L’espace de travail (digital workplace) est à reconstruire autour d’outils favorisant la productivité et le bien-être et qui ne seront pas perçus par les collaborateurs comme une nouvelle laisse numérique. Souvent pointés du doigt par les nouveaux indicateurs de la qualité de vie au travail, la technologie et ses nombreux outils de communications ne sont pas exempts de torts. Et ce n’est pas le droit à la déconnexion qui enrayera la multiplication des canaux de communication, l’interruption permanente et la difficile conciliation entre vie personnelle et vie professionnelle.
Avec la fragmentation des temps et des lieux de travail, existe-t-il encore une frontière entre vie privée et vie professionnelle ?
Nous sommes amenés à travailler sur des plages horaires de plus en plus étendues et des lieux de travail de plus en plus multiples (maison, transport, open-space). De fait, un même équipement (smartphone, tablette, ordinateur portable) est utilisé indifféremment pour les activités personnelles – regarder une série Netflix à partir de son smartphone ou de son laptop pro lors d’un déplacement à l’étranger – et inversement, envoyer un email pro ou poster sur les médias sociaux au travers de sa tablette perso du fond de sa méridienne. Une pratique qui se répand, qu’elle soit autorisée ou non dans le cadre d’une politique B/CYOD (Bring/Choose your own device). Les vies s’en retrouvent imbriquées sans frontières physiques, temporelles ; un monde où les applications d’origines diverses sont mélangées et utilisées à tout moment de la journée. Ce phénomène brouille un peu plus l’équilibre individuel : un employé utilise en moyenne trente-six services différents*, indifféremment dans sa sphère privée et professionnelle.
Multiplicité des canaux de communication et confrontation des usages
Parallèlement, les canaux de communication (voix, vidéo, texte, image…) se multiplient dans l’entreprise. Ils sont intégrés à des suites logicielles ou constituent un patchwork mêlant applications professionnelles et personnelles grand public. Ce qui n’est pas sans compliquer la tâche des directions informatiques. Ces dernières tentent d’homogénéiser des outils et des pratiques et voient des directions métiers, quand ce ne sont pas les salariés eux-mêmes, introduire des applications en marge des stratégies de la société (Shadow IT). Une double peine pour les DSI : ces applications échappent à l’indexation et à l’archivage unifiés des échanges et portent souvent les failles de sécurité. Ainsi, régulièrement, un nouveau canal, une nouvelle application fait son apparition, et le plus souvent il n’y a pas de substitution : chaque nouveau canal adopté est ajouté aux autres. Les utilisateurs qui utiliseront facilement plusieurs canaux simultanément, ont aussi tendance à déterminer, à un canal, un mode de communication ou un groupe d’utilisateurs.
Ainsi, paradoxalement, un canal se spécialise et/ou porte rapidement un caractère de type formel, ou informel. Par exemple, le ton des échanges sur WhatsApp ou par SMS se distinguera de celui utilisé via un email, alors même que le correspondant resterait identique. Il n’y pas un usage unique partagé dans l’entreprise, mais des usages différenciés au sein de communautés.
Pédagogie, personnalisation et répétition
Un autre paradoxe concerne l’adoption des outils professionnels par les salariés. Les générations Y, Z sont nativement adaptées à la technologie, mais pas à son usage en entreprise. Elles rechigneront à utiliser les outils de la société, souvent par défiance, ou parce que justement, dans leur pratique personnelle, un canal de communication comme la messagerie instantanée est dédié aux amis, pas aux collègues. Ce sont pourtant les générations qui laissent le plus facilement pénétrer un nouveau canal de communication sur le lieu de travail, principalement les médias sociaux.
Un challenge de plus pour le DSI ? Une étude récente** révèle que dans le cadre d’un projet de digital workplace et d’introduction de nouveaux outils, les formations sont plébiscitées (78%) par les DSI afin d’engager les collaborateurs, contre 47% pour le coaching. Pourtant, si le DSI est un ambassadeur du projet de la transformation digitale, ce dernier doit bien engager l’entreprise dans sa globalité avec le concours des DG, DRH, DAF, etc. Et dans ce cadre particulier, l’accompagnement au changement sera crucial dans la bonne adoption des solutions technologiques. Oubliez les classiques formations, les projets e-learning et autres MOOC (massive open online course) … Ce qui produit des résultats ce sont les cas pratiques et le coaching sur la durée : pédagogie, personnalisation et répétition.
Le psychologue et sociologue australien Elton Mayo nous apprenait déjà, dans les années 30, que l’intérêt porté aux individus sur leur comportement, les incite à se surpasser. C’étaient les prémices de ce qui se définira, quelques années plus tard, comme la Qualité de Vie au Travail.
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Tribune de Jean-Denis GARO, International Integrated Marketing Director, Mitel
* McAfee 12 Must-Know Statistics on Cloud Usage in the Enterprise https://www.skyhighnetworks.com/cloud-security-blog/12-must-know-statistics-on-cloud-usage-inthe-enterprise/
** Les DSI et la Digital Workplace, 2019. Sondage OpinionWay pour Mitel et Orange Business Services
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