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Débat Présidentiel : Quel Positionnement Des Candidats ?

Sur la plupart des grands sujets qui intéressent les Français, les onze candidats à la présidentielle ont réussi à donner le spectacle d’une classe politique en miettes, très archaïque dans ses propositions, ce qui prépare le terrain à une France ingouvernable.

Sur chaque grand sujet qui intéresse les Français, on ne voit pas comment le président élu, quel qu’il soit, pourra dégager une majorité tant le bruit qui ressort de ce débat est contradictoire.

Sur l’emploi, priorité des priorités pour tous les Français, c’est la cacophonie la plus totale si on considère les politiques à mettre en œuvre pour retrouver le plein emploi. Pour faire simple, les candidats se partagent en trois grandes familles de propositions. 

D’abord, nous avons deux candidats, Macron et Fillon, qui défendent une logique d’offre, c’est-à-dire qui expliquent que la France a un problème de compétitivité coût et hors coût. Il faut donc améliorer les conditions de l’entreprise en allégeant les contraintes fiscales et sociales. Moins de charges et plus de flexibilité dans le travail.

Ensuite, nous avons 3 ou 4 candidats, Hamon, Mélenchon, Le Pen, Cheminade, qui s’inscrivent plutôt dans une logique de relance de la demande. Il faut distribuer du pouvoir d’achat pour que les magasins se remplissent et que les entreprises puissent prendre des commandes. Du bon vieux keynésianisme qui a déjà tellement servi qu’il en est usé jusqu’à la corde. Ce système à la Keynes passe et repasse par la case aux aides sociales (RSA, revenu universel), par la baisse d’impôts ou par la dépense publique, sans dire comment ces dépenses seront financées. Keynes, dans les années 40, expliquait, lui, que la dépense publique allait générer de l’activité et donc des recettes fiscales. Les candidats actuels n’osent pas sortir le logiciel parce qu’ils savent qu’il ne marcherait pas. Donc ils parient sur le flou.

Enfin, nous avons des candidats (Poutou, Arthaud, Le Pen, Dupont-Aignant) qui envisagent tout simplement d’interdire les licenciements, de nationaliser les entreprises en difficulté et de spolier, d’imposer, d’exproprier les riches. Et de faire de la dette puisqu’ils décideront aussi de ne pas la rembourser. C’est assez affligeant.

Sur l’Europe, nous avons 8 candidats sur 11 qui considèrent que l’Europe et l’euro sont responsables de tous nos déboires. Il faut donc sortir de l’Europe et de l’euro ou revoir les traités. C’est Marine Le Pen qui mène la danse anti-européenne. Comme les autres, elle ne veut pas comprendre que l’Europe est sous contrôle démocratique des Etats membres, qu’elle nous protège comme les autres, elle ne veut pas nous expliquer comment on vit en dehors de l’euro, à l’abri dans nos frontières, etc…

Nous n’avons que 3 candidats, Fillon, Macron et Hamon, qui adhèrent et défendent l’Union européenne et l’euro en réclamant plus de coopération et de solidarité avec les pays partenaires. Ils admettent par cohérence que, pour rester dans le club, il faut prendre en charge certains problèmes, respecter certaines règles et travailler à plus d’Europe, alors que tous les autres réclament moins d’Europe sans savoir nous expliquer pourquoi.

Sur le modèle social, il n’existe aucun accord sur les moyens à mettre en œuvre pour en protéger son fonctionnement. François Fillon explique qu’il faut reprendre les réformes structurelles pour tenir compte de l’allongement de la durée de vie, donc réforme des retraites, pour tenir compte des progrès de la santé, donc réforme de l’assurance santé, pour améliorer la gestion des caisses et pour faire des économies substantielles. Emmanuel Macron veut protéger le système sans dire comment.

Quand aux autres candidats, ils veulent tous passer peu ou prou par une augmentation des recettes fiscales et des charges sociales avec un ciblage particulier sur les banques, « qui ont engrangé tellement d’argent depuis deux ans ». Marine Le Pen laisse entendre que lorsque les immigrés seront partis, la sécurité sociale retrouvera ses équilibres.

Sur le protectionnisme et la mondialisation, c’est également du n’importe quoi puisque pour 8 candidats sur 11, la mondialisation explique tous nos maux avec, d’ailleurs, l’appartenance à l’Union européenne. Donc, il faut fermer les frontières, revenir au franc et tout ira bien. Il n’y a guère que François Fillon et Emmanuel Macron qui essaient de dénoncer les perversions du protectionnisme.

On pourrait faire le même exercice avec les questions liées à l’immigration, les risques de terrorisme et l’islam radical.

Jean-Luc Mélenchon cite Karl Marx, déclare sa flamme aux représentants officiels du trotskisme, Philipe Poutou salue le gauchisme national de Cheminade, et ignore Jean Lassalle qui doit encore se demander ce qu‘il est venu faire sur ce radeau du désespoir politique. De toute façon, personne ne sait ce qu‘il faisait là.

Certains ont pu penser qu’il s’était trompé de studio vu que l’enregistrement de The Voice avait lieu à côté le même jour. 

Sur toutes ces grandes questions, les candidats ont donné le spectacle d’une classe politique en miettes, incapables de reconnaître des propositions responsables et honnêtes. Ils ont surtout, à l’exception de deux d’entre eux, donné l’impression d’être complètement déconnectés de la réalité.

Pour tous les candidats, sauf Fillon et Macron, la France va bien puisqu’on pourra augmenter l’impôt, payer les services publics, on pourra même fermer les frontières pour protéger notre protection sociale. 

L’attitude de tous les candidats est déconnectée à deux niveaux.

D’abord, parce qu’aucun, à l’exception de François Fillon, a rappelé que la France était au bord de la faillite, en risque de perdre son indépendance. Plus grave, tous ou presque s’en moquent et expliquent que ça n‘est pas vrai.

Ensuite, toutes les politiques prescrites par 9 candidats sur 11 reprennent les recettes Keynésiennes de l’après guerre (1950), époque à laquelle on devait reconstruire une France détruite, avec des frontières fermées dans un monde qui ne cherchait pas à bouger. 9 candidats sur 11 ont la nostalgie des années 1960, époque a laquelle le modèle social, fonctionnait à l’équilibre pour le bonheur de tous avec un secteur public nationaliste omniprésent. Mais tout cela, c’était avant, comme dit la pub.

La modernité d’un monde ouvert et transformé par la technologie aurait besoin d’un autre discours, d’une autre offre de programmes.

Le débat de la présidentielle 2017 nous prépare une France qui ne sera pas gouvernable dans le monde moderne.

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