À quelques mois de la présidentielle, chaque candidat affirme détenir LA solution pour rendre le pouvoir aux citoyens et renouveler l’exercice démocratique. Pourtant, 57% des Français estiment que la démocratie représentative classique ne fonctionne plus (Ipsos Sopra Storia pour le Monde) : défiance comme demande de participation populaire dominent et les Français privilégient massivement un gouvernement participatif plutôt qu’une solution autoritaire ou technocratique (voir la même enquête).
Force est de constater, cependant, que cette idée de démocratie participative, citoyenne, est souvent raillée et présentée comme utopique en France, où les énarques prétendent avoir le monopole des idées et des solutions (alors même que leurs résultats sur le terrain sont peu concluants). Dans un essai passionnant (le Coup d’Etat Citoyen), Elisa Lewis et Romain Slitine assurent, exemples étrangers à l’appui, qu’il est possible de réinventer notre démocratie : en particulier, les civictechs, essaimant des révolutions numériques et collaboratives, permettent d’envisager un véritable changement de paradigme en la matière. Les initiatives concrètes se multiplient et permettent de rapidement faire émerger des consensus et surtout de nouvelles initiatives : les applications Gov et Stig, Voxe.org, Fluicity au niveau local. L’asymétrie d’information entre gouvernants et gouvernés est en train de se réduire et la possibilité d’agir, de construire des consensus, ou de solliciter un avis sur de larges échantillons de la population (à un niveau au moins comparable aux grands instituts de sondages qui ont prouvé leur inefficacité à de nombreuses reprises en 2016…) se développe rapidement. Les citoyens commencent par ailleurs à contester certaines décisions iniques du pouvoir politique ou administratif, par des pétitions en ligne, notamment sur Change.org. En Espagne, en Italie, ces nouveaux outils numériques sont le fer de lance des mouvements citoyens ou alternatifs. Nous sommes en pleine transition démocratique car une nouvelle forme de démocratie, plus horizontale, continue, connectée, tente d’émerger. En France, le mouvement Les Citoyens, qui soutient la candidature d’Alexandre Jardin à la présidentielle, est probablement le meilleur exemple de cette démocratie citoyenne, dans la mesure où le programme de ce mouvement est co-écrit avec tous les français. Sur la base d’un programme-cadre qui a défini en Décembre les grandes valeurs et orientations du mouvement (redonner du pouvoir aux citoyens et aux territoires, s’inspirer des grandes initiatives citoyennes qui fonctionnent déjà sur le terrain pour les étendre a l’échelle nationale, mettre en place un Etat recentré sur ses fonctions régaliennes et garantir des minimums faisant l’objet d’un consensus), les Citoyens proposent à tous les électeurs (et pas seulement aux 70 000 sympathisants de ses Maisons des Citoyens) de venir participer aux détails de ce programme sur des espaces collaboratifs de type wiki : ces wikis citoyens, organisés par thématiques, sont accessibles depuis le 9 janvier et permettront de faire émerger le programme définitif sur http://www.lescitoyens1.fr/.
Ainsi, si les hommes politiques classiques prétendent associer les citoyens à leur démarche, la genèse des programmes est essentiellement verticale : nous en voulons pour preuve le fiasco des marcheurs de Macron, dont aucune mesure n’a été reprise dans le squelette de programme, essentiellement technocratique, proposé pour le moment par En Marche. Les autres partis élaborent en général leur programme dans des cénacles fermés de hauts fonctionnaires et d’experts auditionnés. Les militants ont du mal à faire valoir leur point de vue, y compris au sein des partis. Cela est d’autant plus surprenant que ces mêmes partis prétendent, une fois au pouvoir, mettre en œuvre des initiatives de démocratie participative. Une fois n’est pas coutume, le politique s’en tient au marché de la promesse : un vrai mouvement citoyen doit sortir du marché de la promesse pour agir et d’ores et déjà, même dans l’opposition, et montrer que cette démocratie citoyenne est possible. C’est le sens de cette co-construction participative du programme des citoyens.
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