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Amélie Oudéa-Castéra : « Les Français sont capables de réaliser de grandes choses »

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Malgré le pessimisme ambiant qui entoure les JO de Paris, la ministre des Sports et des Jeux olympiques (pour le moment) se montre enthousiaste. Notamment sur les retombées économiques attendues, à court, moyen et long termes.

Propos recueillis par Yves Derai. Un article issu du numéro 27 – été 2024, de Forbes France, actuellement en kiosque. 

 

On dit tout et son contraire sur l’équilibre économique des JO de Paris. Question simple et directe : seront-ils rentables ?

AMÉLIE OUDÉA-CASTÉRA : Il n’est pas possible de répondre par un simple chiffre à cette question aujourd’hui. Nous ferons, au lendemain des JOP, une analyse approfondie des coûts et bénéfices de l’événement, c’est cette étude qui nous permettra de tirer les conclusions. Mais je peux vous dire dès à présent que le coût de l’événement pour le contribuable est maîtrisé. Sur le budget du Comité d’organisation qui est de 4,4 Md d’euros, 96 % sont issus de fonds privés (billetterie, droits TV, partenariats). Il reste donc 170 millions d’euros à financer, sur lesquels 125 millions d’euros sont pris en charge par l’État. Sur le second budget qui concerne les ouvrages, il y a 2,3 Md d’euros de financements publics et 2,1 Md de fonds privés. Il s’agit d’investissements d’avenir avec une rentabilité à moyen et long terme (logements, services, résidences étudiantes, etc.). Concernant les infrastructures les plus coûteuses comme le village olympique ou le village des médias, elles contribueront par la suite à améliorer très nettement le cadre de vie des habitants grâce aux éco-aménagements effectués et aux équipements générés, notamment les équipements sportifs.

 

Le contexte international tendu a-t-il entraîné des dérapages en matière de dépenses ?

A.O.C. : Non, malgré la guerre en Ukraine qui a entraîné, entre autres, une hausse des coûts de l’énergie et des matières premières.

 

Comment envisagez-vous les retombées économiques à moyen et long termes ?

A.O.C. : Selon une très sérieuse étude du Centre de droit et d’économie du sport, les retombées attendues varient dans une fourchette de 6,6 Md d’euros à 11,1 Md d’euros, avec une moyenne centrale à 8,9 Md d’euros. Trois postes, à parts quasiment égales, vont générer des revenus pour l’économie française : le tourisme, la construction et l’organisation événementielle. Pour le reste, je le redis, nombre d’investissements engagés par l’État permettront l’amélioration de la qualité de vie en Seine-Saint-Denis et plus largement en Île-de- France. Par exemple, la « baignabilité » de la Seine et de la Marne. Ces retombées-là sont difficiles à quantifier, mais elles n’en sont pas moins essentielles dans une époque marquée par le réchauffement climatique et l’attention portée à la protection de la biodiversité.

 

Qui contrôlera les comptes après les JO ?

A.O.C. : La Cour des comptes, comme cela est prévu par la loi.

 

Les JO profiteront-ils surtout aux Parisiens et aux Franciliens ?

A.O.C. : Pas seulement. Nombre de territoires en profiteront puisque, comme vous le savez, des épreuves se dérouleront dans 73 collectivités, ce qui fait de ces Jeux les plus décentralisés de l’histoire des Jeux. Il y a aussi le relais de la flamme, qui suscite un élan dans tout le pays. Si l’on se réfère à la dernière Coupe du monde de rugby qui concernait dix villes hôtes en France, on a constaté un impact significatif pour chacun de ces territoires. La fourchette de retombées que j’ai évoquée, entre 6 et 11 Md d’euros, ne porte à ce stade que sur l’Île-de-France. À l’étranger, si on regarde les Jeux de Londres, ils ont rapporté 15 Md de dollars à la Grande-Bretagne ; mais ils étaient plus coûteux que les nôtres.

 

Avez-vous anticipé des sujets tels que les indemnisations qu’il faudra verser aux commerçants devant fermer leurs commerces du fait des JOP ?

A.O.C. : Nous avons mis en place une gouvernance spécifique chargée d’étudier les situations au cas par cas. Il faut, pour qu’une décision d’indemnisation soit prise, qu’un préjudice anormal et spécial soit prouvé. Nous avons fait le maximum pour préserver la continuité de la vie économique. Les périmètres de circulation mis au point par la Préfecture de police prennent en compte les enjeux de livraisons. Nous avons aussi tenu compte des nécessaires solutions de continuité pour le transport des salariés. Un arrêté préfectoral a même été pris afin d’autoriser sur plusieurs périmètres les ouvertures des commerces les dimanches, du 15 juin au 30 septembre.

 

L’engouement pour la billetterie est à la hauteur de vos espérances ?

A.O.C. : Sur les JO, tout à fait, puisque 8,4 millions de billets ont d’ores et déjà été vendus. Pour les Paralympiques, c’est plus difficile mais nous y arriverons. Pour l’instant, nous sommes à moins d’un million de billets vendus. Il faut une mobilisation de tous, ces athlètes le méritent !

 

L’emploi va-t-il être boosté en France par les JOP ?

A.O.C. : Oui, forcément. 180 000 emplois sont concernés par l’événement dont 60 000 créations, dans la sécurité privée, le tourisme et la logistique, par exemple. Les commandes des PME/TPE ont elles aussi été boostées, et ceci dans la France entière. Ce que nous ne mesurons pas, c’est l’effet « PIB du bonheur » qui dépend non seulement de la réussite organisationnelle de nos Jeux, mais aussi des performances qu’accompliront nos athlètes.

 

Quel est votre objectif en termes de médailles tricolores ?

A.O.C. : Top 5 ! Si l’on se base sur l’historique des éditions précédentes, ça veut dire entre 15 et 20 médailles d’or, mais j’insiste : c’est en relatif que cet objectif a son sens.

 

Votre enthousiasme tranche avec le pessimisme ambiant entourant ces JO…

A.O.C. : En France, on est souvent pessimiste. C’est devenu presque culturel. Il faut appendre à avancer avec ça. J’aimerais justement que ces JO redonnent de la fierté aux Français, qu’ils leur rappellent que notre pays est capable de réaliser de grandes choses.

 

Hasard ou coïncidence, trois femmes comptent parmi les personnes qui chapeautent ces JO, la maire de Paris, Anne Hidalgo, la présidente de la région Île-de-France, Valérie Pécresse, et vous-même. C’est un atout ?

A.O.C. : Oui, je pense ! Il y a aussi des hommes comme Tony Estanguet, Stéphane Troussel ou Patrick Ollier ! Mais il est vrai que je travaille très bien avec Valérie Pécresse et les équipes de la mairie de Paris.

 

Pas Anne Hidalgo elle-même ?

A.O.C. : Ça a pu être plus difficile par moments, ce n’est pas un secret. Elle a eu quelques déclarations désagréables à mon égard. Mais fort heureusement, nous savons dépasser nos divergences politiques dans l’intérêt du pays.

 

Les JOP vont-ils permettre le développement de la pratique du sport dans notre pays ?

A.O.C. : Emmanuel Macron a décrété le sport Grande cause nationale. La campagne « 30 minutes d’activité physique par jour » porte ses fruits, et nous avons déjà 3,5 millions de pratiquants supplémentaires depuis 2017. Nous en espérons 3 millions de plus d’ici la fin du quinquennat ! Certains sports olympiques, que le public va peut- être découvrir cet été, participeront certainement à cette dynamique. Je pense au breaking, au skate, à l’escalade ou au basket 3×3. Mais toutes les fédérations, qu’elles soient olympiques ou pas, doivent se mobiliser pour bien accueillir enfants et familles dans leurs clubs au lendemain des Jeux.

 

La ministre aux côtés des relayeurs de la flamme olympique à Caen pour l’étape du relais dans le Calvados le 30 mai dernier.

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