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Christian Eckert : « La Réforme du Prélèvement à La Source est Salutaire »

© Getty Images

Pouvez-vous, justement, nous présenter dans le détail ce fameux « taux neutre » destiné à préserver la vie privée du salarié ?

Ce taux neutre, au départ, sert à organiser le prélèvement pour les salariés inconnus des services fiscaux, comme les nouveaux salariés. Et si le contribuable, pour une raison qui lui appartient, ne souhaite pas que son employeur connaisse son taux d’imposition qui, encore une fois, ne donne qu’une information très partielle de sa situation fiscale, il peut demander à bénéficier de ce taux neutre, qui est équivalent à celui d’un célibataire sans enfants. L’employeur appliquera donc ce taux et une régularisation se fera par l’administration fiscale sur la base de la déclaration de revenu, qui demeurera inchangée. C’est, en somme, une soupape de sécurité concernant la confidentialité.

Une disposition spécifique, souvent plus avantageuse que le taux neutre, sera également proposée à un couple de contribuables. S’il y a, à l’intérieur d’un couple, des écarts de revenus importants, celui qui a le salaire le plus faible pourra choisir un taux plus faible, et son conjoint aura un taux plus élevé, pour compenser.  Le tout ne remettant pas en question la familialisation de l’impôt, car donnant lieu, comme d’habitude, à une déclaration de l’ensemble des revenus du foyer fiscal.

Des dispositions particulières sont-elles prévues pour éviter les effets d’optimisation, à savoir que certains contribuables majorent artificiellement leurs revenus de l’année 2017, dite « année blanche ». Pouvez-vous d’ailleurs expliciter ce concept « d’année blanche » souvent mal compris ?

En 2017, les contribuables payeront les impôts au titre des revenus de 2016 tandis qu’en 2018 ils payeront, immédiatement, les impôts sur les revenus de 2018. Ainsi, les revenus concernés par la réforme de l’année 2017 verront leur impôt annulé par un crédit d’impôt spécifique, d’où la terminologie parfois utilisée d’année blanche. Cela ne veut pas dire, bien entendu, que les contribuables ne vont rien payer en 2017 ou en 2018. Les impôts seront toujours payés de manière continue. C’est la même chose pour l’Etat qui percevra, tous les ans, une année d’imposition.

Il est donc légitime de s’interroger sur le fait que certains aient dans l’idée de majorer leurs revenus de 2017. Tout d’abord, les revenus qualifiés d’exceptionnels comme une allocation de départ à la retraite ou une rente en capital en 2017, seront quand même soumis à l’impôt sur le revenu. De même, les revenus non concernés par la réforme, comme les plus-values, seront imposés normalement.

Néanmoins, la plupart des contribuables n’ont pas de revenus pilotables. En effet, lorsqu’on est salarié on ne choisit pas le moment où on perçoit ses revenus. Les majorations que vous évoquez peuvent toutefois concerner certaines professions, comme les travailleurs indépendants qui pourraient avoir tendance à facturer « plus et plus vite » en 2017, voire moins vite fin 2016, pour optimiser leurs revenus. Nous avons prévu, pour contrer cela, des dispositifs spécifiques, qui permettront de constater s’il y a eu une optimisation des revenus. Cela concerne, certes, un petit nombre de contribuables mais il faut y veiller. En revanche, nous n’empêcherons pas, bien entendu, un contribuable de réaliser une bonne année 2017, sans qu’il y ait eu optimisation : par exemple un commercial ayant une partie variable de sa rémunération indexée sur ses ventes bénéficiera intégralement de l’effacement de l’impôt. Le contribuable pourra toujours faire valoir, auprès de l’administration, les éléments qui ont conduit à ce que l’année 2017 lui offre une assiette imposable plus importante. 

Près de 65% des Français sont convaincus par la mise en place de la retenue à la source. Mais l’opposition a promis de l’abroger si elle revenait aux affaires, défendant davantage le principe de « mensualisation contemporaine » et de répartir les prélèvements sur 12 mois au lieu de dix. Cela vous semble-t-il réaliste ?

Avec notre réforme, les prélèvements sont déjà répartis sur 12 mois. Donc sur ce point, la mensualisation contemporaine ne présente aucun avantage par rapport à la retenue à la source. Mais elle présente, en revanche, plusieurs inconvénients. En effet, l’administration fiscale ne peut connaître, en temps réel, l’évolution des revenus du salarié. Cette évolution est uniquement connue par celui qui verse le salaire. Elle ne pourrait l’être par l’administration fiscale qu’avec un décalage de plusieurs mois : c’est donc un système beaucoup moins réactif.

Concernant la remise en cause du dispositif par la droite si elle revenait aux affaires, elle irait à l’encontre du souhait des Français qui, dans leur grande majorité, y sont favorables comme vous le rappeliez. De plus, nous mettons tout en œuvre pour que cette réforme fonctionne : nous organisons notre administration en fonction du prélèvement à la source. Alors un gouvernement d’alternance qui déciderait, au milieu de l’année, d’interrompre ce dispositif attendu par des millions de Français se heurterait, à mon sens, à de nombreuses difficultés.

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