Article écrit avec Alexandre Guillard et Pascal Le Goff
Personne n’est passé à côté de la bombe ChatGPT avec un million d’utilisateurs en 5 jours lors de son lancement en novembre 2022. Aujourd’hui la principale application d’IA générative compte 180 millions d’utilisateurs et enregistre plus de 1,8 milliard de visites en 2024. La technologie du LLM (Large Language Model) propose la production de contenus à partir de données publiques et privées ouvrant ainsi le champs de l’automatisation des activités de production de connaissances. ChatGpt, Bard, Copilot, MidJourney, Dall-E, Sono, etc. sont autant d’applications qui permettent de créer du contenu sous forme de textes, d’images, de musiques, d’animations, etc. Le champs des applications est immense avec la crainte de voir des machines penser et créer à la place des humains. Si la promesse est forte, la matérialisation actuelle en entreprise prend la forme d’expérimentations sous la forme de POC (Proof of Concept) avec des difficultés de passage à l’échelle. De nombreuses organisations cherchent à utiliser les POC pour avoir une méthodologie de déploiement de l’IA. L’outil « Matrice de maturité IA » s’inscrit dans cette logique.
Un groupe de travail inter-entreprises
La chaire ESSEC du Changement a créé en mars 2024 un groupe de travail sur le thème «Change IA » avec les entreprises TotalEnergies, Orange, FDJ, Groupe Bessé, RATP, Covéa, Eurogroup Consulting et Naval Group qui formalisent les conditions et les processus de déploiement de l’IA en entreprise et les conditions de changement. Ce groupe de travail a proposé différents types de chartes de l’utilisation de l’IA dans une optique de sécurité et d’éthique[1]. Une autre production de ce groupe a été de penser les prérequis en termes de changement (« enablers ») et les étapes du déploiement de l’IA sous la forme d’une matrice de maturité IA. Pour cette tâche, le groupe s’est inspiré des modèles de diffusion de la technologie comme ceux du MIT[2] sur la maturité digitale des entreprises en partenariat avec Cap Gemini.
Proposition d’une matrice de maturité de l’IA
La matrice de maturité IA est construite autour de deux axes. Un axe opérationnel qui évalue la capacité de l’entreprise à intégrer de l’IA dans ses activités et processus. Un axe dit culturel qui détermine le niveau de connaissance de l’IA et de réflexion de l’utilisation de cette technologie dans le fonctionnement actuel et futur de l’entreprise. Le croisement de ces deux axes fait émerger 4 typologies d’organisation croissantes en fonction de leur maturité à l’IA. Pour chacune des typologies sont mentionnées des actions qui permettent d’atteindre ce niveau.
Figure 1 : Matrice de maturité de l’IA
Niveau 1 – Découverte : Des personnes de l’entreprise s’intéressent au sujet et transmettent aux autres de nombreux supports (articles, vidéos, etc.) et font part de leur expériences bien souvent privées d’outils d’IA.
Niveau 2 – Culture IA : Une partie de l’entreprise est en cours d’acquisition d’une bonne connaissance de l’IA en termes de technologies, de produits et d’utilisations. Des outils comme la fresque de l’IA, des Mooc et des séminaires dédiés sont mobilisés. L’objectif est de démystifier et donner au plus grand nombre les connaissances pour expérimenter avec des équipes d’experts en mode avancé.
Niveau 3 – Expérimentation IA : L’entreprise mène de nombreuses expérimentations (Programme de POC) avec des outils d’IA sur des activités internes pour voir les gains et le modalités d’appropriation. Pour cela les entreprises listent les activités qui sont les plus éligibles avec des grilles d’éligibilité.
Niveau 4 – IA à l’échelle : C’est le niveau le plus développé. L’entreprise, après la phase d’expérimentation, déploie l’IA pour la réalisation de certaines de ses activités. L’IA devient alors une technologie utilisée en mode production de manière opérationnelle.
Aujourd’hui la plupart des entreprises oscille entre le niveau 1 et 3 et très peu accèdent au niveau 4. Cela vient du fait que les expérimentations se multiplient pour s’assurer de la qualité des résultats obtenus. Mais l’effort actuel consenti dans les expérimentations devrait déboucher sur ce niveau 4 à condition de tenir compte des modalités d’appropriation mettant ainsi en avant la conduite du changement pour ce type de transformation. Cette matrice de maturité à l’IA est à la fois un outil d’évaluation mais aussi une manière de construire un projet de déploiement de l’IA. Cela vient compléter d’autres outils de diagnostic, comme par exemple le « MAIAT » (Mesure de l’Acceptabilité sociale de l’IA au Travail) du LaborIA[3].
[1] Guillard A. Legoff P., 2024, Les défis du changement organisationnel pour l’intégration de l’intelligence artificielle générative : proposition d’un prototype de grille de maturité change , Question(s) de Management, septembre 2024
[2] MIT (2012), The digital Advantage : How digital leader outperform their peers in every industry, 2nd report of Capgemini Consulting’s joint research program with MIT CDB, 2012 MIT center For Digital Business and Capgemini Consulting – www.fr.capgemini-consulting.com/digital-transformation
[3] Rapport de la recherche-action du LaborIA in Jean Condé, Yann Ferguson, « Rapport d’enquête usages et impacts de l’IA sur le travail, au prisme des décideurs », mars 2023, https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/enquete_laboria.pdf
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