispensable selon lui pour réparer Facebook (« to fix Facebook »). De manière plus générale, pour les marques et les entreprises, les fake news sont des dangers supplémentaires dans la gestion de leur e-reputation. L’incidence des fake news pour l’ensemble des acteurs est donc significatif et considéré comme tel.
Pour les acteurs politiques, en première apparence, les conséquences des fake news restent incertains. Ainsi une récente étude américaine a livré des conclusions mitigées sur l’impact des fake news sur le résultat des élections américaines. L’étude a par exemple révélé que 65 % de la totalité des sites hébergeant des fake news avaient été effectuées par le décile le plus conservateur de l’échantillon. Selon les auteurs de cette étude, le choix des citoyens n’a pas été influencé par de fausses informations. Au contraire, ils ont mesuré que ces fausses informations devaient être en moyenne 36 fois plus efficaces que les campagnes TV pour influencer le résultat de l’élection.
Mais les apparences sont trompeuses : les fake news ont aussi des effets politiques. Elles posent par exemple la question du rôle des médias sociaux : devraient-ils être neutres ou analyser et filtrer les informations ? Les outils qui seront utilisés par les médias sociaux pour lutter contre les fake news devront s’assurer d’un équilibre délicat entre liberté d’expression et de la presse d’un côté et promotion d’un contenu de qualité de l’autre. Cette question est d’autant plus complexe que ces mêmes plateformes participent aussi à la création de leur propre contenu. Ces fake news posent également des questions quant au rôle de l’Etat pour contrôler la qualité des informations et décider de ce qui serait ou non la “vraie” information. Ainsi, le souhait d’Emmanuel Macron de créer une loi pour lutter contre les fake news a créé une certaine vague de réactions, d’hommes politiques et d’éditorialistes ; notamment celle d’Olivier Auguste de L’Opinion, qui a rappelé que plusieurs affaires, comme celle du nuage de Tchernobyl, ont démontré que « la puissance publique n’est pas par nature garante de la vérité « .
Enfin, la montée en puissance de l’Intelligence Artificielle rendra ces enjeux économiques et politiques probablement toujours aussi aigus. Ainsi, un récent article publié dans le Scientific American indique que des chercheurs ont réussi à démontrer qu’à l’aide de techniques de deep learning il était possible de créer des fake news d’une qualité suffisante pour que les personnes qui y ont été soumises trouvent le sujet vraisemblable et utile. Cette dynamique s’ajoutant au constat que les réseaux sociaux deviennent, pour les jeunes notamment, une plateforme dominante pour s’informer rend les enjeux bien plus concrets.
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