Peur, joie, dégoût, surprise, colère, bonheur, tristesse… Les émotions ne sont pas forcément le propre de l’homme, mais elles le caractérisent fondamentalement. Dérivé de la racine latine « emovere », le mot évoque une « mise en mouvement ». Réaction psychologique et physique à une situation, l’émotion est d’abord interne, puis elle se manifeste extérieurement.
Avant l’âge de cinq ans, un enfant a peu de filtres. Il partage ses émotions sans se soucier du jugement d’autrui, ni de l’impact qu’elles peuvent avoir sur les autres. A partir de la crèche ou de l’école primaire, il bascule dans un autre monde, fait de règles et de normes régissant la vie sociale. Cela se poursuit bien sûr au collège, au lycée et à l’Université, comme dans l’entreprise.
Apprendre à vivre ensemble signifie souvent se rapprocher d’un standard, entrer dans un moule. On devient plus soucieux du regard des autres – « les garçons ne pleurent pas » – donc on contrôle, on dissimule, on adopte des codes qui ne nous ressemblent pas forcément. Seuls quelques marginaux, anticonformistes et artistes semblent puiser leur énergie dans l’opposition à ces « convenances ». La grande masse préférant se conformer, tant par souci de ne pas s’isoler que par discrétion.
Au final, la société décapite les « trop de tout » et accepte l’aliénation du « juste assez ». Si l’idée est de rester dans le cadre, il convient de couper tout ce qui dépasse…
Oser être soi-même
Pourtant l’authenticité est une qualité, une richesse. Même en entreprise ! A fortiori en entreprise, devrais-je écrire. On s’épanouit quand on est soi. Nous devons accepter de lâcher prise et de laisser parler nos émotions. Tout l’art du management consiste à canaliser cette énergie, à permettre à chacun de se révéler et de tirer parti de ses propres émotions.
L’un des principaux éléments de différenciation de l’entreprise réside dans sa culture, c’est-à-dire son ADN, ses valeurs. Et les émotions sont ce qui donne une âme à l’entreprise et forment simultanément un important moteur de performance. L’entreprise ne peut pas se résumer à un endroit « où l’on va juste travailler ». Il est essentiel qu’elle vive, qu’elle respire, qu’elle ait une « âme » pour permettre à chaque collaborateur de s’épanouir, de partager des valeurs communes, de se sentir capable de donner plus que ce qui est indiqué dans sa fiche de poste.
Les managers doivent avoir conscience que les émotions ont leur place dans l’entreprise, comme dans la société. Ils devront tout d’abord apprendre à ressentir leurs propres émotions, à comprendre leurs besoins fondamentaux – en se faisant coacher si nécessaire – avant d’appréhender ceux de leurs équipes. D’une part, ils peuvent accompagner les salariés via des sessions de formation, dont la diversité répondra à la variété des tâches que l’entreprise doit accomplir – gérer le temps, le stress, les conflits ; animer une réunion, mener un projet ; communiquer, informer, partager des savoir-faire… D’autre part, ils ont tout intérêt à orienter la répartition des tâches non seulement en fonction des compétences des collaborateurs, mais surtout de leurs besoins profonds, de leurs aspirations, afin de les aider à progresser.
Un peu de folie ne nuit pas… au contraire
A l’ère de la concurrence globalisée et de la transformation numérique, la créativité et l’innovation sont des éléments qui participent de la différenciation des entreprises. Une nouvelle injonction propose de sortir du cadre établi (« Think out of the box »), comme le font de nombreuses startups depuis quelques années. Des créateurs comme Steve Jobs ou Elon Musk prouvent que les entreprises ont aussi besoin d’un peu de « folie ». Et il en faut pour « uberiser » la conquête spatiale ou inventer le concept du smartphone… Ce sont pourtant les « marginaux » qui hantaient le fond de nos salles de classe, qui ont tout fait pour préserver leur part d’enfance, avec leurs projets un peu fous, leurs illusions, leurs rêves, et ainsi qui ont pu aller plus loin que les autres.
C’est en tout cas le sens de l’histoire. Si les startups ont relégué les cravates dans la boîte à souvenirs, ce qui relève au fond de l’anecdote, elles ont surtout contribué à faire voler en éclat le fameux cadre traditionnel hérité de l’ère industrielle et du Fordisme. L’éducation se met au diapason, en s’efforçant d’apporter un enseignement plus chaleureux, basé sur l’échange et prenant en compte les préoccupations individuelles de chacun.
La notion de collectif est bien-sûr essentielle dans le contexte de l’entreprise. Mais pour s’épanouir dans un collectif, il convient avant tout de se sentir bien avec soi-même. Et même si le manager ne doit pas devenir le psychanalyste de son équipe, il peut faire en sorte de passer d’un mode de management directif à un management plus ouvert, laissant place à plus d’autonomie et de créativité. Et nous libérer des contraintes que nous nous imposons nous-mêmes pour nous mouler dans le collectif, mais qui entravent notre bien être et notre performance.
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