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Nourrir le Lien Après 3 Semaines de Télétravail

télétravail
Young woman sitting at table looking at her laptop and drinking coffee. Female using laptop at home.

Pour ceux qui peuvent l’opérer, ce passage en télétravail forcé est une épreuve, dont les premiers retours sont mitigés. A savoir que le télétravail n’est pas nouveau. Apparu en 1980, il a progressé lentement sans vraiment s’imposer. Limitant les contraintes de transport, propices au travail de réflexion, seulement 1/3 des entreprises sont réellement favorable au télétravail. Les grèves de 2019 ont accéléré son adoption : la contrainte de déplacement a fait nécessité et le passage à l’acte a permis de lever les freins bloquants initialement perçus.

Reste la position de certains dirigeants pour qui à l’instar de Lénine « la confiance n’exclut pas le contrôle ». Ils ponctuent la journée de travail à distance de leurs collaborateurs de multiples réunions virtuelles, autant pour se rassurer de leur capacité de contrôle que pour justifier leur position hiérarchique. En même temps, il est vrai que le travail à distance repose la question de l’autodiscipline personnelle et de la gestion des priorités ! Reste que ces expériementations de télétravail s’inscrivent jusqu’à présent en complément d’une organisation du travail existante. Il s’agissait d’une forme alternative de travail ou d’une option au bénéfice d’un surcroit de fléxibilité.

Depuis 3 semaines, c’est la contrainte qui nous dirige. C’est d’ailleurs la définition d’une gouvernance de crise que de nécessiter une réduction de liberté au motif d’intérêts supérieurs. Face à cette situation, on retrouve l’archétype du peuple français : souvent indiscipliné, réservé vis-à-vis de l’Etat, et résilient. La résilience fait référence aux compétences trouvées ou créées par des individus pour faire face à des situations délétères : événements de vie traumatiques, accidents, maladies, handicaps, carences affectives graves, grande précarité, etc. C’est probablement cette capacité de résilience qui structure dans la situation un sursaut de réaction individuelle conduisant à une forme d’autodiscipline collective. Dans l’entreprise, la résilience permet de nous adapter aux situations nouvelles.  Sans réelle vie sociale, la problématique quotidenne devient celle du maintien de la motivation, du sentiment d’appartenance et de l’alignement. Les outils de collaboration sont nombreux. Ils permettent de travailler très bien ensemble. Mais ils ne garantissent en aucun cas que le collaborateur garde un engagement dans la durée.  La technologie n’est qu’un vecteur, difficilement capable de véhiculer l’émotion et la sincérité pourtant nécessaires au management d’équipe.

Rester humain et nourrir le lien avec les collaborateurs éparpillés constituent de vrais défis pour le dirigeant. Dans ce contexte de crise, le besoin de briser l’isolement, d’échanger, de cultiver un sentiment d’appartenance rassurant et de comprendre le sens de son travail, est déterminant. Le confinement induit nécessairement un repli sur soi ; il favorise le développement de l’individualisme. Or dans cette période, il s’agit surtout de continuer à garder une équipe la plus soudée possible pour favoriser un démarrage rapide post-crise. Rendez-vous réguliers en visioconférence, scénarisation de réunions vidéo, chat d’échanges informels… autant de formats qu’il s’agit de multiplier pour continuer à échanger l’information et suppléer aux discussions informelles de la machine à café. En complément, et même si les collaborateurs gardent leur motivation intacte, le télétravail ne favorise pas l’alignement d’équipe. Comme bon nombre d’entreprises vivent dans un monde d’objectifs « flous », le propre du management au quotidien est de les préciser, de les réaffirmer, de les expliquer sans cesse pour garantir une contribution. A distance, il devient en revanche nécessaire de redescendre à un niveau de micro-management.

Autant d’expériences qu’il faut acquérir vite et qui feront que cette période durant, la productivité de ceux qui peuvent passer en télétravail restera préservée, voire que nous apprendrons à optimiser notre management pour la période d’après-crise. La contrainte induisant toujours un changement, une fois l’effort opéré et l’expérimentation réussie par la force des choses, il sera ainsi plus facile de capitaliser sur de nouveaux modes de fonctionnement en les généralisant. Nul doute que cette période changera durablement nos usages au quotidien et notre relation au travail.

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