Plus de 1000 personnes par jour apprennent qu’elles ont un cancer. La moitié d’entre elles travaille. Des projets sont menés pour briser ce tabou au travail. Isabelle Guyomarch, chef d’entreprise, témoigne de la difficulté d’avoir un cancer en étant cheffe d’entreprise.
Entre Octobre Rose, campagne annuelle de sensibilisation dépistage du cancer du sein, et Movember, fondation qui chercher à lever les voiles sur le cancer de la prostate et du testicule, la fin d’année est synonyme de lutte contre les tabous autour du cancer. Car cette maladie, qui peut prendre des dizaines de formes différentes, est encore très tabou dans la société et au travail.
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Tous les trois ans, Cancer@Work publie un « baromètre » sur la prise en compte des situations de cancer en entreprise. Ce baromètre analyse les attentes de la population active ainsi que l’impact de la maladie sur la vie professionnelle des personnes concernées et de leur entourage.
Selon le baromètre, en contrepoint d’une forte augmentation du nombre de nouveaux cas de cancer en France, la question du tabou progresse lentement et encore 1 actif sur 2 considère qu’il est difficile de révéler sa maladie à son entourage professionnel. Même si 8 actifs atteints d’un cancer sur 10 annoncent leur maladie à leurs collègues, 7 sur 10 à leur hiérarchie.
Le manque de dialogue conduit à des difficultés, pour les personnes et les entreprises, relationnelles, organisationnelles et économiques. Deux tiers des actifs ayant eu un cancer estiment ne pas avoir les mêmes opportunités de carrière que les autres actifs. Un ancien malade du cancer 4 estime ne pas avoir retrouvé sa place au sein de l’entreprise.
La demande est croissante sur la mise en œuvre d’actions concrètes en entreprise pour sensibiliser largement le monde du travail mais aussi celui de la santé aux situations de cancer, pour former les représentants des ressources humaines, le management, les services de santé au travail ou encore les partenaires sociaux et, accompagner les personnes et les équipes. 80% des salariés veulent davantage de formations en entreprise sur ce sujet.
Malade et cheffe d’entreprise
Face à la difficulté de ne plus faire du cancer un tabou, un témoignage original vient de paraitre aux éditions du Cherche Midi (128 p., 17 euros) : Combattante, d’Isabelle Guyomarch. A l’été 2013, cette cheffe d’une entreprise de fabrication de produits cosmétiques près de Rouen, découvre qu’elle est atteinte d’un cancer du sein très avancé. Toute sa vie bascule, alors qu’elle doit jongler entre sa vie de mère de famille – elle a deux filles -, et sa vie de capitaine d’industrie – son entreprise compte 250 salariés.
Isabelle Guyomarch s’attelle au récit de son traitement, difficile, douloureux, et à la difficulté de « garder le cap » de sa lourde tâche d’entrepreneuse alors que ses associés cherchent à vendre son entreprise – qu’elle considère comme sa « troisième fille ». L’auteure en profite pour témoigner de la difficulté d’être une femme dans un monde d’hommes – celui des affaires – et de l’épreuve que revêt l’impossible épanouissement de sa féminité, alors que la maladie ravage son corps et son esprit. : « Lorsque le médecin a confirmé que j’avais bien un cancer j’ai cru tomber de 100000 étages, pourquoi moi ? Après le temps du désespoir est venue la rage de vaincre la maladie et de ne surtout pas la laisser m’abattre ! » assure-t-elle.
De ce « combat », Isabelle Guyomarch en a tiré une nouvelle aventure entrepreneuriale. Elle a en effet fondé la marque Ozalys, « créée par des femmes pour les femmes touchées par le cancer du sein » avec une gamme complète de soins d’hygiène, visage et corps, pour les aider au quotidien à prendre soin d’elles.
« Mon histoire est celle de milliers de femmes à travers le monde, relève Mme Guyomarch. Comme beaucoup de « cancer survivor » j’ai éprouvé le besoin de donner un sens à cette épreuve. Ce qui était finalement de la résilience est devenu grâce aux femmes du Groupe CCI Productions, un formidable projet d’entreprise. »
L’avis de Forbes France
Un cancer c’est une épreuve, une souffrance, tant physique qu’émotionnelle. Mme Guyomarch raconte les ravages de la chimiothérapie avec une relative précision, tout comme ses liens puissants avec ses enfants, ou encore sa féminité battue en brèche. Il y a des passages incontestablement touchants dans cet ouvrage : quand elle explique qu’elle s’est battue pour pouvoir faire réaliser l’abattions de son utérus avant son cancer, qu’à cause de la maladie, les portes des banques se sont fermées alors qu’elle voulait racheter entièrement l’entreprise qu’elle dirigeait… Mais sans en vouloir au livre de ne pas être un chef d’oeuvre de littérature, on ne peut passer outre l’indigence du style, et la lourdeur indigeste des effets de narration. Le propos manque ostensiblement de finesse, de subtilités, de nuances, de richesse, et ne se propose ici que d’accumuler les poncifs classiques du malade qui se doit d’être fort, de combattre la maladie, de s’accrocher à la vie. Comme tous les récits de résilience, la guérison de la malade ne semble tenir qu’à ses efforts, à sa volonté de ne rien lâcher. Lorsqu’une de ses filles laisse tout tomber pour venir soutenir sa mère, on espère alors que le livre va changer de ton. Il n’en est rien. En transcrivant la figure de la self-made woman au domaine de la maladie tout juste curable, l’auteure finit par paradoxalement trop parler d’elle, et en oublie ce qui fait un grand livre ou un simple témoignage parmi d’autres : la quête, a minima, d’un réel soupçon d’universalité.
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