Sur la question des relations au travail, on ne peut pas accuser le Président de la République – qui en avait fait un de ses thèmes phare de campagne -, ni son gouvernement de ne rien avoir fait. Ordonnances Pénicaud – après les lois travail qu’il avait inspirées -, réforme de la formation, « raison d’être » de l’entreprise dans la loi Pacte : le Pouvoir n’est pas resté inactif.
Pour autant, nous, chefs d’entreprise, et notamment de petites entreprises, de très loin les plus nombreuses dans notre pays, pouvons rester sur notre faim. Car tout ce qui existait avant et tout ce qui a été fait depuis 2017 n’ont rien changé sur le fond de ce qui fait la vie au quotidien de l’entrepreneur et de ses salariés.
Depuis le code du travail jusqu’au contrat de travail, quel accord se tisse entre l’entreprise et ses collaborateurs ? Osons le dire franchement : quasiment aucun sur le fond.
Les textes existants se contentent de fixer un nombre d’heures de travail, des garde-fous, des protections minimales. Mais rien, absolument rien sur les deux points clés qui doivent régir la relation entre une entreprise et une ou un de ses salarié (e) s :
– l’engagement du collaborateur au service de la performance de la société
– l’engagement de l’entrepreneur à garantir le bien-être de ses salariés, individuellement et collectivement.
Quand on y pense, il est tout de même surprenant que personne, politiques, responsables administratifs, représentants patronaux, syndicats, ne se soient préoccupés de ce double impératif, encore plus primordial pour les personnes comme pour la collectivité, que la très vertueuse « raison d’être » de l’entreprise. Comme ce duo, performance – bien être, était acquis d’avance ou au contraire comme s’il n’était pas prioritaire. Répondons à ces deux présupposés.
Non, la volonté du collaborateur de pleinement contribuer à la performance de l’entreprise ne va pas de soi. Elle suppose un véritable engagement, au sens plein du terme, une adhésion à l’activité et aux valeurs de l’entreprise qu’il rejoint et où il travaille. Elle consiste à ne pas se contenter d’un échange minimal entre un temps de travail et une tâche à accomplir, à s’entendre véritablement sur la motivation du salarié. Elle implique que cette tâche soit faite avec toujours plus d’implication, d’application, d’optimisation, pour que l’entreprise soit la plus performante possible et crée davantage de valeurs. L’entreprise pourra ainsi non seulement perdurer – au bénéfice de tous, y compris via le partage des profits – mais aussi se développer, innover, embaucher.
De l’autre côté du spectre, non il ne va pas de soi que la volonté du chef d’entreprise, quelle que soit la taille de celle-ci, soit de veiller à assurer le bien-être de ses collaborateurs. C’est là encore un engagement qui doit être permanent, que l’entrepreneur ne peut mener seul. Il doit s’assurer que ses directeurs, ses managers, tous ses relais dans l’entreprise, soient aussi mobilisés au quotidien au service du bien-être de tous les salariés.
Allons plus loin : l’entreprise doit aussi pouvoir compter sur les instances représentatives du personnel et en premier lieu les syndicats – qui retrouveraient là une légitimité positive plus porteuse que certains combats d’arrière-garde devenus minoritaires comme en témoigne leur représentativité – pour participer à cette dynamique de veille afin de garantir le bien-être de tous les salariés. Ce double impératif, l’engagement des collaborateurs au service de la performance de l’entreprise, l’engagement du Chef d’entreprise pour le bien-être de ses collaborateurs, n’est pas une simple juxtaposition.
Sur le long terme, une entreprise ne peut vraiment être performante, durablement performante, si ses salariés ne s’y sentent pas bien, ne sont pas heureux dans leur travail, n’y trouvent pas un sens qui contribue à leur épanouissement, y travaillent mal ou trop alors qu’ils devraient surtout y travailler mieux.
De même les salariés ne peuvent pas être totalement heureux dans une entreprise non performante, donc potentiellement menacée. Il s’agirait là d’un bien-être uniquement apparent, au confort fallacieux, qui traduirait plus la satisfaction d’intérêts personnels que la réalisation d’un intérêt collectif.
Rêvons donc – on a le droit d’être idéaliste – d’un contrat de travail d’un genre nouveau, d’un véritable contrat d’engagement entre l’entreprise et ses salariés, actuels et futurs. Chacun aurait la responsabilité de porter ses engagements, et le droit voire le devoir de mettre un terme à cette relation contractuelle si les modalités du contrat n’étaient pas respectées. Ce contrat dirait en substance :
Oui, moi, collaborateur de l’entreprise, je m’engage à faire tout ce qui est en mon pouvoir pour que l’entreprise soit la plus performante possible.
Oui, moi, chef d’entreprise, je m’engage à faire tout ce qui est en mon pouvoir pour faire en sorte que chaque collaborateur soit bien dans l’entreprise et dans son travail, au quotidien comme sur le long terme.
Et par ce contrat, nous lions mutuellement ces deux engagements. Il n’y aura pas de performance sans bien-être des collaborateurs, il n’y aura pas de bien-être durable dans l’entreprise si elle n’est pas performante.
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