Alors que les protections intimes sont pointées du doigt en raison de la présence de résidus toxiques pour la santé des femmes et pour la planète, de nouvelles marques 100% responsables sont apparues.
Des start-up bousculent actuellement le marché en s’appuyant sur une communauté de femmes « qui refusent d’être empoisonnées et recherchent des alliés pour leur santé », explique Marion Goilav, à l’origine d’Elia Lingerie. Une alternative aux produits des marques institutionnelles, que ces Digital Native Vertical Brands (DNVB) élaborent sur le terrain avec des ateliers de rencontres et sur les réseaux sociaux avec les utilisatrices : « Nous co-construisons avec les communautés », souligne Léocadie Raymond, cofondatrice de Teolab. Rencontre avec ces startuppeuses à l’énergie contagieuse qui réinventent les bonnes pratiques dans la santé intime des femmes.
Marion Goilav. Elle est la cofondatrice d’Elia, une marque de lingerie menstruelle en tissu végétal bio élégante, absorbante et confortable, qui remplace la protection hygiénique classique.
Comment est née Elia Lingerie ?
Marion Goilav : La genèse d’Elia est l’endométriose dont je suis atteinte. J’ai eu envie de trouver un moyen de lancer un produit sain et écologique autour de l’hygiène intime féminine qui réunirait l’engagement et la communication sur cette maladie. C’est en achetant des culottes menstruelles sur un site australien mais fabriquées en Chine que j’ai décidé d’en faire un produit sain : une lingerie confortable et réutilisable qui préserve la planète.
Quelle est la composition de vos culottes ?
M. G. : La surface au contact de la peau est en coton issu de l’agriculture bio, c’est-à-dire une agriculture sans pesticides et avec une consommation d’eau réduite. La technologie en fibres d’eucalyptus permet d’assurer une protection sans risques.
Qu’est-ce qui a changé pour vous depuis la concrétisation de ce projet ?
M. G. : L’impression de dérouler le fil rouge d’un produit qui peut être toujours plus vertueux. Par exemple, le coton, même bio, est nocif dans sa transformation, on voudrait par conséquent migrer vers du chanvre.
Comment vous faites-vous connaître ?
M. G. : Pour moi, communication et sensibilisation sont liées avec la création d’un produit qui protège les femmes et la planète. Des convictions que l’on communique sur les réseaux sociaux et qui fédèrent une communauté de femmes qui en parlent encore mieux que nous.
Comment voyez-vous Elia dans deux ans ?
M. G. : Je voudrais aller plus loin dans l’organisation d’événements autour la santé intime. Chaque achat génère déjà un don à des associations de recherche dans ce domaine. Et bien sûr, nous souhaitons créer d’autres produits, encore plus absorbants et avec plus de dentelle. N’oublions pas que c’est aussi de la lingerie : le bien-être en toute féminité !
Leocadie Raymond : Elle a cofondé Teolab, une société qui produit et distribue des cups, des coupes menstruelles innovantes, écologiques et fabriquées en France.
Quel a été le déclic pour lancer Teolab, votre société de cups menstruelles ?
Leocadie Raymond : À la naissance de mon fils, la sage-femme a mentionné la cup, je n’en avais jamais entendu parler. J’ai trouvé cette invention géniale. Il se trouve que j’étais en pleine reconversion et lorsque j’en ai discuté avec celui qui n’était pas encore mon associé, Thomas Rosset, cela nous a paru évident de nous lancer. Même si au départ Thomas ne se sentait pas forcément légitime – à tort – sur les questions de la protection intime.
Est-ce un produit compliqué en termes de communication ?
L. R. : Oui et non. Le procédé de la cup aborde directement l’intimité des femmes. On a eu des freins, mais en cinq ans d’existence, je trouve que le regard sur l’hygiène intime, notamment sur le sujet des règles, a positivement évolué. Par exemple, la TVA ramenée à 5,5 % sur les produits d’hygiène intime a été possible grâce à la mobilisation des femmes dans le monde entier pour que cela ne soit plus considéré comme un produit de luxe. Il y a une convergence dans la lutte contre la précarité menstruelle et pour l’émancipation du corps des femmes.
L’engagement est-il également écologique chez Teolab ?
L. R. : Notre cup est un produit made in France fait avec un silicone médical stérilisable (aucune migration de matières), sans colorant et non toxique. Un long travail de consultation auprès de professionnels de santé nous a permis de breveter dans 74 pays une forme de cup qui assure un confort optimal. Elle coûte 25 euros et se change tous les cinq ans.
Quel est le challenge de Teolab ?
L. R. : D’un côté, nous avons un marché mondial – partout les femmes ont leurs règles – et de l’autre, on s’aperçoit que sur dix femmes qui essaient notre cup, neuf laissent tomber leur protection hygiénique. Notre défi est de convaincre chacune d’essayer une fois. Les marques institutionnelles qui vendent désormais leur propre cup nous aident dans ce travail d’évangélisation.
Les marques institutionnelles ne vous concurrencent donc pas ?
L. R. : C’est l’autre challenge. On a pris de l’avance avec notre brevet ergonomique. La concurrence dans son ensemble exploite le même brevet d’origine, qui date des années 1930. Ils vont peut-être écraser des petites marques, mais Teolab a quelque chose de vraiment différent. Teolab est une Digital Native Vertical Brand qui s’appuie sur une communauté de « cuppeuses » aussi engagées qu’influentes. Par exemple, 20 % de notre trafic vient de l’étranger alors qu’on ne communique pas là-bas. Une bonne partie de notre visibilité repose sur cette communauté à la faveur d’un hashtag sur Instagram ou ailleurs.
Comment voyez-vous Teolab dans deux ans ?
L. R. : Nous travaillons pour nous implanter en Amérique du Nord, mais aussi en Afrique et bientôt en Asie. Nous avons en ce moment une cheffe de projet au Sénégal qui organise des ateliers-rencontres sur le terrain pour présenter aux femmes les produits et mieux comprendre leurs sujets de préoccupation : ils doivent refuser du monde!
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