Quelques jours seulement après la victoire du “Brexit”, le Président français veut profiter de l’isolement de la City de Londres pour récupérer des activités financières à Paris. Le discours du Bourget de 2012 est déjà loin.
Les discours n’engagent que ceux qui les écoutent et François Hollande l’a bien compris. A moins d’un an de la prochaine élection présidentielle, le chef de l’Etat français veut profiter des conséquences de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne pour relancer la place financière de Paris, quitte à renier son désormais fameux « Mon adversaire, c’est la finance » du Bourget en 2012.
François Hollande ne s’en cache pas et voit le Brexit comme une opportunité. « Dès lors que le Royaume-Uni ne sera plus dans l’Union européenne, il n’y a aucune raison pour l’Europe et encore moins pour la zone euro de permettre à un pays qui n’est plus membre de l’Union et qui n’a jamais été membre de la zone euro de continuer à faire des opérations en euros », a-t-il déclaré mercredi en marge du premier Conseil européen à 27, à Bruxelles, sans le Royaume-Uni.
Revoir la conférence de presse du président @fhollande à l'issue du Conseil européen à Bruxelles cet après-midi https://t.co/KyhPKzLBX7
— Élysée (@Elysee) June 29, 2016
« Les opérations de compensation en euros ne pourront plus se faire à Londres », a ajouté le chef de l’Etat, dans une interview aux Echos publié jeudi. « Ce n’est pas négociable. Le Royaume-Uni redevenant un pays tiers, le passeport financier européen devra disparaître, de même que ce sera la fin du passeport commercial ». Les banques françaises doivent se préparer à récupérer une partie de ces activités, a répété François Hollande, « et nous devons adapter nos règles y compris fiscales pour rendre la place financière de Paris plus attractive ».
Depuis le vote du Brexit, le gouvernement français est en embuscade. Tout est bon pour relancer l’économie française. François Hollande a compris l’intérêt qu’il pourrait tirer de l’isolement de la City et de la volonté de l’Union européenne de rapatrier des activités financières (marchés de taux et de changes) sur le continent. Depuis plusieurs jours, les marchés européens, britanniques en tête, dévissent et les investisseurs s’inquiètent des conséquences du Brexit sur la première place financière en Europe.
« Mon ami, c’est la finance »
Le premier ministre Manuel Valls et le ministre des Finances Michel Sapin sont mobilisés sur le dossier. Ils veulent voir comment la France et la Place de Paris pourraient accueillir des services financiers et des banques installées Outre-manche. Les retombées potentielles sont importantes. Des milliers d’emplois à Paris sont à la clé. « Les enjeux sont conséquents puisque le transfert d’une partie des activités financières de la City vers la France dépendra de l’influence et de l’attractivité de Paris », explique un gestionnaire de fonds chez Barclays basé à Paris.
Le gouvernement a reçu le président de Paris Europlace Gérard Mestrallet pour affiner sa stratégie de reconquête. « Avec le Brexit, il serait encore plus incohérent de voir dirigée depuis le siège de Londres une grande part de l’activité en matière de cotation, d’indices, de règlement livraison des transactions et de produits dérivés », a déclaré mardi Gérard Mestrallet dans une interview au quotidien économique Les Echos. « Il est légitime pour l’UE de vouloir localiser, sur son territoire, toutes les infrastructures et les opérations de compensation ou de traitement post-marché. »
François Hollande souhaite rattraper les erreurs de communication du début de mandat. Finis les discours de campagne contre la finance et la taxe à 75% qui a poussé une partie des acteurs de la Place de Paris vers Londres. L’objectif est de recréer un environnement dynamique et susceptible de convaincre une partie de l’industrie financière de revenir dans la capitale française plutôt qu’à Francfort, autre Place forte en Europe. Le Président est en campagne pour séduire les acteurs de la City. Son ami, c’est la finance, pourrait-il dire.
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