Nous passons aujourd’hui plus de 12 % de notre vie au travail (contre 40 % au début du siècle dernier et 70 % vers 1870). Ce travail, que certains qualifient de « torture » (ce qui est un raccourci, puisque l’étymologie du terme « Tripalium » fait certes référence à un instrument de torture mais également de soin aux animaux), est pourtant essentiel à nos vies. Ne serait-ce que pour gagner de l’argent, et répondre à nos besoins les plus essentiels – se nourrir, s’habiller, etc. – mais également pour créer du lien social.
La question du bien-être au travail reste encore secondaire dans notre culture. Pourtant, il est prouvé qu’un salarié heureux est beaucoup plus productif et créatif. La performance et le bien-être s’alimentent l’un et l’autre. A contrario, la productivité d’un salarié malheureux serait 10 % inférieure à la moyenne. Et on constate que moins d’un salarié sur deux aujourd’hui admet se sentir bien dans son travail.
Comment sortir de cette ornière ? Mais alors, existe-t-il une recette magique qui permettrait d’instaurer un cercle vertueux entre performance et bien-être ?
Les limites des recettes existantes
Les entreprises y réfléchissent depuis longtemps. Elles ont expérimenté plusieurs voies, mais n’ont pas trouvé de « recette miracle ». Au-delà du fait que chaque entreprise évolue dans un contexte qui lui est propre, le premier réflexe est de considérer que pour rendre les salariés plus heureux, il convient d’augmenter leur salaire. C’est bien connu, même si il y contribue, l’argent ne fait pas le bonheur. Une augmentation de salaire ne suffit pas, surtout au-delà d’un certain plafond de rémunération. L’effet est limité dans le temps et n’a d’impact que sur du court terme.
Des entreprises choisissent plutôt d’améliorer l’environnement de travail. Si les baby-foot, tables de ping-pong ou cafétérias sont certes appréciés, ils restent « accessoires » selon les collaborateurs eux-mêmes, pour qui le « sens » reste essentiel. D’autres entreprises tablent sur une évolution organisationnelle, avec par exemple la nomination d’un Chief Happiness Officer. Encore faut-il lui donner les moyens pour concrétiser les ambitions de l’entreprise, sans tomber dans le biais du « gadget ». Le bonheur ne se décrète pas…
D’autres encore vont plus loin dans l’évolution organisationnelle, en mettant en œuvre des principes d’holacratie ou d’entreprise libérée. Là encore, si l’intention peut être positive car elle repose sur la confiance, le dialogue et le feed-back, les retours d’expérience de sociétés comme Favi, Poult ou Harley Davidson mettent en relief un obstacle majeur : lorsque le créateur de l’entreprise ou l’autorité charismatique s’en va, la dynamique s’écroule (pour des raisons diverses qui vont de la lutte pour le pouvoir au fait que l’absence de hiérarchie ne convienne pas à tout le monde). Et l’expérience de Zapos a montré d’autres limites.
L’entreprise libérée est souvent présentée comme une prise de pouvoir du salarié sur la direction, donc comme le renversement de la pyramide hiérarchique. Mais à quoi peut servir cette inversion si on ne commence pas par soigner les relations dans l’entreprise ?
La baguette magique, c’est nous-même
Ce qui nous ramène à la question du management et de son importance dans l’entreprise, et donc à nous-mêmes au sein d’une structure collective qui nous dépasse. Comme l’expliquait Gandhi, on ne peut pas changer le monde sans commencer par se changer soi-même. Mais cette remise en cause n’est pas si évidente puisqu’elle relève en grande partie de nos émotions. Il n’existe donc pas de recette magique, ou plutôt la baguette magique c’est nous-même !
La solution consiste plutôt, à mon sens, à replacer les individus au cœur de l’entreprise. Nous avons tous des responsabilités et des compétences. Le simple fait de l’accepter permet de souligner l’importance de la collaboration et l’intelligence collective, et d’en tirer tous les bénéfices.
Ce qui passe par un peu d’introspection (bien connaître ses propres besoins et valeurs) ; beaucoup de communication, d’échanges et de feed-back ; et bien-sûr de l’écoute et de la bienveillance. Le salarié comme le manager doivent accepter la remise en question. Tout l’art du manager consiste à devancer les problèmes ou freins éventuels, en comprenant bien les moteurs de motivation du salarié, ses attentes, ses besoins, ses valeurs, et en les analysant au regard des objectifs fixés par l’entreprise.
Osez la remise en question
Entrer dans la relation à l’autre nécessite une capacité à se remettre en question soi-même. L’écoute, la sincérité, l’authenticité, le réalisme sont autant d’atouts pour adapter le management aux forces et potentiels d’amélioration de chaque collaborateur. Ce qui démarre par le fait d’accepter que si nous sommes tous différents, nous avons tous quelque chose à apporter.
Le développement personnel passe finalement bien souvent par le développement professionnel d’un individu. Et l’essentiel réside le plus souvent dans les relations que nous parvenons à construire avec nos collègues. Soigner des relations ne s’achète pas, mais s’apprend. Prendre en compte l’individu et la personne est essentiel, mais difficile. Le management peut et doit nous y aider.
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