Le premier ministre vient de transmettre au Conseil d’État un avant-projet de loi relatif au statut de Paris à l’aménagement métropolitain. Les contours de ce remodelage de l’architecture institutionnelle de la capitale française permettraient à la mairie dirigée par Anne Hidalgo de se délester d’une grande partie des tutelles de l’État.
Un appui de taille bienvenu pour Anne Hidalgo. Matignon a déposé, vendredi 24 juin 2016, un texte auprès des Sages qui reprend une majorité des doléances évoquées fin 2015 par la mairesse de Paris. « Il y a un souhait du gouvernement d’accompagner la démarche qui est la mienne », assurait Anne Hidalgo en septembre 2015.
Neuf mois plus tard, la sérénité affichée par la garde rapprochée de la maire PS va accoucher d’un « bouleversement institutionnel aussi important que l’élection du maire au suffrage universel en 1977 », s’enthousiasmait le directeur de cabinet d’Anne Hidalgo, Mathias Vicherat. Le Conseil de Paris avait validé entre-temps, en février dernier, l’essentiel du projet de réforme. Le rejet était venu de la droite parisienne. Le gouvernement a incorporé plusieurs chapitres sur l’organisation des pouvoirs de l’Île-de-France au sein d’un projet de loi de quarante-quatre articles.
La commune et le département ne font plus qu’un
La vocation de la capitale est de se muer en « une nouvelle collectivité de la République », ambitionnait Anne Hidalgo à travers une note confidentielle divulguée en septembre 2015. Le premier chapitre du projet de loi prévoit la création d’une « collectivité à statut particulier » avec l’appellation « Ville de Paris » pour la capitale française.
Paris jouit d’un statut particulier depuis la loi du 10 juillet 1964 : elle est à la fois commune et départements. Ce monstre administratif à deux têtes concentre deux budgets et deux administrations séparés. La municipalité compte 50 000 fonctionnaires dans ses rangs, contre 4 000 pour le département francilien. Le gouvernement souhaite mettre un terme aux « lourdeurs bureaucratiques » avec la fusion des deux collectivités territoriales. Les juges de la chambre régionale des comptes (CRC), dans un rapport rendu public en juillet 2015, avaient préconisé une fusion des deux entités pour « ne pas laisser substituer une situation de confusion ».
« Le département de Paris n’a plus vraiment de réalité »
Extrait du rapport de la chambre régionale des comptes transmis à l’été 2015
Les quatre premiers arrondissements regroupés
Quinze fois moins d’habitants dans le 1er arrondissement que dans le 15e. Les disparités de population sont jugées par Anne Hidalgo comme un obstacle à une « égalité de traitement des usagers » devant le service public à l’échelle local ». Le deuxième chapitre de l’avant-projet de loi se concentre sur le regroupement 1er, 2e, 3e et 4e arrondissements en un seul « secteur ».
Cette nécessité de rééquilibrage démographique, évoqué par Anne Hidalgo dans la note adressée à François Hollande à la mi-septembre 2015, n’est autre qu’une mise en conformité qui permet l’application de la loi de 1982 intitulée « Paris-Lyon-Marseille » (PLM). L’introduction de ce point dans le premier jet du projet de loi relatif à la capitale de la France et à l’aménagement métropolitain permettrait un nouveau découpage valable pour les élections municipales et métropolitaines prévues pour 2020. À cette date, seuls dix-sept maires d’arrondissements (ré) arboreront leur écharpe de maire d’arrondissement, contre vingt depuis la loi PLM votée en 1980. La mairesse de Paris avait souligné au travers d’une note, adressée à François Hollande mi-septembre 2015, le besoin prégnant d’évolution de la carte des arrondissements.
La création du « secteur » prévu dans l’avant-projet de loi inclut la présence des huit conseillers, soit un conseiller pour 12 720 habitants. La moyenne municipale est de 13 600. Le deuxième arrondissement affiche un écart important entre le nombre d’habitants et de conseillers : 21 741 habitants sont représentés par un seul conseiller.
Le préfet de police perd en pouvoirs
Le troisième volet de l’avant-projet de loi se focalise sur le contrôle de la circulation, la tutelle sur le personnel de la fourrière et sur les agents de surveillance (ASP).
La mairie de Paris doit attendre « l’avis conforme » de la préfecture de Police avant de moduler la vitesse autorisée, de juguler vers une limitation voire un arrêt total du trafic sur la majeure partie des voies de circulation. Le texte prévoit de mettre fin à cette prérogative mais maintient les « prescriptions » relatives aux situations d’urgence ou de crise pour les voies qui sont utilisées par les secours ou pour évacuer des brancards. Le préfet se voit aussi reprendre la tutelle sur le personnel de la fourrière et sur les 1 500 agents de la ASP placées sous l’autorité de la municipalité.
Nul doute que l’arrivée d’Aurélien Rousseau, devenu en septembre dernier directeur adjoint et conseiller social du cabinet de Manuel Valls, a permis de concrétiser les vœux de la maire de Paris. L’énarque trentenaire, sorti de la même promotion que Florian Philippot – le fidèle lieutenant de Marine Le Pen, a fait ses classes au sein de l’Hôtel de Ville de Paris. Son dernier poste, secrétaire général adjoint de la mairesse Anne Hidalgo, lui a permis de piloter le lancement du projet de la métropole du Grand Paris, de l’action foncière et immobilière et des problématiques liées au logement et au transport.
Tel est l’appui de taille espéré par Anne Hidalgo pour voir jaillir ce texte qui pourrait être présenté en Conseil des ministres d’ici l’automne 2016 afin de boucler son parcours législatif avant la fin du quinquennat.
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