La survenance de la crise marque la mort cérébrale de la pensée. La mort définitive et clinique de l’anticipation et de la vision. Le refus du lendemain, sacrifié au présent. Le triomphe du morbide chez les médias au bénéfice de l’audience. Et l’enterrement de première classe de l’économie, au motif que parler de l’économie et des emplois, serait une honte au milieu d’une crise sanitaire. Nous n’avons pas su lancer le débat sur la reprise à temps, et le salarié, l’entrepreneur sacrifié, lui, attend. La crise est un révélateur qui expose tous les mensonges, sans remise en cause, la sortie sera saignante. Que dire ? Que faire ?
Qui sera sacrifié ?
Le sacrifié, sur le territoire rural, loin du covid19, attends et ne comprend pas l’abandon dont il est l’objet. Le commerçant, artisan, de la ville petite ou moyenne, présent dans cette partie des 66 millions de français non touchés par le virus, attend. Il ne comprend pas pourquoi il est sur le point de perdre son emploi. Un emploi qui ne se recréera pas.
La maman célibataire, souvent en banlieue, qui travaille souvent au noir, pour toucher ce qui nourrit ses enfants chaque jour, attend, se demandant comment acheter de quoi faire le repas du lendemain.
L’enfant, lui même, dont le seul repas équilibré dans les quartiers sensibles, était celui de l’école, attend, pour retrouver cet apport indispensable.
Nos entreprises attendent, non pas le déconfinement, mais un plan pour en sortir
Et nos entreprises, elles, n’attendent pas le déconfinement, elles attendent un plan de déconfinement. L’entreprise n’a peur d’aucun scénario, elle a peur du vide, de l’inconnu. Sans plan, son fonctionnement est bloqué, figé, au détriment de toute l’économie et des hommes qui en vivent. Un plan unique pour un pays aux situations différentes n’a aucun sens. Un plan qui retarde sa sortie pour des raisons de logistique n’est pas sérieux et révélateur d’un manque de réalisme au niveau de l’Etat.
L’incapacité de nos dirigeants à dessiner la sortie de crise, immobilise le pays et obère ses chances futures. Les 67M de « non contaminés » attendent que le dirigeant Parisien, obsédé par les déviances Parisiennes, et le chiffre des décès quotidien, se souvienne de tous les autres, qui ne se posent pas la question du jogging de 10 à 19h, mais de leur vie des 10 prochaines années.
Leçon numéro 1 : Nous ne voulons plus mourir
La première leçon de cette crise, sur laquelle nombre d’intellectuels se penchent déjà, c’est le refus de la mort, celle de la mort à tous prix. L’incapacité à chercher le bonheur dans notre vie quotidienne pour lui préférer la performance, la vie à tous prix, même en état comateux, végétatif. La science n’a plus le droit à l’erreur, à l’échec. Quantitatif. Google nous propose l’immortalité et nous tomberons donc dans le panneau. Terrible erreur qui donnerait vie éternelle aux Hitler de toute espèce.
Ce refus s’est accentué dans les 10 dernières années, et trouve son premier marqueur à la fin des années 70 (victoire contre la variole), à un niveau presque hallucinant. En 2008 lors de la « swine-flu », pendant laquelle plus de 1.4Mds de personnes furent contaminées, bien loin du million d’aujourd’hui, et vraisemblablement 570 000 morts à l’époque, aucune mesure de confinement, aucune fermeture des frontières, ne figuraient au rang des mesures prises. Peut-être que ces mesures, aujourd’hui, nous préservent des résultats d’hier. Je n’en suis pas certain. Nous payons l’incurie des gouvernements successifs qui ont tué la capacité hospitalière. L’heure des comptes viendra.
Leçon 2 : Un politique asservi aux médias et réseaux sociaux
Depuis 2008 le changement c’est celui du pouvoir des médias associés aux réseaux sociaux, qui se sont fait la courte échelle dans une course-surenchère au sensationnel. Bruissant de toutes les théories complotistes, d’un côté, jouant sur le morbide pour mieux vendre, de l’autre. La force décuplée de ces médias associés, ainsi que leur viralité, a fait une victime de taille: Le politique. Asservi au quotidien, il nous a livré le décompte des morts à chaque journal de 20h, sans nous donner celui des vivants, qui représentent pourtant 99,5% du reste de la population. Asservi au quotidien, loin des Asiatiques, Allemands ou Autrichiens, il ne parle plus d’avenir, comme si l’avenir était indécent.
Victime d’un harcèlement médiatique sans pareil depuis l’avènement des réseaux sociaux, terrassé par la dictature du mot sortit de son contexte, soumis à la règle du politiquement correct et à l’ire de la majorité accrochée à son smartphone, le politique s’est cru obligé de sur-réagir, afin de se mettre à l’abri des critiques. Je bloque tout, je cantonne et confine, je ferme les frontières, aveuglément, sans réfléchir aux conséquences économiques, bien plus dramatiques, si elles ne sont pas adressées assez vite.
Leçon 3 : L’occident perd sa place de modèle
Confinés ? Pourquoi pas, mais seulement si les méthodes complémentaires sont mises en place pour en sortir!!! Or, Hong Kong, l’une des plus fortes densités de population au KM2, offre aussi le plus faible taux de décès. Taiwan, avec un cocktail masques, tests et traitement, affiche une réussite unique en son genre. Le confinement a surtout révélé, le naufrage de nos systèmes de santé. Assommés à coup de coupes sombres dans leur budget, au lieu de réformer pour en accroître leur efficacité. Incapable de recevoir un afflux de patients, incapables de protéger des aînés que nos sociétés occidentales ont lâchement abandonné, ce n’est pas la mort dont nous nous protégeons, mais de notre incapacité à l’empêcher et la honte des pratiques qu’elle révèle. En Europe, seule l’Allemagne, l’Autriche, imposent le respect.
Que retenir, que faire?
Nous avons géré la crise au quotidien, les yeux rivés sur le journal de 20H, sans intérêt pour le lendemain. Nous paierons une seconde fois, pour appliquer la même méthode que celle qui conduit à cette situation. Le court terme est Roi, la mort triomphera avec aisance, demain, pendant la possible récession, qui elle-même empêchera d’investir dans le système de santé, qui sera encore plus dépourvu à la prochaine crise. Le politique doit retrouver le chemin qui mène à la vision longue.
Nous avons fait de la vie, ou du refus de la mort, ressort ultime utilisé par le politique, pour reprendre le contrôle sur le « peuple ». Aussi dur soit le propos, la mort fait partie de notre vie, les épidémies autant que les accidents routiers, et nous devons accepter que certains meurent en cas de crise, car c’est notre sort à nous, humains. Tant que la mort ne survient pas de façon massive, ce qui n’est pas le cas avec le Covid19, il n’y a pas de raison de lui préférer, celle, plus sourde, mais tellement plus massive, de la mort économique. Suicides, désespoir, addictions, disparition de l’espoir, la récession a toujours un coût humain et social, économique et financier, bien plus lourd que toute épidémie. C’est la théorie dite du « soldat Ryan », de risquer la vie de tous, au profit d’un seul. Cela produit des images émouvantes au cinéma, mais ne se justifie en rien dans la vie réelle. Nous devons donc nous poser la question de notre rapport comparatif à la mort.
La précaution c’est la mort. L’atteinte à la liberté aussi
Nous avons fait du principe de précaution, l’alpha et l’oméga, qui sous-tend et guide notre société. A se préserver du risque, on prend le risque de se préserver du meilleur. Nous lançons des études, pour examiner les effets secondaires de médicaments connus, y compris dans leurs effets secondaires que nous connaissons……. depuis 50 ans !! Bienvenue en « absurdie » ! Ne pas prendre « ce risque » c’est prendre le risque d’augmenter le nombre de morts. Une fois de plus, ceux qui font de la précaution un principe, font de la réussite une exception.
Plus grave, nous avons interdit aux médecins, que notre société a formé, d’exercer leur métier. Sans que cela ne déclenche aucune réaction du corps médical, pourtant prompt à crier au loup à la moindre tentative de réforme. Pas un mot, quand le pouvoir, a, au prix d’une atteinte majeure à la démocratie, enlever le droit de prescrire l’hydro-chloroquine aux médecins. Une première historique, qui je l’espère, malgré le climat de « guerre », n’aura pas « de jour d’après ». Je suis sidéré du silence sidéral autour de cette atteinte majeure à une liberté fondamentale. Leçon supplémentaire, pour les cas les plus graves, l’ordre des médecins devient sourd et aveugle. Un symptôme de plus de la maladie? On pensait qu’il n’attaquait que le goût et l’odorat. La nausée et les mains sales, nous guettent.
Nos débats sur l’anonymat des données, font pleurer.
Dans le même temps, les esprits s’échauffent pour savoir si utiliser une appli, qui préviendrait chacun d’une contamination potentielle, serait une atteinte à nos libertés fondamentales. Incroyable ! Le sujet précédent ne suscite aucune réaction, mais un geste qui sauve et contient, devient l’objet d’un débat essentiel. Avons nous perdu le sens des valeurs? De la hiérarchie des problèmes? Dans un pays où chaque jour, chacun livre ses données sur les réseaux sociaux, pour des futilités, l’important, lui, devrait être encadré? La leçon à retenir, c’est que nous devrons nous questionner sur la hiérarchie de nos prétendues valeurs, et surtout, sur notre capacité à répondre aux besoins pressants d’une crise.
Une crise sociétale se résoud avec tous, et pas seulement un comité scientifique
Nous avons confié un problème sociétal, à un comité scientifique. Erreur fondamentale, dont nous devrons tirer les leçons. Le confinement condamnait la société toute entière dans son fonctionnement, mais personne pour représenter les autres couches, compétences, voix, de notre société. Cela questionne notre respect pour la démocratie, pour la diversité des points de vue, pour le principe de réalisme. A l’avenir, espérons qu’il en sera autrement et proposons vite, pour les prochaines crises, un comité qui représentera toutes les composantes de la société, avec une prédominance éventuelle d’une catégorie, selon la nature de la crise.
L’avenir de notre démocratie est en jeu
Et surtout, non content de nier l’avenir, en gardant la tête dans le sable du quotidien, nous avons également tourné le dos aux leçons du passé. Toutes les récessions majeures ont été mères de dictatures, de plaies béantes à la démocratie. Hitler, Staline, avons-nous oublié ces noms ? Avons-nous déjà oublié que ces 15 dernières années, les dictatures ont progressé de 15% ? Éviter le débat sur la récession et la sortie rapide du déconfinement, c’est se lancer corps perdu vers ce précipice. Ceux qui ignorent les leçons du passé et ne préparent pas l’avenir, ne méritent pas d’être au pouvoir. Nous n’avons pas besoin de petits comptables du présent. Les médias s’en chargent « trop bien ».
Apprenons, mais apprenons vite. Car le prochain virus est déjà en germe, et arrivera tôt ou tard. Pour une fois, qu’on l’aime ou non, Trump est porteur du virus de l’économie, et il y a au moins un grand pays pour mettre au même niveau, le futur et le présent, même si cela est lié à des considérations électoralistes.
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